#2.15 DESTINIES

 

******

 

Disclaimer :

Smallville et ses personnages ne m’appartiennent pas
Smallville © The Warner Bros Television & DC Comics
Smallville created by Alfred Gough & Miles Millar
Superman © DC Comics
Superman created by Jerry Siegel & Joe Shuster

Cette histoire n’existe que pour le plaisir des fans. Je n’ai pas été payé pour l’écrire et n’en tirerais aucun avantage lucratif

Droits :

Hormis les copyrights ci-dessus, cette histoire m’appartient dans sa totalité en vertu de la législation sur la propriété intellectuelle et de celle sur les droits d’auteur.
Interdiction formelle de reproduire, d’utiliser et/ou de diffuser cette histoire sans l’autorisation expresse de son auteur

********


Résidence SETHI – Guizeh – EGYPTE – 00h06

L’ambiance qui règnait alentour n’avait rien de très rassurant. Le froid ambiant, fouettant le visage de quiconque s’aventurait dans les lieux obscures, aurait eu de quoi geler le moindre être humain à sang chaud, même si son métabolisme était habitué à ce genre de température. Car outre la température horriblement basse ce qui provoquait des frissons dans tout le corps, partant de la tête pour parcourir en une fraction de secondes chacun des membre, était sans nul doute cette ambiance calfeutrée, cynique. Seule, au fond, jaillissant d’un trou creusé au mortier dans le mur, apportait un peu de clarté dans cette longue salle, basée en sous-sol, en dessous de l’atmosphère chaud du désert d’Egypte. Grâce à cette vive lumière blanche, s’échappant avec vivacité de la breche, il était possible d’analyser certains des éléments constituant cette étrange salle, très froide : deux longues étagères, de chaque côté, constituées d’un bois luxueux, supportaient un nombre incalculable de bouteilles de vins, dont certaines devaient valoir une petite fortune.
Attirée, la caméra s’avança rapidement vers le mur du fond, d’où provenait la vive lumière d’une blancheur aveuglante. Sa clarté celeste était si surprenante qu’elle en paraissait presque surnaturelle. Pourtant, à mesure que la caméra se rapprochait de la brèche par laquelle elle passait, la lumière diminuait, retirant son large faisceau de la cave. Ainsi, au moment où la caméra se trouva postée devant le mur meurtri, le faisceau s’était entièrement retiré. Seule une infime parcelle de lumière perdurait à l’intérieur, synonyme que son origine demeurait. La caméra passa alors au travers de la brèche et pénétra dans l’atmosphère frustrée de cette nouvelle salle, baignée de la lumière blanche. Le spectacle le plus effarant mais aussi le plus effroyable qui soit apparut alors aux yeux de l’objectif.
Au fond de la salle, au plafond très bas et à la longueur restreinte apparaissait une sorte de mur constitué dans sa totalité d’une lumière d’une blancheur éclatante, semblable à un mur d’eau lumineuse. De toutes petites vaguelettes parcouraient sa surface, dans son ensemble, faisant refléter sur chacun des autres murs miteux sa lumière Méduséenne. Seule une personne lui faisait face, à moins d’un mètre. Un homme d’environ 1m80, habillé d’un léger pantalon de costume blanc et d’une chemise légère elle aussi blanche, dont les manches étaient retroussées. Son crâne dépourvu de système capillaire luisait intensément face au mur de lumière. Son regard d’un bleu envoutant brillant de clarté exprimait la même folie qu’il avait manifesté, quelques minutes plus tôt. Lex Luthor atteignait ce qui était semblable, à ses yeux, au Saint Graal même. Jamais plus il ne pourrait ressentir une telle sensation d’harmonie, de paix avec ce qui l’entourait.
Derrière lui, quatre corps reposaient sur le sol dur et poussiéreux, chacun d’eux inertes et endoloris. Il s’agissait des quatre autres membres du projet NAMAN, en la personne de Lucas Luthor, Helen Luthor, Ian Nash et Chloé Sullivan. Chacun d’eux étaient tombé inconscient sur le sol, le visage saignant, suite à l’explosion d’une onde de lumière qui, bizarrement, avait laissé Lex indifférent. Pourtant, un des corps bougea légèrement, celui de Chloé. Souffrant le martyr même, elle trouva pourtant la force nécessaire pour relever légèrement la tête et poser ses yeux à demi fermés sur Lex, devant le mur de lumière. Alors, elle put entendre tout comme lui, cette voix résonnante s’adresser à nouveau à Lex :


???: Entre …

Aussi, sentant le rythme de son cœur s’emballer une nouvelle fois, Lex avança vers la lumière et disparut à l’intérieur, sous le regard abasourdi de Chloé. La caméra quitta alors le corps de la jeune journaliste et, s’élevant légèrement dans les airs, fonça à son tour vers la paroi lumineuse. Au moment où elle heurta sa surface fluide, un flash lumineux aveugla l’image, ne laissant place qu’à du blanc immaculé. Bien heureusement, l’image s’assombrit rapidement, laissant apparaître cette nouvelle image.
Quasiment toute lumière éclatante avait disparue, seule demeurait une étrange aura pâle, se dégageant selon toute vraisemblance du plafond, assez bas. Pourtant, aucune lampe n’y était encrée. Lex se trouvait juste devant la caméra, observant les lieux magnifiques qui se dévoilaient sous ses yeux ébahis. Il ne faisait aucun doute que le jeune Luthor venait d’entrer dans un magnifique tombeau. Baigné d’un noir luisant couvrant chacune des parois, il devait certainement faire partie des plus beaux édifices jamais construits depuis la création de la Terre. Ses murs, son plafond et son sol étaient tous recouvert d’un alliage noir très lisse et luisant, semblable à du marbre. La séparation, aux pieds et en haut des murs, séparant les parois du sol et du plafond n’était pas perpendiculaire mais arrondie, ajoutant à l’étrangeté des lieux. Les murs, formant une salle ovale, étaient couverts dans leur totalité d’inscriptions ressemblant à de l’arabe, en or. Forgés en colonne assez large, ils couvraient ces murs obscures, ensorcelant de leur brillance. Plus loin, au centre de la salle, un imposant sarcophage remplissait l’espace quasiment vide de la salle sublime. Haut d’environ 80 centimètres, il était lui aussi ovale, constitué de cet alliage noir luisant et couvert de symboles arabes en or.
Lex, baladant son regard de gauche à droite, n’en croyant pas ses yeux, descendit une volée de marche en marbre noir et marcha sur deux pas, levant la tête au plafond, lui aussi marqué de symboles en or. Au fond de la salle, se trouvait ce qui devait être un immense trône en alliage obscure. Mais l’ombre qui l’entourait empêchait de l’analyser plus en détail. Quand soudain, interrompant Lex dans sa contemplation abasourdie, la voix qui l’avait invité à pénétrer dans la lumière, se fit à nouveau entendre, ses paroles se répandant en échos dans le tombeau.


???: prends place de le trône de ton aïeux…

A cet instant, un puissant faisceau de lumière pâle quitta le plafond, au dessus du trône et l’éclaira, révélant ainsi une assise aussi somptueuse que chacun des éléments constituant ce lieu mythique. Constitué de cet éternel alliage noir luisant, son dossier, haut de deux mètres, était orné d’un liseré en or qui ornait également chaque côtés des immenses accoudoirs. Surplombant légèrement le tombeau, puisque aménagé en haut de trois marches en marbres noirs, le trône n’attendait plus que son héritier, fou de joie.
Ce dernier, ravi, s’empressa de contourner le sarcophage par la droite et, le caressant de sa main gauche, s’approcha finalement de la volée de marches. Il les gravit et, toujours armé de ce sourire diabolique, s’installa dans le trône. Il cala délicatement son dos contre le dossier et, une fois bien installé, posa ses deux mains sur les larges accoudoirs, relevant la tête d’une manière très fière. La voix se fit alors nouvellement entendre :


???: es-tu prêt à recevoir l’esprit ancestral du Grand Sethi, père fondateur de ta lignée ?

Lex, regardant droit devant lui, son regard froid devenu fou allié, attendit de longues secondes avant de répondre, sachant que ce moment resterait parmi ceux les plus beaux de sa vie. Et, enfin, il répliqua, d’une voix enjouée :

Lex : oui, j’y suis prêt …

La caméra se posa alors à cet endroit que fixait désormais Lex, de l’autre côté du tombeau, cet endroit par lequel il était entré. Une double-porte de forme ovale, entourée d’un liseré doré fermait le tombeau, une surface noire, semblable à de l’eau obscure, la constituait. Sa surface, mouvante, était identique à celle qui formait le mur de lumière blanche, à l’extérieur. La caméra leva légèrement son objectif et braqua son plan sur une devanture, servant de porche au dessus de l’entrée. Une statuette en or était accrochée, représentant la silhouette d’un homme, habillé d’une armure et portant un masque en forme de tête de chacal. Son museau doré et ses oreilles dressés sur sa tête étaient la personnification du dieu Seth, dans l’Egypte Ancienne. Ses pupilles allongées étaient incrustées d’une surface noire luisante. Et soudain, une lumière blanche les parcourut avant qu’ils ne reprennent leur teinte obscure habituelle.
Le phénomène qui se produisit ensuite avait été espéré de toute la lignée Sethi depuis que la Prophétie avait été éditée. Deux faisceaux de lumières noires quittèrent les yeux de la tête de chacal et foncèrent, sans obstacles, en direction de Lex, ravi. Il ne fallut ainsi que quelques secondes avant que les rayons ne relient les yeux noirs de la statuette au front de Lex. Mais l’irréel ne s’arrêta pas en si bon chemin. Une étrange fumée noire, quelque peu translucide, quitta les yeux de la statuette et, formant des cercles délicats autour des deux rayons, commencèrent à en parcourir la totalité. Ainsi, bientôt, les deux rayons furent encerclés dans toute leur longueur de nombreux cercles brumeux. L’extrémité de la première boucle heurta le front de Lex et la fumée commença à entrer dans son cortex cérébral, passant inexplicablement au travers de la peau de son front. A cet instant, alors que son sourire se figeait, les yeux de Lex virèrent de leur bleu claire habituel à un noir intarissable, même le blanc qui enveloppaient auparavant ses rétines se teinta d’obscurité. Tandis que le phénomène semblait parti pour durer une éternité, la caméra fonça vers le visage de Lex et, effectuant un flash lumineux éblouissant, quitta la salle du tombeau.
Lorsque l’image redevint visible, la lumière blanche éclatante était réapparu au moment où la salle où se trouvaient les membres inanimés du projet NAMAN étaient toujours allongés. Toujours abasourdie par ce qu’elle venait de voir, Chloé n’avait pas quitté des yeux le mur de lumière depuis le départ de Lex. Elle s’était relevé et le regardait de loin, voyant sa surface oscillante demeurait intacte. Qu’avait-il bien pu arriver à Lex ? Pourquoi n’avait-il pas été touché par l’onde de lumière ? Autant de réponses que Chloé pouvait très bien ne jamais découvrir, si Lex ne revenait pas.
Puis, reprenant conscience avec la réalité, elle se retourna vers le mur, derrière elle, et vit les trois autres corps toujours allongé sur le sol : Helen, sur le ventre, se trouvait à ses pieds. Lucas, se trouvait à sa gauche et Ian, lui, était affalé contre le mur de droite, dans le coin. Il semblait le plus mal en point. Ayant besoin d’aide pour trouver des solution, Chloé s’accroupit auprès d’Helen et entreprit de la retourner. Tout comme le visage de Chloé, dont un filet de sang partait du nez et une bosse bleue apparaissait au milieu de son front, quelque peu dissimulée par la mèche de cheveux blonds qui était plaquée dessus, le visage d’Helen n’était pas très joli à voir, bien que ses blessures semblaient plus superficielles. Une éraflure avait coupé sa joue droite, saignant très légèrement. Un bleu apparaissait sur cette même joue. Chloé commença à lui donner de très légères claques sur le visage, espérant que cela suffise à la réveiller. Et enfin, après maintes efforts, Helen ouvrit les yeux, vivement.


Helen : (surprise) Chloé !!

Chloé s’écarta doucement afin de laisser la possibilité à Helen de s’asseoir, ce qu’elle fit. La femme de Lex semblait reprendre doucement contact avec la réalité. Tout aussi lentement, son esprit se remettait en marche et bientôt elle se remémora ce qui l’avait blessé autant. Elle se rappela de l’onde de lumière blanche quittant la paroi qui l’avait frappé de plein fouet. Après le choc, contre le mur, c’était le trou noir.
Elle balada son regard autour d’elle et vit sur la droite, Lucas, allongé sur le dos et Ian, sur la gauche, bien mal en point. Réalisant qui manquait à l’appel, elle interpela Chloé, inquiète :


Helen : où est Lex ?

Se relevant, Chloé s’écarta légèrement et pointa son regard vers le mur de lumière, derrière elle, faisant signe à Helen de le regarder. La jeune madame Luthor comprit bien vite de quoi il s’agissait. Téméraire comme l’était son mari, il avait dû traverser cette lumière et ne donnait plus de nouvelles. Elle allait répliquer à Chloé, afin d’en savoir plus, quand des bruits de raclements de pierres, sur la droite, attirèrent leur attention. Chloé se retourna et vit la silhouette endolorie de Lucas se rasseoir, se massant le haut du crâne. Il semblait être, de loin, le plus blessé des trois personnes réveillées. Du sang devait couvrir la totalité du haut de son crâne étant donné l’état de ses cheveux collant. Le liquide rouge coulait même sur le haut de son front et avait créé une plaque rouge sur le flanc gauche de son visage.

Lucas : aïe ma tête …

Chloé se rapprocha de lui et l’aida à s’asseoir convenablement. Puis, voyant qu’il pouvait et surtout voulait se relever, Chloé fit signe à Helen de la rejoindre. Toutes deux aidèrent le jeune frère de Lex et à se redresser et, faisant l’état des lieux de son métabolisme, tourna le dos au mur de lumière qu’il ne semblait pas avoir remarquer. Après de longues secondes pendant lesquelles, inquiètes, Chloé et Helen observèrent Lucas, celui-ci finit par leur demander, en fermant son œil gauche endolori :

Lucas : qu’est ce qui s’est passé ?

Une nouvelle fois, Chloé désigna le mur de lumière, dans le dos de Lucas, d’un signe de tête. Surpris, le jeune Luthor se retourna et ne put s’empêcher de rouvrir son œil endolori et d’écarquiller les deux en apercevant tel spectacle. Jamais il n’avait vu quelque chose d’aussi beau, d’aussi pur.
Lentement, il s’en approcha, jusqu’à ne se trouver qu’à moins d’un mètre de la surface lumineuse, tout comme l’avait fait son frère. Alors que les deux filles le rejoignaient, se postant de chaque côté de lui, Lucas amena lentement sa main droite de la surface, à la façon de son aîné. Il était sur le point de faire entrer ses doigts à l’intérieur quand il se ravisa enfin, cessant de tirer les jeunes traits de son visage en une extase identique à celle de Lex. Redevenant sérieux, il se tourna vers Chloé, sur sa gauche.


Lucas : c’est la clé qui produit la lumière ?
Chloé : (regardant le mur) je pense …
Lucas : et Lex est …
Chloé : (finissant sa phrase) … passé au travers, oui.

Lucas n’en revenait pas. Il connaissait la ferveur qu’éprouvait Lex au sujet de tout ce qui avait attrait avec la Prophétie et Sethi mais il ne l’aurait pas cru assez fou pour traverser un mur de lumière qui avait assommé ses acolytes. Chloé poursuivit.

Chloé : mais je pense qu’il n’aurait pas dû …

Lucas reporta instantanément son regard sur une Chloé qui s’attendait à cette réaction. Lucas avait abandonné sa réflexion et sentait son cœur s’emballer. Au timbre de la voix de la jeune Sullivan, rien ne semblait présager du bon pour son frère.

Lucas : (inquiet) pourquoi tu dis ça ?

Elle planta alors son regard noisette, à cet instant très profond, sérieux en tous points, dans celui de Lucas et entreprit de répondre, le plus honnêtement possible. Même si cela devait accentuer l’inquiétude de Lucas, et d’Helen, elle devait leur dévoiler cette vérité que Lex lui avait pourtant sommer de garder pour elle.

Chloé : il y a quelques jours, je suis tomber sur un dossier, dans le bureau de Lex, un dossier nommé « BLOODY LINK » … ce dossier comportait l’analyse des deux clés octogonales, la grise et la rouge. Et pour chacune d’elles, les éléments qui la composaient étaient inconnus, hormis deux éléments … pour la clé grise, c’était les météorites de Smallville. Et pour la rouge, il s’agissait d’un ADN qui n’avait rien de commun avec celui des humains …

Chloé fit alors silence, réalisant ce que cela pouvait signifier : l’énergie que produisait la clé n’avait certainement rien de commun avec la Terre. Elle baissa les yeux, regardant le sol dur et poussiéreux. Puis, reprenant contact avec la réalité, elle reporta son regard sur le mur de lumière blanche.

Chloé : il se pourrait qu’il ne revienne pas …

Lucas prit alors pleinement conscience de ce que cela voulait dire. Lex avait beaucoup changé, il marchait sur les pas de Lionel et n’aurait de cesse d’entreprendre des projets aussi mystérieux que dangereux que lorsqu’il connaîtrait le secret de Clark. Mais il demeurait son frère. Et quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, quoi qu’il devienne il ne permettrait jamais que quiconque ne lui fasse du mal. Aussi, reportant son attention sur le mur de lumière, il serra les poings et s’adressa fermement aux deux jeunes femmes qui l’encadraient.

Lucas : reculez, je vais le ramener !

Toutes deux ahuries par les paroles si ahurissantes de Lucas, Chloé et Helen se tournèrent vers lui, lui adressant un regard qui exprimait ce sentiment exaspéré :

Chloé : quoi ?
Lucas : (haussant le ton) je dois le ramener !!

Il se tourna alors vers Chloé et lui adressa un regard aussi dur et glacial qu’en aurait été capable Lex, s’il avait été dans la même situation. Alors, d’une voix plus calme, il répéta :

Lucas : reculez …

Chloé comprit clairement qu’il ne servirait à rien de discuter. Ce regard, présent dans les rétines bleues de Lucas, était le même qui habitait nuits et jours Lex. Ce regard était un des attraits ancestraux des Luthor, un attrait que Lionel avait transmis à Lucas en lui faisant hériter de son sang diabolique.
Aussi, Chloé recula rapidement bientôt imitée par Helen. Ainsi, toutes deux reculèrent jusqu’à se trouver au centre de la salle, observant Lucas, un peu plus loin. Ce dernier prit une grande respiration puis, après de longues secondes, avança vers la lumière, s’apprêtant à entrer dedans tout comme Lex. Mais, à l’instant où sa tête heurta la lumière blanche, une vive réaction se produisit. L’endroit où la tête de Lucas avait touché le fluide blanc devint rouge vif et une nouvelle onde de lumière, rouge cette fois, quitta la paroi et frappa violemment Lucas de plein fouet. Le choc l’envoya voler à une vitesse folle contre le mur de pierre, contre lequel il s’écrasa puissamment. Il retomba alors bruyamment sur le sol, inconscient, alors que des débris de roche lui tombaient dessus.


Helen : (apeurée) Lucas !!

Toutes deux, se retournant, accoururent vers Lucas et s’accroupirent. La caméra, les suivant, passa par dessus elles et d’un plan basculant, plongea dans le tissu sombre de la chemise en soie noire de Lucas. La transition nous faisait quitter la salle.
Lorsque l’image s’éclaircit enfin, le visage blafard de Lex, incrusté de deux yeux noirs, réapparut. Les deux faisceaux de lumière noir continuaient de relier le front de Lex aux yeux de la statuette alors que le dernier cercle de fumée encrait sa brume dans le cerveau de Lex. Et enfin, alors que les dernières particules de fumée s’échappaient dans le cortex cérébral, les deux faisceaux de lumière noire repartirent en sens inverse. Tandis que Lex, préservant ses yeux d’un noir inaltérable, esquissait un large sourire, la voix résonnante se fit à nouveau entendre :


???: tu as désormais remplie la tâche qui t’était dévolue depuis la nuit des temps …

Mais Lex, se sentant intimement différent, en paix totale avec ce qu’il renfermait, savait qu’il lui restait une chose, une seule à accomplir. Il amena sa main droite vers le centre de l’accoudoir et fit pénétrer l’extrémité de son index dans une gravure en or, représentant un symbole Sethi en cercle. Il glissa son doigt tout autour, regardant le sarcophage, devant lui. A cet instant, un bruit sourd se fit entendre. Attirée, la caméra quitta Lex et, faisant volte-face, s’éleva dans les airs, au dessus du sarcophage. Au centre de son couvercle bombé, en marbre noir luisant, étaient inscrits cinq symboles Sethi en or, en colonne. Celui du dessus et celui du dessous coulissaient sous les symboles, juste au dessus et se dissimulaient ainsi. Puis, ces deux symboles coulissèrent à leur tour et passèrent sous le symboles du centre, représentant un cercle marqué d’une ligne horizontale. Alors, la ligne horizontale se courba et se superposa à la courbe dorée du cercle. A cet instant, d’une manière des plus effarantes, le cercle dorée s’élargit à une vitesse hallucinante et prit bientôt toute la circoncision du sarcophage oval, révélant ce qu’il contenait.
Il s’agissait d’une armure à la taille d’un grand homme, couverte d’or et d’une peinture d’un bleu dur qui n’avait pas pâli avec le temps. Les abdominaux et les pectoraux étaient représentés de façon avantageuses et l’armure, renfermant le corps mythique de Seth, avait les bras croisés sur le haut du torse. Une petite pyramide en or était étreint par ses deux mains en or. Sa tête représentée par la tête d’un chacal était elle aussi couverte d’or et ses yeux allongés étaient de couleur bleue, ainsi que l’intérieur de ses oreilles en pointe et que le bout de son long museau. Alors, l’extrémité de la pyramide en or, tenu par les mains de Seth, changea, étrangement. La peinture dorée sembla couler du sommet et descendre vers la base de ses faces, révélant une autre pyramide, en dessus, couverte d’une lumière dorée éclatante, éblouissante même. Ladite pyramide lumineuse s’éleva alors dans les airs, s’extirpant de l’étreinte puissante du Dieu, s’arrêtant au dessus du sarcophage.
Radieux, Lex se leva enfin de son trône et, observant la lueur avec satisfaction, descendit les trois marches de marbre et vint se poster à gauche du sarcophage. Aussi, il amena sa main droite à hauteur de sa taille et l’ouvrit. Obéissant à sa volonté, la lueur vint s’y déposer délicatement, perdant de son éclat. Bientôt, Lex put voir que la lumière avait complètement disparue et qu’elle permettait ainsi de révéler une pierre pyramidale à trois face, faite d’un verre translucide magnifique. L’une de ses face étaient gravée d’une suite de symboles Kryptoniens représentant le « DIAPHANE ». Tandis que Lex élargissait encore un peu plus son sourire, ses yeux reprirent lentement leur teinte bleutée habituelle et la froideur qui les incarnaient.


???: tu as dans ta main le cristal du DIAPHANE, revenant de droit au gardien que tu protèges avec tant de réussite …

La caméra fit alors un gros plan sur le visage radieux de Lex. Jamais il n’avait paru aussi heureux, aussi plein de vie. Puis, elle bascula vers le cristal, dans la main de Lex. Un plan ultra-rapide plongea vers sa surface nacrée et un flash illumina l’image.
Quand l’image redevint aussi claire que l’on était en droit de l’espérer, le plan montra Lucas, inerte sur le sol, en premier plan. Accroupies, affolées, devant lui, se trouvaient Helen et Chloé qui tentaient à grand peine de le réveiller. Elles étaient presque en gros plan. Et derrière, en arrière plan, le mur de lumière blanche apparaissait, source de toutes ces blessures.
Alors, venu de nulle part, Lex traversa de nouveau le mur de lumière, souriant, serrant le cristal du DIAPHANE dans sa main droite. Lorsqu’il fut entièrement sorti de la lumière et arrêté devant, Lex tendit sa main gauche, libre, devant lui. A cet instant, la lumière blanche quitta l’extrémité de la paroi, dans le dos de Lex, à ses extrémités. Et, rapidement, formant un cercle de lumière, elle revint vers le centre faisant ainsi réapparaître après son passage, le mur de pierre sale et ses inscriptions mêlant langage Sethi et hiéroglyphes Egyptiens. Bientôt, le triangle réapparut lui aussi ainsi que la clé rouge, en son centre, au moment où la lueur dorée réapparaissait. La clé s’extirpa de l’encoche et, alors que la roche reprenait place dans la serrure, vint se poser délicatement dans la main gauche de Lex.
Surprise par ce soudain manque de lumière, Chloé se retourna et avec stupeur, aperçut Lex, radieux.


Chloé : Lex !!

Helen, elle, n’avait pas remarqué le manque de lumière, trop occupée à surveiller Lucas. Mais quand elle entendit Chloé s’exclamer ainsi, elle se retourna à son tour. Elle ne se rappelait pas de l’avoir jamais vu sourire ainsi. Ce sourire, malsain, semblait tout droit venir de son père, comme si ce qui venait de se passer avait rayé de la carte le Lex qu’elle aimait.
Il s’avança vers elles, de ce même comportement étrange.


Helen : Lex, il faut que tu aides Lucas ! Il est vraiment mal en point …

Lex s’arrêta à côté d’elles et jeta un regard à Lucas, qui semblait sur le point de mourir. Puis, après quelques secondes, il s’avança vers la brèche, dans le mur.

Lex : il va bien. Laisses-le respirer …

Et Lex disparut au travers du mur, sous les regards abasourdis de Chloé et Helen. Mais le plus surprenant fut ce qui suivit. Toussant très fortement, Lucas se réveilla en sursaut. Lex avait dit vrai.

[GENERIQUE]

 

LuthorMall – Metropolis – Le lendemain – 9h02

Filmant la cité urbaine la plus vaste alentour, la caméra voyait les hautes tours de verre et d’acier brandir vers les cieux leur sommet imprenable, caressant de leur extrémité les fins cumulus blancs qui sillonnaient un ciel d’un bleu superbe, en concordance totale avec le cercle solaire qui illuminait de toute sa clarté les rues de Metropolis. Pourtant, au milieu de toutes ces tours miroitées, formant le centre des affaires de la ville, surplombant le reste de la cité, une structure, relativement différente des autres attirait l’œil, vers le centre. Beaucoup plus basse, elle avait quelque chose d’attractif plus qu’évident, quand on caressait sa surface inhabituelle de la rétine oculaire. Il s’agissait du LuthorMall, le centre commercial le plus connu de tous les Etats-Unis, pour cette structure extérieure si atypique.
La première comparaison qui pouvait y être faite était celle d’une grande vague. En effet, son toit en pente, d’un métal gris des plus lisse, semblable à la surface des mers, était supporté par une baie vitrée, de la même couleur claire, verticale, au bord de l’entrée du centre commercial. Dans toute sa longueur, la baie vitrée était transparente, bien que les intenses rayons matinaux du soleil s’y reflétaient sans mégarde, comme s’ils étaient attirés par cette surface. Quelques-uns des architectes les plus réputés au monde s’adoraient à comparer la structure de ce batiment au stade de football coréen de Seogwipo. Semblable à une puissante vague de matériaux qui déferlerait sur le parking basé devant, le LuthorMall creusait l’attention entre toutes ces tours vertigineuses comme pour montrer que la LuthorCorp n’avait pas pour habitude de faire tout comme tout le monde. Le toit en pente laissait délicatement les rayons solaires glisser le long de sa paroi lisse, jusqu’à descendre derrière, sur une partie du parking installé sur ce goudron, dont une certaine partie était toujours à l’ombre. Quelques rares voitures y étaient garées, ici et là, ainsi que sur l’autre parking, beaucoup plus vaste, édifié devant la structure.
La caméra, survolant la surface en pente servant de toit au centre commercial, bascula en une fraction de seconde et, en un plan accéléré assez étonnant, fonça vers lui, de façon à le heurter très prochainement. Et, au moment où cela se produisit, un flash lumineux d’une rare blancheur aveugla l’image. Peu après, l’image s’assombrit de nouveau, laissant apparaître la nouvelle image que filmait la caméra, dans un plan mobile, survolant une foule intense, au bas, à tout juste quelques centimètres au dessus des têtes. La caméra venait de pénétrer dans la galerie marchande, elle aussi atypique, intégrée à l’intérieur du centre commercial. En effet, laissant la lumière du soleil passer par la baie vitrée, contre le mur de gauche, la galerie entourait le reste du centre, formant les contours du LuthorMall. Une foule impressionnante s’y mêlait, marchant en double-sens et composée d’une population éclectique des plus significatives. Un brouhaha assourdissant s’élevait jusque dans les hauteurs du plafond, mêlant voix agitées, pas effrénés et musique d’ambiance enthousiasmante. Mais la caméra ne se préoccupa que de la foule, juste en dessous d’elle.
Dans un nouveau plan délicat, plus rapide que les pas de la foule, la caméra rasait une à une chaque tête dépassant de la foule, sans se préoccuper de l’une d’elle en particulier. Il continua ainsi son travelling régulier, au dessous de la foule, ne prêtant attention ni aux conversations échangées, ni aux gestes effectués. Jusqu’au moment où, sous elle, une faille dans la foule apparut, sur trois bons mètres. Etrangement, personne ne bouchait ce trou, comme si les places y étaient étrangers. Cependant, personne n’y prêtait attention, comme si cela était une tradition qui ne demandait pas à être modifiée. La caméra braqua alors son plan sur le dos massif d’un homme, un peu plus loin, fermant la faille. Marchant d’un pas assuré, de son allure rapide, il semblait savoir exactement où il allait, qui il était et ce qu’il avait à faire. Son dos musclé couvert d’un maillot de corps noir et sa chevelure noire épaisse avaient quelques chose de familier. Soudain, tandis que ce plan demeurait, malgré l’allure effrénée à laquelle il matchait, le jeune homme sentit une vibration contre sa jambe droite, dans la poche de son jean. Il baissa la tête et plongea sa main dans cette poche, avant d’en ressortir un téléphone portable dernier cri, de couleur grise.
En un plan accéléré, la caméra abandonna son travelling et vint se placer au dessus du portable, tenu par la main droite du jeune homme. Une led s’illuminait de orange alors que sur le cadran vertical, encré dans la coque, le nom « Unknown Numero » apparaissait. Cependant, intrigué par cela, l’homme ouvrit à l’aide de son pouce le clavier et porta le téléphone à son visage. La caméra suivit son geste et vit sa main amener le portable contre son visage carré, bienveillant, alors qu’il prenait la communication. Le regard bleu clair, froid, de Clark semblait avoir encore un peu plus changé, depuis qu’il vivait à Metropolis. Il prit la communication d’une voix calme, bien que tendue :


Clark : oui ?

La voix de celui qui l’appelait ne tarda pas à se faire entendre. Il s’agissait d’une voix d’homme, âgé visiblement d’une cinquantaine d’années environ. Mais, peut être était-ce à cause du bruit environnant ou d’un tout autre facteur, Clark ne sut mettre un nom sur sa voix. Ce qui ne semblait pas être le cas de son interlocuteur.

???: Clark Kent ?

Clark hésita un moment. Avec tous ces évènements tragiques qui s’étaient produits autour de lui, ces derniers temps, à cause de ses pouvoirs, de sa destinée et de son passé mafieux à Metropolis, Clark rechignait de plus en plus à s’engager avec des personnes qu’il ne connaissait pas. Parfois, l’envie lui venait même de reprendre le pseudonyme de « Kal », qu’il avait utilisé à Metropolis deux ans plus tôt. Mais ce nom évoquait tellement de mauvais souvenirs qu’il hésitait encore. Peut être quand il serait prêt …
Il finit par répliquer, d’une voix dont la froideur s’était encore amplifiée :


Clark : oui ?

Le soulagement se fit entendre, dans la réponse de cet interlocuteur inconnu.

???: enfin je te trouves !

Visiblement, il était grandement soulagé de réussir à entrer en contact avec Clark. Il avait visiblement dû faire des efforts considérables pour obtenir son numéro de téléphone portable. Ils devaient donc se connaître, pensa Clark. Pour sa voix n’évoquait rien en lui. L’homme poursuivit sur cette lancée alors que Clark continuait d’arpenter l’allée. Un peu plus loin, à plusieurs mètres, le mur de droite était creusé par une allée s’enfonçant vers le centre du LuthorMall. Clark leva la tête et vit une pancarte indiquant « Access to elevators ».

???: tu es quelqu’un de vraiment difficile à joindre, tu sais ? … j’ai dû appeler pas moins de dix personnes avant de tomber sur toi !

Clark se déporta rapidement sur la droite, ne quittant pas la pancarte des yeux, bousculant quelques clients désabusés. Enfin, Clark lui répliqua, en le coupant, d’une voix encore plus glaciale qu’auparavant. Il commençait réellement à s’énerver, intérieurement.

Clark : qui êtes-vous ?

Clark voyait lentement l’allée sur la droite se rapprocher alors que l’homme, dans le téléphone, s’interrompit. Cela ne semblait pas avoir coupé plus que cela son enthousiasme.

???: oh oui, excuses-moi ! … (souriant) c’est Henry Small, le père de Lana !

Au moment où Clark tourna sur la droite, pénétrant dans l’allée, il sentit son cœur faire un léger bond, à l’entente de ce nom. Il fit le lien entre la voix et le nom et se rendit compte que ce devait réellement être le cas. Il marcha sur quelques pas dans l’allée, très calme, à côté de la galerie marchande et finit par répliquer à Henry, d’une voix beaucoup plus enjouée :

Clark : Henry ?! … Alors ça c’est une surprise !!

Clark entendit deux de ses pas se répercuter dans l’étroit espace du couloir, assez éclairé, avant que la voix d’Henry se fasse à nouveau entendre. Un peu plus loin, sur la droite, au fond de ce couloir, l’attendaient deux ascenseurs, tous deux fermés. Devant le premier, un homme habillé d’un jean délavé et d’un sweat à capuche noir, dont cette capuche recouvrait son visage, attendait, que les portes s’ouvrent, visiblement. Le deuxième, un peu plus loin, semblait libre. Passant derrière l’homme au visage impossible à identifier, Clark entendit les paroles de Henry :

Henry : (désolé) oui, il est vrai que je n’ai pas donné beaucoup de nouvelles …

Clark s’arrêta face à l’ascenseur et appuya sur le bouton transparent, sur le mur, entre les deux ascenseurs. Il s’illumina de bleu sous la pression de Clark, effectuant ainsi l’appel de l’ascenseur. L’homme encapuchonné attendait toujours le sien. Intéressé, Clark tourna la tête sur sa droite et l’observa un court moment. Les mains dans les poches, le regard fixe, cet homme n’avait rien de très fréquentable. Les portes de l’ascenseur de l’homme s’ouvrirent en même temps que celles de Clark.

Henry : malheureusement, ce n’est pas un simple appel de courtoisie …

L’homme encapuchonné, sur la droite de Clark, tourna à son tour la tête vers Clark et le regarda un long moment, n’entrant pas dans son ascenseur. Clark n’y porta aucune attention et entra dans sa cage d’ascenseur. L’homme encapuchonné resta un long instant à regarder l’ascenseur de Clark puis, lentement, entra dans le sien.
La caméra entra dans l’ascenseur de Clark au moment où les portes se refermaient. Le visage soudain inquiet, Clark avait appuyé sur le bouton « Parking Lot » et l’ascenseur amorçait une lente descente vers le parking souterrain. Il répliqua à Henry de cette voix soucieuse :


Clark : qu’est ce qui se passe ?

Henry était vraiment touché par le timbre de voix qu’avait utilisé Clark. Comme toujours, il se souciait des problèmes des autres et allait certainement essayé de trouver une solution, comme il le faisait si souvent. Henry sourit en pensant à cela, c’était la raison de son appel.
Aussi, après quelques secondes de silence, il répliqua tout simplement :


Henry : c’est Lana … elle a disparue depuis un mois …

Clark resta bouche bée, devant une telle révélation. Sous le coup du choc, il ne fit pas la connexion avec la réalité, ce qui lui prit un certain temps. Pourtant, alors que Henry poursuivait, il ne put s’en empêcher.

Henry : je sais, j’aurais dû te le dire il y a longtemps, mais …
Clark : non, c’est impossible !

Henry s’était attendu à cette réponse, Lana et Clark étaient tellement liés l’un à l’autre qu’il avait longuement hésité avant de le lui annoncé. Il avait attendu le dernier moment. Mais cette fois, il devait le faire.

Henry : je comprends que ce doit être difficile, mais tu dois l’accep-…
Clark : (l’interrompant de nouveau) non, vous ne comprenez pas. C’est impossible parce que je l’ai vu il y a deux jours …

Henry marqua à son tour un temps d’arrêt, ne comprenant pas sur le moment les paroles dites par Clark. Puis, lentement, il répliqua :

Henry : où ? A Smallville ?
Clark : non, à Metropolis ... c’est là que nous vivons maintenant …

L’ascenseur s’immobilisa dans un atterrissage des plus délicats et, dans un bip sonore assez aigu, les portes coulissèrent, ouvrant l’accès à un vaste parking souterrain aménagé sous le LuthorMall. Face à Clark, une longue allée au sol en béton s’étendait, de nombreuses voitures y étant garées de chaque côté, entre de nombreux pilonnes en pierre grise. Par instant, des démarrages en trombe et des crissements de pneus se faisaient entendre. Clark s’engagea dans l’allée, en traversant une, perpendiculaire à la suivante. Il dévia la tête sur la droite et vit sur le premier pilonne, une pancarte indiquer « G8 ». Il s’agissait du nom de la partie du parking. Clark se déporta sur la droite, longeant les voitures garées, tandis que Henry lui répliquait.

Henry : vous vivez ensemble ?

Clark fit une terrible grimace, silencieuse, à l’entente de ses paroles. Il aurait aimé que ce soit le cas, que ce soit si simple. Malheureusement, c’était loin d’être le cas, bien trop loin même. Aussi, après quelques secondes, il répliqua :

Clark : non … je vis seul et Lana … Lana vit chez Kelhan …

Clark tourna alors sur la droite, passant sur une passerelle basée entre deux pilonnes et menant à une nouvelle allée, parallèle à la première. Il passa sous l’arche et avança en largeur sur l’allée. Devant lui, un peu plus loin, une nouvelle passerelle l’attendait. Le pilonne de droite supportait une pancarte indiquant « H8 ». Marchant vers elle, Clark tourna la tête sur la droite. Avec étonnement, il vit la silhouette de l’homme encapuchonné, le visage baigné par l’ombre, avancer vers lui, le fixant ardemment. Clark n’y prêta qu’une attention minime et passa sous la deuxième arche, alors que Henry lui demandait :

Henry : (surpris) Kelhan ? Qui est-ce ?
Clark : c’est le petit ami de Lana … elle l’a rencontré en France

Clark trouvait très étrange que Henry n’ait jamais entendu parlé de Kelhan. Lana ne lui en avait-elle jamais parlé ?
Le visage crispé par la tension, traversant une allée portant la marque « I8 », Clark se retourna, serrant le téléphone contre son visage. L’homme encapuchonné avait lui aussi tourné sous l’arche et suivait Clark. Se retournant droit devant lui, Clark passa sous une nouvelle arche, accélérant le pas. La communication allait devoir être abrégée plus tôt que prévu, Clark devait savoir qui était l’homme qui le suivait.


Henry : Lana et moi sommes en froid … mais bon, le principal, c’est qu’elle aille bien !

Clark passa sous cette nouvelle passerelle en se retournant. L’homme encapuchonné, à 5 mètres derrière lui, continuait de calquer sa marche sur la sienne, son regard braqué sur le dos de Clark.

Clark : (regardant l’homme encapuchonné) Henry, je ne veux pas être impoli mais (il se retourna droit devant lui) je vais devoir raccrocher !

Clark accéléra l’allure et traversa une nouvelle allée dans laquelle étaient garées nombre de véhicules appartenant aux clients du centre commercial.

Henry : oui, je comprends … merci Clark et à bientôt …
Clark : oui, à bientôt !

Et d’un geste vif, alors qu’il s’approchait d’une nouvelle passerelle, Clark referma le clapet de son téléphone et le rangea dans une des poches avant de son jean. Il se retourna une dernière fois vers l’homme encapuchonné. Puis, arrivant dans une nouvelle allée, Clark tourna sur la gauche et, une fois hors de portée de la vue de l’homme, disparut en un éclaire, allant se cacher entre deux voitures, sur la gauche, se mettant accroupi. Il attendit ainsi, que l’homme daigne se montrer.
Enfin, après quelques secondes, l’homme apparut, sortant de la passerelle. Ayant vu Clark tourner sur la gauche, il en fit de même et, d’un pas soudainement ralenti, s’approcha de l’endroit où était caché Clark. Malgré cela, le jeune Kent ne parvenait pas à voir son visage. Mais il ne faisait aucun doute que l’homme encapuchonné poursuivait Clark ; il baladait son regard de gauche à droite, balayant les voitures une à une. A cet instant, alors que les éléments tragiques qu’un intérêt semblable à celui avaient provoqués autour de Clark lui revenait en mémoire, le jeune Kent laissa la fureur s’emparer de ses membres et la noirceur habitant son cœur prendre le dessus sur la sagesse. [SLOWING DOWN – Créant des sillons de vitesse de chaque côté de son corps, Clark se redressa entre les deux voitures et se précipita vers l’homme en courant. Des sillons brouillés, assez sombres en raison de la couleur des vêtements de Clark, apparurent dans son sillage. Arrivé à hauteur de l’homme encapuchonné qui ne l’avait pas vu surgir, Clark le saisit par le col de son sweat et, le soulevant de terre, l’amena vers le véhicule, dans son dos. Toujours entouré de ces sillons de vitesse, Clark le plaqua violemment sur le capot, le cabossant et le tint allongé férocement contre le métal – FIN] Le geste de Clark avait suffisamment fait bouger la capuche de l’homme pour découvrir son visage grêle, squelettique, encré de deux yeux noirs machiavéliques. En croisant ce regard dénué de tout bonheur, Clark laissa la fureur quitter son visage et la peur, l’effroi s’y insinuer rapidement. N’en croyant pas ses yeux, d’un pas titubant, les yeux écarquillés, Clark le relâcha et commença à reculer, lentement.


Clark : vous !

Tandis que le jeune Kent continuait de reculer, l’homme, armé d’un sourire diabolique, commença à se relever, lentement.

Clark : c’est impossible, vous êtes mort !!

L’homme était complètement redressé. Le capuchon avait finalement glissé le long de son crâne aux cheveux coupés très courts et reposait sur sa nuque. Ce visage, celui du diable en personne, Clark avait espéré ne plus jamais le revoir. Lorsqu’il entendit le son de sa voix, terriblement heureux, il comprit pourtant que ses pires cauchemars reprenaient forme.

???: oui mais je reviens du royaume de Lucifer pour m’entretenir avec toi, Kal-El …

 

Dôme Artificiel – Hors de l’Espace – Hors du temps

Dès le moment où cette lumière d’une blancheur éblouissante avait jailli de l’encoche octogonale, dans la paroi rocheuse des grottes Kawache, Jonathan avait senti une douceur telle qu’il n’en avait jamais connue lui caresser la peau, sur la totalité de son corps, extirpant dans le même temps le sentiment de déchirure ultime qui disséminait chacune des particules de son corps. Désormais, seuls la paix, l’harmonie et la douceur circulaient dans ses veines, un sentiment de pleinitude totale que personne au monde n’avait encore ressentie. Plus aucun sentiment négatif, provoquant une quelconque souffrance, avait disparue, comme aspiré par cette lumière céleste. Son aura devait avoir agi comme un sérum des plus efficaces, qui aurait pu éradiquer le moindre malheur, la moindre douleur ainsi que le moindre souci. Jonathan, malgré ce qui l’avait amené dans les grottes Kawache, à savoir la perte de son fils arraché par les bras tyranniques de Jor-El, ne ressentait plus aucune colère, aucune haine. Il se sentait heureux.
Jonathan ouvrit enfin, lentement, les yeux. Dès cet instant, une lumière blanche tout aussi éblouissante que la première lui jaillit à la vue, en devenant floue telle sa puissance était intense. Il plissa les yeux, essayant à grands efforts de les garder ouverts. Lorsque sa vue se fut enfin habituée à la puissance de cette lumière, il put se rendre compte d’un fait qui changerait tout et qui, néanmoins, expliquait clairement le changement d’émotions qu’il avait ressenti : il ne se trouvait plus dans les grottes poussiéreuses de Smallville. Ce lieu était certainement celui qui pouvait s’en éloigner le plus possible. La roche, les peintures rupestres, la poussière et la vaine pénombre avaient disparus, laissant place à un blanc qui semblait constituer la structure à la fois simpliste et moderne de cet endroit dans lequel venait d’atterrir Jonathan. Levant la tête et tournant en cercle sur lui même, Jonathan balaya du regard les lieux.
Il semblait s’agir d’une immense pyramide constituée de la seule salle dans laquelle se trouvait Jonathan. Son sommet s’élevait à perte de vue à une bonne trentaine de mètres au dessus de sa tête. Ses quatre parois, obliques, étaient constituée d’un alliage d’une blancheur éclatante semblable à de la neige, bien que sa platitude indiquait qu’elle ne faisait qu’y ressembler. Le sol dur et plat, sur lequel les pieds de Jonathan se reposaient, était lui aussi constitué de cet alliage surprenant. Le calme plat, allié à cette structure sans égal, provoquait une sérénité étonnante en Jonathan. Ce dernier s’immobilisa, baissant les yeux vers son propre corps. Il se rendit alors compte d’un autre changement notable.
Il n’était plus vêtu d’une de ses vieilles chemises à carreau et d’un jean usé. Non. Par un phénomène qu’il n’aurait su expliquer, Jonathan était désormais habillé d’une chemise légère d’un noir intarrissable et d’un jean légèrement délavé. Malheureusement pour lui, cette révélation n’était pas la pire. Lorsqu’il posa ses yeux sur ses mains musclées, il se rendit compte que l’élément qui l’avait amené ici et qui était sa seule chance d’en revenir avait disparue : la clé ovale. Sentant pour la première fois depuis son arrivée en ces lieux son rythme cardiaque accélérer nettement, Jonathan entreprit de fouille la poche, sur la partie supérieur de sa chemise. N’y trouvant pas la clé, il se mit à chercher dans les poches avant de son jean, puis dans celles de derrière …


???: est-ce ceci que vous cherchez, Jonathan Kent ?

Jonathan sentit à nouveau le rythme de son cœur augmenter ostensiblement où cette voix d’homme, veloutée et douce, s’éleva de derrière lui. En un geste brusque, Jonathan se retourna et porta son regard droit devant lui, vers cette personne nouvellement apparue dans ces lieux. Il était très étrangement vêtu, d’un long vêtement aux tissus blancs assez lâches, d’une pureté égale à la constitution des lieux. Il pouvait presque se fondre dans le décor. Cette toge, couvrant tout son corps, comportait également un large capuchon posé sur sa tête, ainsi méconnaissable. Les plis du large capuchon tombaient sur des épaules quelque peu massive. Sur le tissu, au niveau du haut du torse de cet homme était inscrit un symbole bleu pale, Kryptonien, formé d’un 8 ovale, dessiné magnifiquement et d’un point, inscrit sur la gauche du numéro. L’homme, les bras croisés dans ses manches larges, blanches, dont l’une supportait une suite de symboles Kryptoniens bleus pâles, brodés dessus, semblait faire flotter la clé ovale à mi-hauteur devant lui, par la simple puissance de sa pensée. Jonathan n’en revenait. Qui que pouvait être cet homme, il ne devait pas avoir grand chose de commun avec un mortel.
Reprenant son naturel, Jonathan se retourna complètement. Il prit alors un air méfiant, renfrogné, avant de questionner enfin cet homme sur son identité.


Jonathan : qui êtes-vous ?

Jonathan essayait, malgré la distance, de reconnaître le visage de l’homme, caché par la pénombre de son capuchon. Mais cela semblait peine perdue. Cependant, il était sûr d’avoir déjà entendu cette voix qui évoquait en lui, une chaleur incommensurable. L’homme répliqua de cette même voix plane, plane :

???: le seul capable de répondre à vos questions …

Qui qu’il ait pu être, Jonathan n’en avait que faire. Il était venu ici dans un but précis : celui de faire revenir son fils parmi les siens. Et une seule personne possédait ce pouvoir : Jor-El.
Aussi, exprimant cette colère enfouie depuis quelques minutes, Jonathan reprit :


Jonathan : je veux parler à Jor-El !!

La réponse de son interlocuteur se fit quelques peu attendre, dans ce silence total. Mais Jonathan ne sentit pas la colère augmenter, tant l’attitude de cet homme en toge amènerait de nouvelles révélations.
En effet, l’homme en toge décroisa ses bras, révélant des mains blanches. Il les porta aux bords de sa capuche et la retira de sa tête, révélant ainsi un visage blanc aux traits les plus bienveillants qu’on puisse imaginer. Il avait des cheveux gris, presque blancs, coupés très courts qui, allié à son regard d’une bleuté pure, augmentaient le sentiment de paix qui habitait son visage. Tout en lui concordaient avec le lieu dans lequel il évoluait. Y compris son sourire calme, apaisant. Jamais Jonathan n’avait rencontré une personne qui dégageait une telle paix, une telle confiance. L’homme fit à nouveau entendre le son de sa voix.


???: (répondant à Jonathan) vous l’avez devant vous …

Jonathan crut que son cœur allait arrêter de battre tant cette révélation était en contradiction avec l’homme qu’il avait devant lui. S’il n’avait pas connu Jor-El avant de connaître cet homme, il aurait pu lui confier n’importe quoi, sans se poser la moindre question. Son simple sourire, allié au regard pure, suffisait à donner confiance. Il semblait être le samaritain à l’état pure. Pourtant, Jonathan ne savait que trop qu’il n’avait jamais été un homme de bonté. De tous temps, Jor-El avait toujours essayé de le tromper, d’amener Clark, malgré ses réticences, vers le chemin de la tyrannie. Comment pouvaient-ils n’être qu’une seule et même personne ? Jor-El était la personnification du mal absolu, Jonathan le savait. Cependant, en croisant ce regard pur qu’il connaissait tant, il en venait à en douter.

Jonathan : vous mentez !

Aussi surprenant que cela puisse paraître, Jor-El, recroisant les bras dans ses manches, esquissa un léger sourire, comme amusé par la remarque de son homologue. Il reprit d’une voix pourtant plus sérieuse qu’auparavant.

Jor-El : votre esprit exprime pourtant le contraire …

Jonathan resta stupéfié. Si Jor-El avait le don de pouvoir lire son esprit, il serait bien compliqué de cacher ses sentiments et ses envies. Baissant un instant les yeux, Jonathan se rendit compte que finalement, Jor-El avait raison. Il était difficile de l’admettre, pour ce que cela entrainait mais au fond, c’était presque une suite logique aux évènements qui s’étaient produits ces dernières années.

Jor-El : … mais vous avez peine à le croire, ce qui est surprenant quand on connaît les capacités hors normes de Kal-El …

Jonathan releva les yeux vers Jor-El, assez surpris. Jor-El parvenait à lire les sentiments de Jonathan comme s’il les avait lus dans un livre ouvert. Visiblement, la lecture de pensées était un art dans lequel il excellait. Jonathan décida donc, à partir de ce moment, de jouer cartes sur tables car de toutes manières, agir en contre-sens, ne parviendrait qu’à le ralentir.

Jonathan : mais c’est impossible, vous êtes mort !

Jor-El esquissa un nouveau rictus, visiblement l’effarement de Jonathan l’amusait. Mais il comprenait parfaitement cet étonnement. Après tout, lui qui avait étudié le peuple terrien, savait pertinemment que les humains ne savaient pas ce qui les attendaient après la mort, contrairement au peuple de Krypton.

Jor-El : (calmement) oui … mais mon esprit a survécu (il leva la tête vers le plafond en pointe) ici !

Le voyant faire, de ce geste lent, Jonathan en fit autant et regarda à son tour l’armature blanche de la pyramide, à plusieurs mètres. Tandis que le silence et l’harmonie reprenaient leur place, Jonathan se posa à nouveau cette question qui avait la première embrumée son cerveau, à son arrivée ici : « Quel est ce lieu ? »
Lorsque Jor-El baissa la tête et que Jonathan en fit autant, ce dernier lui posa donc la question qui lui brûlait les lèvres, désormais.


Jonathan : où sommes-nous ?
Jor-El : (souriant) ce lieu est un espace de rencontre, dénué de notions de temps et de lieux … il a été créé par mon peuple lors de la Prophètisation de l’arrivée de Kal-El sur la troisième planète … il n’existe que pour servir sa destinée …

Jonathan n’était pas certain d’avoir compris tout ce que venait de dire le père biologique de Clark. Mais il en avait tiré le principal. Les personnes qui étaient liés à la destinée de Kal-El pouvaient y accéder et elles seules.
Un long instant d’intense silence s’installa alors, pendant lequel les deux pères de Clark s’observèrent mutuellement. Jor-El souriait toujours légèrement, de cette attitude apaisante, harmonieuse, tandis que Jonathan comprenait que ce Jor-El était très éloigné de celui qu’il avait toujours connu. La paix qui l’enveloppait en était même malsaine, Jonathan avait bien du mal à lui faire confiance. Peut être était-ce dû aux nombreux tours qu’il lui avait joué, pour écarter Clark de sa famille.
Aussi, de cette voix méfiante, Jonathan répliqua :


Jonathan : vous avez l’air … différent !

Jor-El esquissa un nouveau rictus bienveillant, baissant un instant son regard bleu dans une attitude gênée. Jonathan fut frappé de constater à quel point cette attitude était identique à celle de Clark, quand on lui faisait remarquer quelque chose de logique. La ressemblance était plus que frappante. Aussi, lorsque le père biologique de Clark releva les yeux, Jonathan se rappela où il avait vu ce regard pur, touchant. Il était la parfaite réplique de celui de son fils.

Jor-El : il est vrai que ma volonté, incrustée dans les grottes indiennes, est intransigeante … ce qui a pu vous laisser croire que j’étais un tyran. Mais croyez-moi, je n’ai jamais voulu d’un tel avenir pour mon fils, quelque soit la façon dont ce peuple le voit. Je ne vous aurez pas choisi vous, Jonathan, si j’avais voulu une telle chose …

Mais quelque chose ne collait, Jonathan s’en rendait compte.

Jonathan : mais pourquoi l’avoir écarté de ma famille alors ?
Jor-El : (haussant le ton) parce que vous n’avez pas respecter les termes de notre pacte, Jonathan … (reprenant le ton calme caractérisant sa personne) Kal-El devait quitter la cité le moment venu !

Jonathan sentit alors une fureur restée enfouie au plus profond de lui même refaire subitement surface.

Jonathan : (furieux) il n’est pas encore prêt !
Jor-El : (impassible) si il l’est ! … depuis son retour de New York. Mais malgré mes appels, vous refusiez de l’accepter. Votre amour vous pousser à le garder prêt de vous, ce que je comprends …

Jor-El fit silence. Jonathan, qui avait un long instant baissé les yeux, obligé d’accepter la stricte vérité, releva subitement les yeux vers Jor-El, n’en croyant pas ses yeux. Jor-El, celui qui tyrannisait son fils, faisait preuve de compréhension.

Jor-El : j’ai été obligé d’envoyer mon fils à des années lumière de moi en sachant pertinemment que je ne le reverrais jamais … je comprends mieux que quiconque ce que vous ressentez !

Jonathan se rendit compte d’une chose, qui changeait peut être tout, de sa vision des choses jusqu’à ce qui attendait son fils. Ce que Martha et lui avaient pris pour une volonté indomptable pour faire devenir leur fils un tyran n’était autre qu’une peur de le voir devenir quelqu’un qui pourrait devenir un monstre. En fait, Jonathan s’était trompé sur toute la ligne. Jor-El n’était qu’un père qui était prêt à tout pour garder son fils en vie et le former au mieux pour sa vie future. Ses méthodes étaient peut être peu orthodoxes, ce qui normales puisqu’elles appartenaient à un tout autre monde mais elles avaient le même but que celle de la famille Kent : protéger au mieux leur fils.
Jonathan baissa la tête, réalisant cela. Jor-El esquissa un timide sourire, exprimant son sentiment rassurant au vu du fait que Jonathan l’avait finalement compris. Peut être pourraient-ils enfin agir ensemble et éviter le pire pour Clark.
Jonathan releva alors la tête, la peur au ventre.


Jonathan : mais il n’est pas trop tard, il vient de partir ?

La peur tirant les traits creusés de Jonathan, ainsi que son regard brillant de frayeur, provoquèrent en Jor-El un sentiment agréable qu’il avait eu peur de ne jamais ressentir, en raison de la faculté de Jonathan d’ignorer ses menaces. Mais finalement, une discussion entre pères était la seule solution de régler le problème, chose qui l’était enfin.
Faisant une curiseuse moue, Jor-El répliqua d’une voix inquiète :


Jor-El : je l’espère …

Jor-El baissa à son tour un court instant les yeux vers le sol d’un blanc immaculé avant de les relever, quelques secondes plus tard, en plantant son regard d’une profondeur rare dans celui de Jonathan.

Jor-El : pour l’obliger à partir, j’ai été contraint de révéler un peu plus son côté obscure … j’espère seulement que cette partie de lui ne le submergera pas avant son avènement …
Jonathan : (sourcils froncés par l’incompréhension) son avènement ?
Jor-El : il s’agit du jour où Kal-El et l’héritier du mal embrasseront leur destin, mains liées … à ce moment, ils devront choisir leur voie, celle du bien ou celle du mal. Si jamais son côté obscure restait le plus fort, il y aurait de fortes chances de le perdre à jamais …

Jonathan sentit le rythme de son cœur accélérer d’une façon si puissante que même l’environnement apaisant dans lequel il se trouvait ne suffirait jamais à le ralentir. Par sa faute, Clark allait peut être succombé à jamais à la voie du mal. Et rien ni personne ne pourrait changer cela. Il aurait tant voulu pouvoir changer ce fait, aider son fils à advenir celui qu’il était destiné à devenir.
Jor-El esquissa un léger rictus.


Jor-El : je lis dans votre esprit votre volonté éperdue de sauver Kal-El et dans votre cœur cette peur qui vous torture … vous pouvez peut être encore le sauver, de celui qui causera sa perte …

Jonathan releva la tête en un geste vif, braquant de nouveau son regard dans celui de Jor-El, presque l’identique du sien. Il vit ainsi son homologue décroiser de nouveau ses bras et amener sa main droite à mi-hauteur, devant lui. Plaçant sa paume vers le plafond, il ouvrit sa main en laissant ses doigts former des arcs de cercles. Peu après , une intense lumière blanche s’en dégagea, passant entre ses doigts, tandis qu’une petite sphère de cette lumière y apparut, dans le creux de sa main. Rapidement, elle gagna en taille et devint bientôt aussi grosse qu’une balle de tennis, tenue par la main de Jor-El. Il desserra alors son étreinte sur la lumière, la laissant s’élever délicatement au dessus de sa main ouverte. Les yeux écarquillés par la surprise, Jonathan vit la sphère de lumière dont l’intensité était telle qu’on ne voyait pas au travers, flotter jusqu’à lui et, obéissant à l’esprit de Jor-El, s’arrêter à mi-hauteur devant lui. Jonathan, la caressant de son regard bleu dans lequel se reflétait la lueur blanche, crut y voir, à l’intérieur, des mots en Kryptoniens et des visages défiler, lentement.

Jonathan : (ne quittant plus la sphère des yeux) qu’est ce que c’est ?
Jor-El : le seul moyen de savoir ce contre quoi vous devrez lutter … touchez-la !

Jonathan releva alors subitement les yeux vers Jor-El, passant son regard par dessus la sphère. Bien qu’une relation de confiance s’installait peu à peu entre les deux pères de Clark, Jonathan ressentait une certaine appréhension pour ne serait-ce qu’effleurer la sphère.

Jonathan : non … je …
Jor-El : (l’interrompant) cette sphère est le seul moyen pour vous d’aider Clark !

Jonathan, perdant l’expression apeurée tirant les traits de son visage, baissa à nouveau les yeux vers la sphère. Sa blancheur, aux reflets assombris, habitait désormais de nombreux mots en Kryptoniens, défilant lentement en se mêlant à des silhouettes sombres, des visages … S’il ne la touchait, il n’aurait peut être aucune autre chance d’aider son fils, qu’il chérissait tant. Il était prêt à tout pour son fils, même à braver la mort et ses méandres. Aussi, lentement, il amena son index et son majeur droits, tendus, vers la sphère de lumière. Ses reflets éclatants caressaient déjà sa peau tendre, alors qu’il n’était plus qu’à quelques centimètres. Il continuait d’approcher sa main, lentement. Plus que quelques millimètres …

 

LuthorMall – Metropolis – 9h14

Clark avait finalement arrêté de reculer, de ce pas titubant très lent, tout en continuant d’observer ce visage qui l’avait hanté depuis quasiment le jour où ils s’étaient rencontrés. Toute sorte de rumeurs, de tempéraments lui avaient été attribués pendant son évolution maléfique parmi le monde des humains mais en évoluant près de lui, si tant est qu’on puisse admettre qu’ils aient évolués ensemble, Clark s’était rendu compte qu’ils étaient tous très loin du compte. Rien d’assez proche de l’humanité ne l’avait jamais habité. Il n’état que haine, pouvoir et machiavélisme.
La caméra quitta le visage effrayé de Clark et se tourna vers cette homme qui en était l’origine. Partant de sa taille, sur laquelle tombait le bas du sweat noir, elle remonta lentement vers le haut de son corps. Arrivé au niveau de son cou maigre, elle ralentit un peu plus son plan. Une barbe de quelques jours apparaissait à la base de son cou. La caméra remonta encore et, à hauteur de son visage, immobilisa son plan. Ses traits avaient l’attrait d’un squelette sur lequel on aurait collé de la peau, extrêmement étirés sur les os de son visage. Seuls deux yeux noir, habités par le mal absolus, ressortaient, dans leur cavité. Ses cheveux noirs, grisonnants, étaient coupés si courts, qu’ils en paraissaient presque aussi courts que la barbe naissant sur le bas de son visage. Le sourire qui la traversait, en tous points narquois, faisait froid dans le dos, tout autant que le manque total de sentiments qui se reflétaient dans les rétines noires de son regard. La mort ne semblait pas avoir affecté Lionel LUTHOR plus que ça. Peut être même qu’elle l’avait rendu encore plus fort.
Enfin, Lionel élargit un peu plus son sourire, ce qui horrifia encore davantage Clark. Il reprit alors la parole, de cette voix heureuse qui déplaisait tant à Clark :


Lionel : hey bien, Kal-El, aurais-tu vu un fantôme ?

Cette phrase, sur toute sa longueur, était fidèle à l’ « homme » qu’avait toujours été Lionel, sarcastique et sûr de lui. Il profitait de l’effet de surprise, ô combien intense, produit en Clark, pour se jouer au mieux de la situation. Pourtant, dans toute cette phrase, Clark n’avait retenu qu’un seul mot : « Kal-El ».
Reprenant rapidement son sérieux et la froideur de son regard, Clark lui demanda alors, sur un ton implacable :


Clark : comment m’avez-vous appelé ?

Lionel ne perdit rien du très large sourire qui tirait au maximum la peau tendue de son visage grêle. Répondant à l’intérêt de Clark, Lionel laissa cette brillance maléfique illuminer le centre de ses yeux sombres :

Lionel : Kal-El …

Lionel marqua alors une pause, imposant au mieux possible à Clark la puissance de son sourire. Puis, prenant un air faussement peu sûr de lui, il ajouta :

Lionel : c’est bien le nom que t’ont donné tes vrais parents … sur Krypton ?

Clark sentit le rythme de son cœur accélérer nettement, suite à cette nouvelle révélation. Il était certain que Lionel s’en était rendu compte, puisqu’il élargit à nouveau ce large sourire qui le caractérisait. Par le simple regard qu’ils s’échangeaient, Clark avait l’impression que Lionel pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. Pourtant, cela était impossible. Malgré l’influence que le patriarche des Luthor avait toujours eu sur ses interlocuteurs, il n’avait jamais possédé un tel don.
De cette voix brisée par l’effarement, Clark se força pourtant à répliquer. Il devait savoir.


Clark : comment … comment savez-vous … tout ça ?

Lionel laissa un petit rire satisfait quitter sa gorge, clignant un instant des yeux. Cette réaction, cette situation, cette stupéfaction, Lionel les avait toujours espéré depuis le jour où il avait découvert le secret de Clark, par l’intermédiaire de Stephen Cruz, un ancien détenu qui avait lu l’esprit de Clark. Et enfin, enfin, il éprouvait ce sentiment cuisant de bien-être. L’attitude de Clark le ravissait au plus haut point.

Lionel : comment je sais ? … mais parce que je sais tout de toi, maintenant …

A chacune des phrases de Lionel, Clark voyait ses peurs s’amplifier et sentait le rythme de son cœur s’emballer un peu plus. Avant la mort de Lionel, Clark avait appris de manière douloureuse, qu’il connaissait son secret. Mais à ce moment, il pensait à ses pouvoirs, son influence possible sur le monde et à ses … faiblesses. Visiblement, ce n’était pas tout. Lionel connaissait également le nom de « Kal-El » et les origines Kryptoniennes de Clark. En réalité, il avait raison. Il connaissait tout de lui. A part peut être une chose : sa destinée.
Voyant l’air plus qu’effaré de Clark et malgré le sentiment de supériorité que cela produisait en son for intérieur, Lionel y coupa court. Prenant un air désolé entremêlé d’une gêne hasardeuse, il répliqua au jeune Kent :


Lionel : mais rassures-toi, je n’ai rien dit personne ! … maintenant, nous sommes dans la même situation !

Décidément, Clark ne comprenait pas un traître mot de ce que disait le père de Lex. Il connaissait son secret, enfin, de son point de vue et malgré les essaims malsains qui nourrissaient son avenir depuis si longtemps, il n’avait rien dit personne. Ceci était compréhensible, lui qui ne faisait confiance à personne. Mais, à première vue, il n’avait pas entrepris de plan maléfique contre le jeune fermier. Le plus étrange restait encore la fin de sa phrase. Sous quelque angle qu’il regarda la situation, Clark ne comprenait pas qu’ils soient dans la même situation.
Souriant, Lionel poursuivit son explication :


Lionel : pour tout le monde, je suis mort et enterré. Tu es le seul à savoir que …

Lionel avait interrompu sa phrase en plein milieu au moment où, dans son dos, il entendit plus vivement qu’auparavant le bruit régulier de talons, frappant bruyamment le sol dur du parking. Visiblement inquiet, Lionel saisit sa capuche de ses deux mains et la remit en un geste rapide et efficace sur sa tête, la rendant presque méconnaissable. Clark ne voyait plus que les contours flous de son visage, dans l’ombre provoquée par la capuche. De son regard noir, d’une froideur inégalable, Lionel regarda une belle jeune femme blonde, à la silhouette de mannequin, habillée d’une jupe noire, s’éloigner derrière Clark, de ce pas claudiquant caractéristique. Le père de Lex la regarda un long moment s’éloigner et ne reprit la phrase laissée en suspend qu’au moment où il fut bien certain que personne ne l’entendrait.

Lionel : tu es le seul que je suis vivant. J’ose espérer que cela dure …

Clark avait peine à comprendre. Ce pacte, que semblait lui proposer l’ancien PDG de la LuthorCorp était plus qu’inhabituel, en sachant qu’il sortait de sa propre bouche. Lionel Luthor, le philanthrope le plus réputé de cette décennie, voulait rester dans l’ombre.

Clark : attendez, vous me proposez de ne pas divulguer mon secret à la condition que je garde le votre ?

Clark avait peine à le croire. Lionel venait de commettre une erreur que personne ne l’aurait cru capable de commettre. Il avait donné la possibilité à Clark de le faire chanter.

Lionel : c’est précisément ce que je te proposes !

Clark avait de plus en plus de mal à croire aux paroles de cet homme qui ressemblait à s’y méprendre à Lionel Luthor. Il en avait peut être l’apparence mais son attitude avait bien du mal à coller à celle du Lionel qui avait hanté Clark tant de mois.
Se remémorant le jour où il avait fait explosé le laboratoire de la LuthorCorp et ainsi tué Lionel, Clark renforça un peu plus les doutes qui s’immisçaient en lui depuis quelques minutes.


Clark : vous êtes mort ! J’ai retrouvé votre corps au milieu des débris de votre laboratoire !!

L’attitude de Lionel devint plus sérieuse, plus grave. Visiblement, ce qu’il s’apprêtait à apprendre à Clark était d’une véracité sans égale et d’une importance cruciale. Si Lionel avait pu éviter d’en parler, dans un lieu truffé de caméras, il l’aurait certainement fait. Mais il devait à tous prix convaincre Clark. Sa survie en dépendait.

Lionel : le corps que tu as retrouvé n’était pas le mien. Je n’ai jamais mis les pieds dans ce laboratoire … c’était celui de mon clone !

L’effarement étira les traits du jeune visage de Clark, au moment où Lionel balada son regard noir de gauche à droite, s’assurant que personne ne l’avait entendu. Une voiture, un peu plus loin démarra et attira l’attention accrue de Lionel. Clark lui rétorqua :

Clark : votre clone ?!
Lionel : (voix basse) oui !

La caméra se resserra sur le visage grêle de Lionel, couvert par la capuche noire. L’ombre rendait ses traits très flous, seuls son nez, le bas de son visage et son regard luisant ressortaient. L’image s’illumina alors d’un blanc aveuglant faisant ainsi disparaître le visage encapuchonné de Lionel. Peu après, la lumière blanche s’assombrit et laissa apparaître l’environnement bleuté du bureau du PDG, au sommet de la LuthorCorp. La caméra se tenait à l’entrée du bureau et filmait, un peu plus loin, le bureau en verre de Lionel, aux reflets bleutés. Un ordinateur portable y était posé, ainsi qu’un téléphone. La baie vitrée, logée derrière, laissait entrée la lumière incertaine du soleil couchant, visible à l’horizon assombrie, dehors.
La caméra pivota sur la droite et immobilisa son plan. Près du mur se trouvait une table basse en verre, de forme ovale. Un dossier en carton blanc était ouvert dessus, délivrant une pile de feuilles noircies de chiffres aussi nombreux que compliqués. Un fauteuil assez confortable, en cuir bleu, était installé entre ladite table et le mur. Lionel Luthor, un an plus tôt, se tenait dedans. Il possédait toujours sa longue chevelure brune, ondulée et son bouc difficilement différentiable du reste de sa barbe naissante. Une simple chemise blanche, entrouverte, couvrait le haut de son corps. Penchée sur la table de verre, il analysait une à une chaque partie du dossier. L’esprit enlisé, il décida de lâcher un instant des yeux tous ces chiffres. Il se laissa aller contre le dossier reposant et souffla bruyamment. En voix-off, la voix du Lionel actuel se fit entendre, résonnant.

« Un soir, un homme est arrivé, de nulle part »


Un violent coup de vent s’éleva et, faisant acte de sa puissance hors normes, éjecta les deux portes d’entrée en PVC, sur la gauche de Lionel, de leurs gonds et les envoya terminer leur court envol sur le bureau, duquel elles balayèrent bruyamment l’ordinateur portable. Le rythme de son cœur s’emballant subitement, Lionel se releva légèrement dans son fauteuil, en observant l’envolée aussi surprenante que puissante des portes. Jamais il n’avait assisté à un tel acte de puissance des cieux. Son attention fut alors détournée par une voix à l’aspect mystique qui, elle, ne semblait pas étonnée le moins du monde.

???: je suis le Sauveur …

A l’instant où Lionel tournait la tête sur sa gauche, à l’endroit d’où provenait la voix, la caméra en fit de même. Elle filma la silhouette nouvellement apparue du bas jusqu’à sa tête, d’un plan très lent. Ainsi, une large tunique d’un rouge vif fut visible, habillant une personne tristement connue de Clark : Anu’Kh, dit Le Sauveur. Un large capuchon rouge couvrait son visage ainsi méconnaissable, l’ombre empêchant de reconnaître ses traits mystérieux. Il avait les bras croisés dans ses manches. La droite portait une suite d’inscriptions Sethi, de couleurs blanches, brodées à la verticale sur le tissu. Son immobilité caractérisait l’aura de puissance qui émanait de sa silhouette.

Anu’Kh : Lionel Luthor, il est temps …

Ayant enfin repris contact avec la réalité, Lionel glissa lentement sa main sous l’accoudoir droit du fauteuil, en espérant que cet homme, plus qu’étrange, n’y verrait que du feu. Alors, il enfonça un petit bouton plat, logé dessous. Rassuré, il reprit son sourire goguenard et se pencha sur la table de verre. Arborant toujours ce sourire qui caractérisait sa supériorité, il croisa ses mains en entremêlant ses doigts et répliqua de cette voix enjoué :

Lionel : il est temps de quoi ?

A ce moment, des bruits de pas précipités se firent entendre dans le dos d’Anu’Kh, alors que deux vigiles en costume noir, sortaient du couloir. Braquant dangereusement leur 9mm sur la silhouette rouge d’Anu’Kh, ils étaient prêt à tirer à tous moments. Pourtant, cela ne valut pas un geste de la part du Sauveur. Il ne semblait pas inquiété plus que cela d’être mis enjoue par deux vigiles à la carrure plus qu’avantageuse. Gardant les bras croisés, il répondit à Lionel d’une voix égale.

Anu’Kh : temps de prendre ta place dans la destinée de Kal-El …

Lionel devait avouer, dans son for intérieur, qu’il était assez admiratif de cet homme. Malgré deux hommes qui pointaient leur arme sur lui, il gardait son sang-froid. Son attitude était plus qu’étrange, mais il dégageait quand même un charisme indéniable. Lionel décida d’en prendre compte. Au lieu d’ouvrir le feu, il répliqua d’une voix délicate :

Lionel : désolé, mais je connais aucun Kal-El. Vous voudrez donc sortir …
Anu’Kh : tu ne peux échapper au sort qui t’est promis !

Cette fois, Lionel perdit son sourire narquois. Il n’avait aucune idée de qui pouvait être cet homme si bizarrement accoutré mais une chose était sûre, personne ne lui dicterait son destin. Il se l’était lui même forgé, assassinant ses parents et personne ne viendrait briser sa vie.
Prenant son air le plus menaçant, ce qui n’était pas peu dire, Lionel braqua son regard dans le vague visage qui devait se trouver derrière cette ombre. Il répliqua alors, d’une voix si froide, que même ses hommes de mains en eurent froid dans le dos :


Lionel : écoutez-moi bien : il me suffit d’un clignement pour vous envoyer à la morgue !
Anu’Kh : tes menaces ne m’atteignent pas !
Lionel : mes menaces, peut être ! Mais mes balles certainement …

Lionel tourna alors la tête sur la gauche d’Anu’Kh et fit oui d’un abaissement de la tête. Au même moment, Anu’Kh décroisa les bras, les enlevant de ses manches et brandit son bras droit en direction des hommes de main de Lionel. Les deux hommes de main pressèrent la détente de leur pistolet. Un bruit de coup de feu, décuplé, se fit entendre au moment où une balle partait de chacun des canons. A cet instant, Lionel assista à la scène la plus effarante à laquelle il lui fut donné d’assister. Créant un sillon de vitesse derrière elles, les balles ralentirent, perçant pourtant toujours l’air. C’était comme si le temps ralentissait à son extrême, sans pourtant s’arrêter. Ses deux hommes de mains semblaient eux aussi figés. Seuls Lionel et Anu’Kh semblaient encore libres de tous mouvements.

Lionel : comment … vous … ?
Anu’kh : mes pouvoirs dépassent de loin tout ce que tu as vu jusqu’à maintenant !

La caméra fit alors un gros plan sur le visage de Lionel, caractérisé par son bouc et par sa longue chevelure ondulée et s’attarda un long instant dessus. Un étonnant effet de morphing montra la modification de son visage de cet instant jusqu’au moment où il se trouvait devant Clark, au LuthorMall. Son visage était devenu émacié et ses cheveux avaient été rasés. Le regard vide, aspergé par ses sombres souvenirs, il continua de narrer son histoire à Clark, sans le regarder.

Lionel : au départ, j’ai trouvé son aide bénéfique. Il m’a poussé à rencontré Stephen Cruz, l’homme qui m’a permis de découvrir ton secret … Mais dès cet instant, tout s’est compliqué …

Clark était littéralement accroché aux lèvres de Lionel. Pour une raison qu’il ignorait, Lionel avait décidé de lui expliquer ce qui s’était passé pendant cette période. Il préférait l’écouter attentivement.

Lionel : … il m’a retenu prisonnier dans son QG pour étudier mon cerveau. Il m’a remplacé par un clone qui, comme tu t’en es rendu compte, ne s’est jamais fait remarqué. Je n’ai jamais compris son intérêt pour moi, on aurait dit qu’il cherchait quelque chose dans mon esprit … et finalement, il m’a relâché du jour au lendemain …

Lionel baissa les yeux vers le sol. Etrangement, malgré le mental hors norme qui le caractérisait, Lionel semblait touché par cette expérience. Clark laissa ce long silence perdurer, attendant le moment opportun pour reprendre la parole. Mais la curiosité était trop forte. Connaissant le père de Lex, il avait peine à comprendre.

Clark : mais pourquoi vous me dites tout ça ?

Lionel releva alors lentement les yeux vers Clark et braqua son regard sombre, d’une noirceur inaltérable dans celui, d’une pureté inégalable, de Clark. Un long échange de regard, si différents soient ils, s’installa, avant que Lionel ne réponde d’un sourire bien différent de celui qu’on lui connaissait.

Lionel : pour t’aider, Clark.
Clark : (surpris) m’aider ? M’aider à quoi ?

Ce sourire, présent sur le visage amaigri de Lionel, était plus qu’étrange. Une sorte de bienveillance, étrangère au personnage, en émanait. Comme si cette expérience douloureuse, qui avait froissé son égo jusqu’à sa moelle, lui avait forgé un nouveau tempérament, une nouvelle quête dont il devrait s’acquitter. Et visiblement, Clark en faisait partie intégrante. Il était même le noyau principal de cette quête.

Lionel : je connais l’existence de la Prophétie Kryptonienne et des cristaux que tu dois réunir … j’ai l’intime conviction que je peux t’aider à les réunir.
Clark : mais pourquoi vous feriez une telle chose ?
Lionel : pour t’aider à embrasser ta destinée … et me venger de celui qui m’a volé ma vie …

Clark comprenait mieux, finalement. Lionel n’avait pas tant changé que cela, elle était même peut être devenu plus mauvais qu’avant sa disparition. Mais son vœu de vengeance avait changé de cible. Désormais, celui qui était sous les projecteurs de Lionel Luthor était Anu’Kh, dit le Sauveur.
Clark sentit la froideur et la noirceur qui constituaient une partie de lui refaire subitement surface. Le fait que les cristaux soient menacés en était certainement l’origine. Il avança d’un pas et, fermant son visage en une expression furieuse, répliqua, de cette voix glaciale :


Clark : je n’ai besoin de personne … personne ! Est-ce claire ?

Jamais Lionel n’avait croisé un regard avec une telle froideur, une telle noirceur dans sa profondeur. S’il n’y avait pas été préparé, Lionel aurait certainement vacillé sous le coup de la surprise : Clark n’était plus le même. Le jeune Kent intensifia un peu plus la présence de son regard dans celui de Lionel, ce dernier en cilla. Mais il rouvrit les yeux juste à temps pour voir une lueur d’abord rougeâtre naître dans les rétines bleutées de Clark avant qu’elle ne vire au transparent. Elle baigna alors les yeux de Clark, formant un cercle autour de ses pupilles noirs, éclairant ainsi ses yeux déjà si claires. Il s’apprêtait à user de sa vision thermique. Mais au dernier moment, il cligna des yeux et fit disparaître la lueur de ses yeux. Il tourna alors les talons et, de ce pas assuré, s’éloigna de Lionel. Il lui répliqua une ultime fois, de cette voix exprimant son assurance nouvelle.
Clark : (haute et intelligible voix) vous n’avez qu’à proposer votre aide à votre cher fils … il en sera ravi !

Lionel regarda Clark marcher sur le sol dur et résonnant du parking souterrain jusqu’au moment où ce dernier partit en super vitesse, créant un sillon de vitesse sombre. A cet instant, la caméra revint vers le visage émacié de Lionel, exprimant la peur et le ressentiment. Puis, lentement, son sourire machiavélique revint, dans toute son ampleur. Dans l’ombre dégagée par sa capuche, deux lueurs rougeâtres se mirent à briller, intensément, rompant l’ombre à l’endroit de ses yeux. Il disparut à son tour dans un sillon de vitesse rougeâtre, dans la direction opposée de celle de Clark.

 

Manoir des LUTHOR – Smallville – 10h02

Adossée contre un mur de pierre froide, l’un des nombreux constituant l’infrastructure du manoir ancestral des Luthor, la caméra restait immobile, filmant droit devant elle ce vitrail étrange, le seul qui pouvait attirer l’attention de n’importe qui. En effet tout autre vitrail représentait de grands hommes, Papes, chefs d’états, rois, hors celui ci représentait un homme, habillé d’un long vêtement noir. Ce vêtement très large, pouvant être comparé à une toge, couvrait son corps dans sa totalité. Assis dans un trône en or, très imposant, ses deux mains étaient posées sur les accoudoirs. L’une d’entre elles, la droite, portait un gant de cuir noir. Un large capuchon de tissu noir couvrait sa tête blanche, dont la devanture blanche, dépourvue de cheveux, était ombrée. Deux yeux d’un bleu clair magnifique ressortaient, assez surnaturellement. Et tout autour, un cercle de symboles étranges, assimilés à des formes carrées semblaient raconter ce qui formerait son destin prodigieux.
Soudain, la caméra demeurant adossée contre le mur de pierre, pivota vers la droite du couloir, s’étendant assez loin. A cet instant, apparut la silhouette de Lex Luthor, habillé d’un pantalon de costume noir et d’une chemise en soie noire, assez légère, dont les deux boutons du haut étaient restés ouverts. Avançant d’un pas lent, délicat, il tenait entre ses deux mains une boite noire ovale, semblable à un gros galet sombre. Une rainure partageait les sufaces du dessus et du dessous, marquant certainement les charnières permettant l’ouverture du couvercle. Un liseré doré bordait la surface du dessus alors qu’un étrange symbole Sethi, de cette même couleur or était incrusté dans le plastique noir, en son centre. Avançant vers la caméra, Lex, gardait son regard azur braqué sur cette surface bombé, sombre et si envoûtante. Il paraissait comme absorbé par la contemplation de cette boîte. Ce qu’elle contenait devait valoir, à ses yeux, toutes les fortunes du monde, même réunies. Il savait qu’il détenait une des clés menant à un puits de pouvoirs sans égal. Jamais il n’avait été aussi près du but. Il ne lui en manquait plus que deux et il embrasserait enfin sa destinée.
Et subitement, il s’arrêta sur place, ses yeux s’écarquillant. Un fin filet d’une lumière dorée éclatante venait de commencer à s’échapper de la boite, par l’interstice créée par les charnières. Reflétant sur les murs de pierre froide, cette lumière gagnait rapidement en intensité, accompagnée d’un sifflement suraigu qui ne déconcentrait pourtant pas Lex de son observation. Ainsi, il vit le couvercle s’ouvrir en un coup de vent virulent et laisser la lumière s’échapper dans toute son intensité. Sa dorure, éclatante, jaillissait sur le tissu sombre couvrant le corps de Lex et créait une aura circulaire tout autour de la boite, d’une façon des plus éblouissante. Malgré cette lumière aveuglante qui jaillissait sur son visage, cette brillance reflétant dans la rétine de ses yeux bleu ciel, Lex, sourcils froncés, essayait à grand peine de voir cet objet présent dans la boite. Alors, délicatement une aura de lumière dorée encore plus intense, formant l’origine de la lumière, s’éleva lentement au dessus de la boite et, s’élevant dans les airs, s’immobilisa. Lex concentra un peu plus sa vue sur cette aura de lumière et, en partie parce qu’il savait ce que contenait la boite, reconnut cet objet. De forme pyramidale à trois face, il était fait d’un alliage translucide magnifique qui, en cet instant, luisait de cette lumière dorée aveuglante. Au travers d’elle, on avait peine à encore voir le symbole du « DIAPHANE », gravé sur l’une des faces en noir, de symboles Kryptoniens assez carrés. Lex vit le cristal se stabiliser dans les airs, tandis que la lumière qui émanait de lui se stagna également. Lex laissa un lent sourire étirer ses fines lèvres, ravi de le voir s’activer de lui-même, même s’il n’en connaissait pas encore la raison. Pourtant cela ne se fit pas attendre.
Sans signe avant-coureur, le cristal démarra en trombe, dans un souffle mat assourdissant, créant une traînée de lumière or derrière elle. Lex la vit ainsi foncer à une allure défiant le mur du son vers la gauche, en diagonale et traverser dans un bruit d’éclat très bruillant, le mur de pierre. Sans que sa surface en verre n’en soit abîmée, le cristal créa un trou béant dans le mur et continua sa course en diagonale vers un lieu qui semblait l’appeler vivement. Lex perdit instantanément son sourire, sentant le rythme de son cœur accélérer douloureusement. L’un des trois éléments menant au pouvoir suprême lui échappait peut être.
Aussi, ne prenant qu’une seconde d’inaction, trop abasourdi pour démarrer au quart de tour, Lex, finit par démarrer à son tour en courant, et longea le long couloir vers le fond, droit devant lui. Les vitraux, contre le mur de gauche, défilèrent faisant refléter les rayons du soleil devenus multicolores au contact du vitrail sur la silhouette de Lex. Il arriva bientôt au fond du couloir, tournant en angle droit sur la gauche. Dans le coin formant l’angle du manoir, une armure en métal, dans l’ombre, était installée. Lex se tourna vers la gauche et s’immobilisa, à temps. Il entendit un nouveau craquement rocheux tandis que me cristal du Diaphane, toujours extrêmement lumineux, refaisait surface. Il venait de traverser le mur de gauche et, de cette même vitesse ahurissante, survola le couloir dans sa largeur et passa au travers du mur de droite, en face du précédent. De ce même phénomène étonnant, le cristal créa un trou béant en plein milieu et entra dans la nouvelle pièce, que Lex, connaissait peu, pour y être si peu souvent venu : la Grande Bibliothèque.
Lex se remit à courir, le long du mur de droite et s’arrêta face au trou, dans le mur. Il se pencha et, sentant le rythme de son cœur accélérer à mesure qu’il se rapprochait du cristal, Lex posa son œil droit contre le trou et regarda au travers. Ce qu’il vit, derrière ce mur, accéléra encore un peu plus le rythme de son cœur, si toutefois cela était capable. Il bougea son œil de gauche à droite, très rapidement et décida de ne plus rester ici plus longtemps. Il se redressa et continua de longer le mur vers sa gauche, arrivant à hauteur d’une porte en bois massif. Il la poussa et entra dans la Bibliothèque au pas de course. Il courut le long d’une allée étroite, entre un mur de pierre, sur la gauche et une haute étagère, sur la droite, contenant une quantité de livres assez étonnante. Enfin, après 10 long mètres, Lex contourna l’étagère en tournant à droite et longea une nouvelle allée encadrée de deux nouvelles étagères de livres. Il tourna à nouveau à droite et vit ainsi apparaître un espace de travail, aménagé entre les étagères. Une sur la gauche, longeait le mur sur ce même côté jusqu’au fond de la salle, fermée par ce mur de pierre troué en plein centre. A plusieurs mètres, sur la droite, une autre étagère, celle qu’avait longée Lex à son entrée dans la Bibliothéque, fermait l’espace. Et, en plein centre, se trouvait une table ronde en bois d’ébène, entourée de deux chaises du même bois, confortables grâce au coussin bleu accroché dessus. La lueur dorée était elle aussi réapparue, dans toute son intensité, flottant à mi-hauteur sur la droite de Lex, à côté de la table. En voyant ce qu’elle survolait, Lex écarquilla les yeux d’effroi. La panique qui s’était manifesté en lui au moment où il avait regardé au travers du mur se décupla encore un peu plus. Sa peur la plus grande par sa possible réalisation était présente sous ses yeux : le corps de Julian gisait sur le sol, aux pieds de la chaise de laquelle il venait de tomber. Il semblait inconscient et était recroquevillé en position fœtale. Sur son front, une plaie bleue indiquait un choc brutal et une marre de sang couvrait ce front et tombait sur le sol, au goutte à goutte. Lex faisait rapidement le lien : position fœtale, sang coulant très vite … Il se rappela la phrase dite par le Docteur personne de Julian : « Au moindre choc à la tête, on ne pourra plus rien pour lui ... ». Le pire était donc finalement arrivé.
La lueur dorée ramena Lex à la réalité. Il vit le cristal lumineux amorcer une descente vers Julian et délicatement se poser dans la main droite du jeune homme, ouverte. Le cristal se posa doucement au creux de celle-ci. Aussitôt, la lueur s’intensifia et atteignit son paroxysme, forçant Lex à se détourner du corps de son frère. La caméra, elle, resta braqué sur Julian.
Malgré l’intense aura de lumière dorée, infranchissable, qui enveloppait désormais le cristal, il fut indéniable que Julian, lentement, referma sa main sur le cristal. A cet instant précis, une deuxième lumière dorée, éblouissante, apparut sur la nuque du jeune homme, à nu, mis à part le col de sa chemise légère blanche. Instantanément, la marque du Diaphane, caractérisée par une suite de symboles Kryptoniens carrés, apparut sous la lumière dorée. S’en suivit une troisième lumière dorée, au centre de son torse. Gagnant peu à peu en intensité, la lueur se stabilisa et laissa deux lignes de métal partir de ses bords et embrasser le cou de Julian avant de se rejoindre, sur sa nuque s’attachant en une fraction de seconde. Les trois lueur atteignirent alors leur paroxysme, au même moment. Lex se força à revenir vers le corps de son frère, n’ayant aucune envie de râter ce qui apparaissait comme un phénomène hors norme. Et il avait raison. La lumière dorée refléta sur son visage jeune et, lentement, le sang entourant sa plaie, au front, repartit vers la plaie, délicatement, en forme de vaguelette. Bientôt, le sang fut entrée dans la plaie et celle-ci, d’une douceur étonnante, se referma. Julian rouvrit alors instantanément les yeux et prit une profonde inspiration, comme s’il refaisait surface, après une longue période d’apnée. Il se redressa subitement, s’asseyant et se mit à respirer profondément. Tandis que les lueurs s’atteignaient, Lex, abasourdi, s’approcha de son frère et le contourna, avant de s’accroupir près de lui. En passant, il vit la marque du DIAPHANE, inscrite en jaune sur la nuque de Julian. L’aura enveloppante avait disparue, comme les deux autres. Julian s’assit complètement et sentit un objet, dans sa main droite. Surpris et toujours essouflé, Julian baissa les yeux vers cette main et l’ouvrit. Lorsqu’il découvrit dans le creux de sa main le cristal translucide du DIAPHANE, il se demanda de quoi il pouvait bien s’agir. Mais visiblement, c’est ce qui l’avait ramené du royaume des morts. Puis, le poids de cette chaîne, autour de son cou, attira son attention. Il baissa les yeux et aperçut un espèce de médaillon en métal gris, de forme triangulaire. Plat, il était gravé en son centre du symbole du DIAPHANE : il s’agissait de l’Amulette du Diaphane, semblable presque dans tous ses détails à celle de Lana. Il commençait à sentir une douceur enivrante s’emparer de son esprit, rapidement. Il se sentait différent, en paix … il se sentait accompli. Lex lui aussi commençait à comprendre. Il perdit son air effaré et laissa doucement un sourire radieux traverser son visage. Julian releva la tête et braqua son regard sur son frère, comme perdu.


Julian : qu’est ce qui m’est arrivé ?
Lex : (accroupi, radieux) tu as embrassé ta destinée …

La caméra quitta le visage radieux de Lex et se braqua sur celui de Julian perdu. Elle s’approcha des yeux bleus, très claires, presque diaphanes, de Julian et effectua un gros plan sur ses rétines. Des symboles Kryptoniens dorés brillaient dans ses rétines, formant des cercles autour de ses pupilles. Julian venait de prendre sa place de Gardien, tout comme l’avait fait Lana.

 

Fondation Virgil SWANN – New York – 09h14

[Fall to pieces - AVRIL LAVIGNE]

Devant l’objectif de la caméra, filmant un plan oblique, en contre plongée, apparaissait une haute vitrine de verre, cylindrique, se dressant du sol blanc, dallé, vers un plafond voûté à perte de vue. Cette vitrine, aux aspects post-modernes, était l’une des nombreuses présentes dans cette immenses salle, par sa hauteur et sa taille, ressemblant à s’y méprendre à celle d’une salle d’exposition, à l’intérieur de grands musées comme celui du Louvre, à Paris. Ce genre de cylindres de verre, hermétiquement fermés, étaient alignés les uns à côté des autres formant des allées sinueuses, créant une atmosphère assez originale, dans ce genre de pièce. La lumière pâle se dégageant de lampes plates, circulaires, implantées dans le plafond voûté, à plusieurs mètres au dessus de la salle, ajoutait au bizarre qui enveloppait cette salle dans laquelle Virgil Swann, le richissime astronome Américain regroupait ses objets de valeurs.
Le plan en contre plongée, restant dans la même position, bascula encore un peu plus de façon à filmer le cylindre de verre avec un effet d’optique qui le rendait plus imposant qu’il ne l’était en réalité. A l’intérieur, au travers de ce verre translucide, un faisceau de lumière pourpre balayait les contours de la surface diaphane, étant plus intense par endroit que par d’autre. La lumière, témoignant d’un des systèmes anti-vol les plus sophistiqués au monde, reflétait également sur ce que le cylindre gardait si jalousement, un objet tenant plus que tout, ou au moins très précieux aux yeux de Swann. Il s’agissait d’une fine feuille de parchemin jaunie, plus par endroits que par d’autres et légèrement courbé sur le haut et le bas de son support. Bloquée entre deux parcelles de verre, telles des pinces, la feuille restait ainsi en suspend au centre du cylindre. Nul ne faisait que ses inscriptions avaient une valeur inestimable ; sûrement la raison de l’intérêt de Swann. En plein centre de cette feuille apparaissait l’inscription principale, peinte d’une blancheur inaltérée, représentant le Dieu Egyptien Râ, d’un hiéroglyphe de son pays. Juste au dessus, peint de cette même couleur magnifique, restée inviolée malgré les nombreuses années passées, était inscrit le symbole de Kal-El, caractérisé par ce 8 encadré d’un pentagone serré vers lui. Ces deux symboles, par leur couleur sublime, semblaient associés l’un à l’autre. Comme si Râ, le dieu du soleil et Kal-El, le fils des étoiles, étaient liés par une quelconque manière. Et tout autour de ces deux pictogrammes avaient été inscrites des lignes de petits hiéroglyphes égyptiens, en caractères noirs légèrement usés par la temps qui passe. Partant de chaque coin de la feuille jaunie, ils la noircissaient en lignes parallèles, à ces coins. Les lignes finissaient par se croiser et laissaient un vide, à ces endroits. L’intérêt de Swann était plus qu’évident.
La caméra fit ensuite volte face et remit son objectif à l’horizontale, parallèlement au sol. Elle filmait maintenant le buste d’une jeune femme, vêtue d’une veste de tailleur noir ouverte, dans sa partie supérieure sur un débardeur blanc au décolleté mystérieux, deux bras croisés sur le haut de son torse. Lentement, la caméra remonta vers le haut de son corps, laissant défiler un cou mince, entouré d’un collier doré puis un visage blanc magnifique. Sa chevelure blonde, assez courte, était coiffée élégamment à plat, ne laissant qu’une large mèches de ses cheveux couleur paille plaquée sur son front, dissimulant ainsi une certaine partie de l’hématome qui marquait le milieu de cette partie de son visage. Ses fines lèvres, rosies par son rouge à lèvres, serrées l’une contre l’autre, définissaient à la perfection cette fermeté, cette anxiété grandissante qui étiraient ses jeunes traits chevalins. Son regard noisette, envoûtant, laissait une brillance ensorcelante s’en dégager, malgré le fait qu’elle ne s’était jamais sentie aussi crispée. Son estomac semblait nouer jusque dans ses propres entrailles. La réponse qu’espérait tant Chloé Sullivan était sur le point, espérait elle, de lui être révélée.
Et soudain cette voix d’homme, plus dure et froide qu’elle ne l’avait espérée, se fit entendre, sur sa droite.


???: vous n’êtes pas Lex Luthor !

Chloé se retourna d’un geste, le cœur battant à tout rompre, son corps tremblant de toutes parts, dans cette direction. Gardant les bras croisés sur son torse, elle dirigea son regard à l’extrême droite de la salle. Au bout de l’étroite se tenait Virgil Swann, assis dans son éternel fauteuil roulant à la pointe de la technologie. Le visage macabre, aussi froid et furieux que l’on puisse imaginer, il fixait Chloé, à plusieurs mètres de lui d’un regard noir que l’on ne lui connaissait pas. Une haine inaltérable et virulente animait la rétine de ses yeux d’un bleu si claire. Swann semblait détester ouvertement Chloé. Et le timbre de sa voix n’était pas pour réfuter cette thèse.
Chloé le vit faire pivoter délicatement son fauteuil sur lui même, à l’aide du clavier aménagé sur l’accoudoir droit et lui tourner le dos. Il resta un instant immobile, tournant le dos à Chloé avant d’ajouter, de cette même voix sans réplique, ces mots résonnant en écho dans toute l’immense salle.


Swann : notre entretien est donc caduque …

Alors, il appuya sur un nouveau bouton, sur son clavier et se mit à faire rouler son fauteuil dans la direction de laquelle il venait : une grande arche fendant l’imposant mur de pierre, un peu plus loin. Sans une réaction, le cœur battant, Chloé le regarda ainsi s’éloigner. Sa dernière chance de savoir lui filait entre les doigts. Le seul homme au monde, le seul qui ait cette réponse à la question qui lui brûlait les lèvres et qui déterminerait l’avenir de la planète lui tournait fatidiquement le dos.
Elle finit par laisser ses peurs éclater, exploser littéralement à la surface et avança de deux pas vers Swann avant de répliquer, d’une voix plus forte qu’elle l’aurait voulue et également assez chevrotante :


Chloé : vous auriez accepter de me rencontrer si je vous avais dit que je m’appelais Chloé Sullivan ?

Swann ne s’arrêta pas même en entendant les paroles, aux nuances désespérées, de Chloé. Il ne connaissait que trop bien ces manières d’amener la pitié des autres juste pour faciliter l’accès à l’information. Chloé s’était déjà faite passer pour Lex, pour entrer en contact avec Swann. Qui savait ce qu’elle était capable de faire ?
Continuant donc de faire avancer son fauteuil roulant vers cette entrée qui se rapprochait inexorablement, Swann répliqua, de cette même voix glaciale, dont le ton s’était encore élevé :


Swann : non … je n’ai que faire des journalistes de votre genre qui se croient tout permis sous prétexte que leur révélation est capable de modifier le miroir du monde !

Swann marqua une nouvelle pause et s’arrêta subitement. Sa tête, dépassant du dossier, sembla s’abaisser légèrement.

Swann : c’est à cause de gens comme vous que je suis réduit à l’état de légume !

Chloé se rendit compte de l’animosité sans égal que ressentait Swann à l’égard des journalistes. Elle le comprenait parfaitement et pourtant, cette haine lui coûterait énormément.
Chloé sentait ses peurs, sa panique refaire surface dans leur plus grande puissance. Swann s’éloignait véritablement d’elle, à une vitesse qui lui faisait horriblement mal. Dans quelques secondes, il disparaîtrait derrière ce mur et emmènerait avec lui ce mystère que Chloé n’aurait jamais su élucider, un mystère qui pourrait sacrifier des milliers, des millions de vies …
Elle baissa son regard et répliqua, d’une voix plus faible, brisée par le chagrin.


Chloé : oui, je connais cette histoire …

Swann s’arrêta subitement. La voix de Chloé avait changé du tout au tout. Malgré sa position –dos tourné- Swann aurait parié que la tête de Chloé exprimait un désarroi grandissant, une peine inégalable. Elle se sentait personnellement responsable. Et pour cause. Swann était l’un des hommes les plus respectables. Mais, par un malheureux concours de circonstances, il s’était retrouvé en fauteuil roulant. Et depuis, il exerçait une lutte insatiable contre l’Ange de la Mort, dans un combat à la déloyale. Son argent, il s’en servait principale pour sa fondation, grâce à laquelle il avait guéri nombre de maladies génétiques incurables. Chloé aurait aimé, plus que tout, pouvoir l’aider. Et pourtant c’était elle, qui avait besoin de son aide. Cette situation la répugnait au plus haut point.

Chloé : et j’en suis profondément désolée …

Chloé se rendit alors compte que Swann avait cessé d’avancer, et s’était immobilisé à quelques mètres de l’entrée, comme captivé par le Laïus de Chloé. Il était touché, en son for intérieur, comme il ne l’avait plus été depuis de fort nombreuses années.
Elle releva la tête et braqua son regard droit devant elle, fixé sur le dossier du fauteuil de Swann et lui expliqua :


Chloé : … mais je ne suis pas là en tant que journaliste … je suis là en tant qu’amie …

Swann, jusqu’alors attendri, laissa cette surprise s’insinuer dans tous ses membres jusqu’à émerger dans son esprit où son cortex cérébral permit de lui faire réfléchir. Etait-ce une de ces techniques utilisées par les nouveaux journalistes pour amadouer ou Chloé se prenait-elle réellement pour une de ses amies ? Dans tous les cas, il restait captivé par cette conversation qui prenait une tournure à laquelle il n’aurait jamais pu pensé, même avec l’esprit créatif qui était l’un de ses attributs naturels.

Swann : je n’ai pas le souvenir d’avoir jamais été lié, d’une quelconque manière que ce soit, avec une certaine Sullivan !

Chloé se rendit alors compte de la maladresse qu’elle venait de commettre. Elle avança de trois nouveaux pas et s’arrêta, alors que le bruit de ses talons aiguilles se répercutait en écho dans toute la salle. Elle reprit alors d’une voix encore plus douce, se voulant rassurante.

Chloé : non, je voulais vous parler d’une de mes propres amitiés !

Swann se renfrogna à nouveau. De qui qu’il puisse s’agir, il ne voyait vraiment pas le lien à faire entre lui et cette tiers personne. Swann n’avait jamais accordé de grande confiance, même pas à sa famille. Alors à des amis. Il n’en avait eu qu’un, un seul, qui était Kryptonien : Jor-El. Mais ce dernier était mort dans l’explosion de sa planète natale, seul son esprit pérennisait.
C’est pourquoi il répondit à Chloé d’une voix à la fois glaciale, comme lors de son arrivée, mais se mêlant cette fois à un amusement non dissimulé.


Swann : je crains ne rien pouvoir faire pour vous, dans ce cas … je suis astronome, pas psychologue …

Pour la deuxième fois, Chloé voyait sa chance lui glisser entre les doigts. Par une suite de maladresse comme elle avait rarement été l’auteur, elle compromettait gravement ses chances d’obtenir de l’aide de Swann. Peut être était ce l’enjeu qui la bloquait ou la subtilité avec laquelle Swann faisait évoluer la conversation mais Chloé semblait n’avoir qu’une infime faille pour le convaincre.
Swann reprit alors, comme pour conclure l’entretien :


Swann : maintenant, vous m’excuserez …

Et il appuya de nouveau sur le bouton bleu, sur son clavier, permettant de faire avancer son fauteuil roulant. Le voyant à nouveau réduire la distance qui le séparait de la sortie, Chloé répliqua d’une voix haute et intelligible.

Chloé : celui dont je parle est également un de vos amis !!

L’effet fut aussi immédiat que Chloé l’avait espéré. Swann s’immobilisa sans crier gare. Il sentait le rythme de son cœur accélérer nettement, comme si cette seule phrase avait réveillé un stress qui était devenu, au fil des années, comme fossilisé.
Ce pouvait-il que Chloé Sullivan que tous ceux que Swann avaient rencontré avaient qualifié de fouineuse hors norme ait découvert l’existence de l’esprit de Jor-El ? Cela paraissait si invraisemblablement et pourtant … Le rythme de son cœur effréné était la preuve que cela n’était pas si impossible qu’il ne le paraissait.


Swann : de qui s’agit-il ?

Chloé n’attendit qu’un court instant. Si sa phrase précédente avait eu un tel impact, elle imaginait sans peine les conséquences de la prochaine. Ainsi, d’une voix égale elle répliqua :

Chloé : Kal-El …

Swann fut content d’être resté le dos tourné. Car, malgré son don pour dissimuler ses émotions il était certain que cette fois, son regard bleu pâle l’aurait trahi. Chloé était la première personne humaine, n’étant pas liée à la Prophétie, qui connaissait le nom Kryptonien de Clark. Comment l’avait-elle su, cela restait encore très mystérieux. Mais si elle connaissait son nom, travaillant pour Lex Luthor, il y avait fort à parier qu’elle connaissait d’autres éléments à son sujet. Il ne devait pas laisser entendre qu’il en savait plus qu’elle, peut être était cela, la finalité de sa venue ici, après tout.
Aussi, d’une voix calme et sans répliques, il répondit :


Swann : vous faites erreur, Mademoiselle Sullivan, je ne connais aucun Kal-El …

Chloé sentait déjà, pour la troisième fois consécutive, Swann commencer à lui filer entre les doigts. Ce nom il le connaissait, elle en était certaine. Elle l’avait appris de sources sûres : les siennes. Mais elle comprenait également qu’il veuille le nier. Après tout, une promesse était une promesse.
Elle accourut alors vers lui tandis qu’il faisait de nouveau avancer son fauteuil et s’arrêta juste derrière lui, avant de répliquer d’une voix engagée, toute aussi forte
.

Chloé : je sais qu’il vous a fait promettre de ne révéler ce secret à personne … je sais également que vous avez tenu cette promesse lors de votre entretien avec Lex Luthor, à Metropolis …

Swann s’effarait devant le nombre d’éléments que connaissait Chloé, au niveau du secret de Clark et des relations qu’avait Swann autour de lui. Mais jusqu’où savait-elle précisément ? Et plus important encore : que voulait-elle de plus ?
Il l’écouta donc continuer, en arrêtant son fauteuil pour la énième fois.


Chloé : (voix plus douce) Clark a une chance incroyable de vous avoir comme ami …

Le parallèle entre « Clark KENT » et « Kal-El » était un nouveau point important, que Chloé connaissait également. Plus la conversation avançait et plus Swann avait peur de la fin. Ce serait certainement quitte ou double.

Chloé : … surtout en ce moment. Lex ne cesse de se rapprocher de son secret. Je sais aussi que vous ne me révèlerez pas le destin qui les attend, l’un comme l’autre. … J’ai trop longtemps agi auprès de Lex Luthor en croyant qu’il était l’élu du bien. Maintenant, je crois, je suis même presque certaine du contraire. Mais j’ai besoin (elle insista précisément sur ce dernier mot) de savoir réellement … qui est qui ?

Swann fit enfin le lien, entre tous les éléments que connaissait Chloé et la raison qui devait l’amener ici. Elle connaissait désormais tout de Clark, de son véritable nom à la Prophétie des deux fils, en passant pour son lien avec lui, Virgil Swann. Mais le seul point qui lui restait obscure, et non des moindres, était de savoir qui était voué au bien et qui était destiné au mal. Sans ce paramètre, Chloé ne pourrait pas continuer dans sa rédemption.
Chloé avança d’un nouveau pas, voyant l’arrière de la tête de Swann avec un peu plus de précision et reprit une dernière fois la parole, dans sa longue tirade, pour finaliser ce qui l’amènerait peut être au but final, entrepris plusieurs mois auparavant.


Chloé : Docteur Swann … qui de Clark ou de Lex est le sauveur de la planète ?

Chloé vit alors juste devant elle, à à peine un mètre, le fauteuil de Virgil Swann pivoter sur sa droite, décrivant un demi-cercle révélant enfin la silhouette de l’astronome, assis confortablement dans son fauteuil. Ses deux mains posées sur chaque accoudoir, il arborait un sourire bienveillant accordé à un regard dur bien différents des signes qu’il avait adresser à la jeune Sullivan quelques minutes plus tôt. Chloé le regarda ainsi, appréhendant, pendant de très longues secondes, qui lui parurent réellement interminables. Puis, suite à cette attente horrible, il répliqua, simplement, d’une voix voluptueuse et délicate :

Swann : Clark deviendra le plus grand héros de tous les temps …

L’horreur traversa alors le visage jeune de Chloé. Elle comprit alors la grosse erreur, suivie de nombre d’autres aussi importantes, qu’elle avait commises ces derniers mois. Elle avait confondu Clark, son ami d’enfance avec Lex, le méchant de l’histoire. Grâce à son esprit de manipulation subtile, Lex avait réussi à convaincre Chloé que Clark avait une âme noire. Alors que c’était tout le contraire. Chloé n’avait eu un doute qu’au moment où Lex était ressorti du tombeau de Sethi, le matin même. Il était le mal absolu, réincarné dans une enveloppe charnelle à sa mesure.
Sentant à nouveau le rythme de son cœur accélérer, Chloé s’empresser d’ajouter d’une voix des plus anxieuse :


Chloé : dans ce cas, Clark court un grave danger !!!

Pourtant, malgré cette nouvelle révélation haute en gravité et en conséquences, Swann ne fit que ciller lentement, préservant ce sourire paternel et bienveillant qui lui allait tant. Il semblait ne pas être plus surpris que ça pour cette nouvelle phrase, aux nuances apeurées, prononcée par Chloé.

Swann : je le sais … mais je ne peux rien faire pour lui …

Dans ce cas, Clark était perdu. Chloé avait elle même travaillé à l’élaboration de ce projet et elle en connaissait les trois parties qui mèneraient à la perte de Clark. La première était imminente et si elle réussissait, annihilerait les deux suivantes. Avec l’intervention de l’allié de Lex, Clark n’aurait aucune chance.

Swann : mais vous, vous le pouvez !
Chloé : (effarée) moi ?! Mais comment ?! Lex est beaucoup trop fort !
Swann : (paternellement) vous le savez déjà, Mademoiselle Sullivan …

 

Dôme Artificiel – Hors de l’Espace – Hors du temps

Les doigts légèrement pliés, Jonathan voyait leur extrémité se rapprocher inexorablement de la surface plane, régulière de la sphère de lumière opaque, semblable à une bulle d’eau. Plus Jonathan gardait son regard bleu, dans lequel se reflétait la lumière blanche, braqué sur sa surface, plus il voyait avec précision ce qu’elle renfermait : cet entremêlement de mots Kryptoniens, de visages flous et de paroles incompréhensibles, comme perdues dans le néant. Cette vision, des plus attrayantes, semblait n’avoir qu’un objectif : le mener vers son propre destin.
Enfin, il vit ses doigts arriver au bord de la sphère et la peau l’effleurer, délicatement. Fermant les yeux, il fit entrer doucement ses doigts à l’intérieur, les tendant par réflexe. Il fut alors surpris de la sensation qui l’enveloppa. Une sorte de douceur inexplicable, faite de paix et d’harmonie, comme si sa structure n’avait rien de commun avec ce qu’elle paraissait. Jonathan avait l’impression de mettre les doigts dans une bulle d’eau tiède, à la différence près que le toucher de cette substance ne révélait rien de commun avec de l’eau. On aurait dit du gaz, sous forme de lumière. Et une lumière si éclatante, si envoûtante que n’importe qui, même l’homme le plus froid au monde, n’aurait pu y resister. Jonathan esquissa même un petit sourire, tant cette tiédeur provoquait une sensation agréable en lui. Il se sentait à nouveau en paix avec lui même. Mais il perdit rapidement son sourire. Non pas que l’envoutement se transformait en malédiction mais que son évolution surprenait Jonathan en plus hauts points. Une sorte de liquide, tout aussi tiède, peut être partie de l’intérieur de la sphère, se déposait à l’extrémité de ses doigts et, les recouvrant, remontait lentement vers le haut de sa main, tel un flot de liquide mobile. Intrigué, Jonathan rouvrit les yeux au moment où, selon sa sensation, le liquide arrivait au niveau de son poignet. Il se rendit alors compte qu’il n’était pas si loin de la vérité.
Lorsqu’il posa le bleu de ses yeux sur son avant-bras, dont la manche, inexplicablement, avait été retroussée, il vit que la même lumière opaque, presque translucide, recouvrait la totalité des doigts de sa main droite ainsi que toute la main. Une sorte de couche de lumière, dont la lumière du dôme se reflétait dedans, partait de la sphère, touchée par les doigts de Jonathan et se mettait rapidement à recouvrir tout son bras. La lumière arrivait déjà à son épaule. Jonathan écarquilla les yeux, affolé par ce qu’il voyait. Il voulut reculer de plusieurs pas, pour interrompre le phénomène mais rien à faire : une force surpuissante le retenait, le forçant à subir ce phénomène. Au moment où ses peurs alimentaient le rythme de son cœur de manière fulgurante, Jonathan entendit à nouveau la voix de Jor-El s’adresser à lui, mais résonnant étrangement, tandis que la lumière se séparait en deux, une partie descendant vers le bas de son corps et l’autre arrivant à la base de son cou.


Jor-El : n’ayez pas peur, Jonathan … la lumière fait partie du voyage …

Pourtant, cela ne rassura en rien Jonathan, les battements de son cœur demeurant palpables …
Toujours apeuré, appréhendant grandement ce qui allait suivre, Jonathan baissa des yeux ouvertement écarquillés vers son cou et vit ainsi, inéluctablement la lumière recouvrir toute la circonférence de son cou et amorcer une remonter vers le haut de son visage, en recouvrant son menton. La tiédeur et cette douceur sublimes, qui accompagnaient la lumière ne suffisaient plus à Jonathan pour se rassurer, se calme. Il sentait que Jor-El lui faisait quelque chose qui aurait de grosses conséquences. Et c’était précisément cet élément qui lui faisait le plus peur.
Il vit la lumière recouvrir ses lèvres crispées puis la peau séparant les lèvres de son nez. La lumière passa dans ses narines et sur le haut de son nez, remontant inlassablement vers ses yeux apeurés. La caméra fixa son gros plan sur les rétines bleutées, frappées d’effroi, de Jonathan, tandis que la lumière remontait vers le haut de son crâne. A cet instant, un flash lumineux d’une blancheur aveuglante fit disparaître le visage de Jonathan, à l’instant même où la caméra s’était avancé vers lui. Lorsque l’image redevint visible, la caméra effectuait un rapide travelling au dessus de ce qui ressemblait à la cervelle visqueuse de Jonathan, à l’intérieur de sa tête. La même lumière opaque, d’une consistance des plus étranges, recouvrait peu à peu le cortex de Jonathan, formant de demi-sphère qui s’apprêtaient à se rejoindre, au centre de la cervelle. A cet instant, lorsque les deux flots de lumière ne firent qu’un, une onde de lumière retentit et s’échappa tout autour de la tête de Jonathan, venant frappé leurs bords. La lumière en devint à nouveau aveuglante, empêchant quiconque de voir au travers de cette clarté le moindre petit détail aussi insignifiant soit il.
Lentement, Jonathan rouvrit les yeux, réalisant que la sensation de douceur, accompagné de cette température douce, s’était évaporée. Il fut surpris de constater le lieu dans lequel il se trouvait désormais. Une lumière éblouissante, de la même blancheur immaculée que celle du Dôme Artificiel enveloppait la salle, si tant est qu’il s’agisse d’une salle. Aucun des éléments n’auraient pu le confirmer pour la simple et bonne raison qu’aucun élément, hormis cette blancheur environnante, n’étaient présents ici-bas. Jonathan semblait flotter au milieu d’un océan de lumière céleste, à perte de vue, comme perdu dans l’espace-temps. Il finit par baisser les yeux, vers son corps, soucieux de savoir si la lumière l’avait quitté. Tel était le cas mais ce n’était pas la seule chose à avoir disparue de son corps. Sa chemise noire, au col remonté et son jean délavé avaient également disparus, remplacés par une grande toge blanche, semblable à celle de Jor-El, à la différence qu’aucun symbole n’y apparaissait.
Jonathan releva la tête, regardant à nouveau devant lui. Que lui avait fait Jor-El ? L’avait-il finalement envoyé dans un monde où le temps n’avait pas court et où il devrait finir des jours interminables ? A l’heure qu’il était, c’était la seule raison valable que Jonathan trouvait. Quand soudain, provenant de nulle part, une voix de femme, aux nuances résonnant étrangement, parvint jusqu’à ses oreilles, malgré le fait que personne ne se trouvait dans cette salle, à part lui.


« Et s’ils ne l’aimaient pas …? »

Cette voix, douce, cristalline, ensorcelante même par la bienveillance qu’elle renfermait, était inconnue aux yeux de Jonathan. Et pourtant, quelque chose en elle le forçait à sourire, comme si le seul timbre de sa voix ouvrait les portes d’un tout au monde auquel Jonathan avait toujours secrètement espéré appartenir. Souriant, il ferma à nouveau les yeux. Il sentit alors un souffle de vent, frais, lui procurant un bien inexplicable, lui fouetter le visage. Jonathan n’aurait su dire pourquoi mais ce vent, bien qu’il n’avait aucun lieu d’être, était réconfortant. Jonathan le sentit ensuite s’interrompre et sut alors qu’il était temps de rouvrir les yeux, ce qu’il fit.
Il remarqua alors immédiatement qu’il avait une nouvelle fois changé de lieu et qu’à nouveau, il ne connaissait pas ce lieu. Malgré la lumière blanche qui l’enveloppait, la salle renfermait une ambiance macabre, comme si l’on célébrait l’enterrement de quelqu’un de cher pour tous ceux qui était présent. Et en pensant cela, Jonathan n’était pas si loin du compte … La salle était construit de murs blancs éclatant, formant des parois arrondis, donnant un aspect post-moderne assez agréable. Le toit, bombé, semblait constitué d’un verre diaphane, assez flou, qui laissait entrevoir le ciel présent au dessus de la salle. Jonathan prit aussitôt conscience d’un élément qui changeait absolument tout : il n’était plus sur Terre. Le ciel abritait un cercle solaire rouge, d’une taille beaucoup plus importante que le soleil Terrien. La teinte orangée qui l’entourait semblait elle même modifiée, par rapport à ce qu’elle devait être d’habitude. Des traînées de fumées noirs le transperçaient, parts en parts, et l’assombrissaient de cette manières. Des roches enflammées, fonçant à la vitesse du son, entraient dans l’atmosphère et, suivant de cette enluminures de feu, venait frapper le sol bruyamment. Jonathan baissa les yeux et les reporta sur le reste de la salle. Il semblait observer la scène d’un coin de la salle, caché dans l’obscurité. Sur sa droite, à plusieurs mètres, se trouvait une foule de personnes, alignées les unes à côtés des autres. Il devait être une trentaine, peut être plus. Et chacun était vêtu de la même manière : une toge blanche très ample, recouvrant tout leur corps et un large capuchon dissimulant leur visage. Chacun avait les bras croisés sur le torse et observait quelque chose, ou quelqu’un, droit devant eux. Jonathan dévia donc son regard sur sa gauche, regardant ainsi droit devant lui.
Il comprit immédiatement l’intérêt qu’éprouvaient tous ces gens. Deux autres personnes étaient présentes, l’une à côté de l’autre. Tous deux vêtus d’une toge, ils avaient pourtant renoncé à recouvrir leur visage d’une capuche. La personne de gauche, habillée d’une toge bleue n’était autre que Jor-El, le père biologique de Clark. Le visage défait, attristé par ce qu’il s’apprêtait à faire, il ne pouvait plus quitter des yeux ce qui se trouvait devant lui. Serrant la main de sa femme, sur sa droite, il avait peur de faillir, au dernier moment. Pourtant, il savait pertinement qu’il n’en avait pas le droit. Outre la Prophétie qui devait se réaliser, c’était la vie de son fils qui était en jeu. Sur sa droite se trouvait Lara, lui tenant la main et elle même habillée d’une toge rouge. Elle semblait au bord des larmes et retenait ce moment terrible qui la hantait depuis si longtemps, depuis la naissance de Kal-El. Elle était magnifique avec ses longs cheveux noirs tombant sur ses minces épaules et son regard d’un bleu pur, ressortant au milieu de son visage chevalin. Pourtant, la brillance qui illuminait ses rétines ne trompaient personne. Jamais un tel désarroi ne s’était emparé de son être. Elle resserra à son tour un peu plus la main de son mari et intensifia son regard droit devant elle.
La caméra se plaça alors dans le dos des époux et s’éleva légèrement au dessus d’eux, de façon à filmer ce qui se trouvait devant eux. Il s’agissait d’un petit vaisseau spatial oval, d’un métal gris luisant très étrangement. Il flottait à plusieurs centimètres au dessus du sol, ainsi immobilisé. Son toit, formant un creux oblique, était resté ouvert et laissait voir dans la cavité, un bébé joyeux, habillé de draps dorés sublimes : Clark, bébé. La structure de l’intérieur du vaisseau était frappé de cercles de symboles Kryptoniens lumineux, l’enluminant. Kal-El s’esclaffa sous les yeux tristes de ses parents.


Jor-El : va mon fils …

Jor-El ; à contre-cœur, porta délicatement sa main gauche, la libre, vers le vaisseau et appuya sur une clé octogonale, encrée dans une serrure adéquate, dans le vaisseau. Aussitôt, une lumière dorée encadra la serrure et la clé et le vaisseau réagit. Tandis que Lara sentait une vague de larmes incontrôlable s’emparer d’elle, elle se blottit contre le flan de son mari et regarda le vaisseau s’élever lentement dans les airs. Dans le même temps, son toit reprit place, dans un entremêlant silencieux de métal, amenant Kal-El vers sa départ imminent. Le vaisseau continua de s’élever dans les airs, à 1 mètre, alors que le toit bombé se mettait à coulisser rapidement, en silence, comme si un flot de lumière s’écartait pour laisser passer le vaisseau. A cet instant, le bruit assourdissant des météorites frappant la planète se fit entendre dans toute son ampleur.
Le groupe de Kryptoniens, en toges blanches, les parents de Kal-El et Jonathan observèrent alors le vaisseau de Clark s’immobiliser dans les airs, à 3 mètres au dessus du sol. Quelques secondes plus tard, il démarrait en trombe, dans un bruit assourdissant, en direction de la Terre. Lara se laissa alors aller à ses larmes. Elle plongea dans les bras de son mari et se mit à pleurer dans le tissu léger et soyeux de sa toge, toutes les larmes de son corps.
La caméra suivit alors la course effrénée du vaisseau de Kal-El. Se plaçant juste au dessus de lui, elle filma ainsi, dans le même temps, la cité mère de Krypton, que survolait le vaisseau. Constituée dans sa totalité de hautes tours blanches certaines arrondies et basses, d’autres pointues et hautes, la cité avait des allures de rêve moderne. Sa blancheur éclatante, allié aux reflets rougeâtres de l’astre solaire, lui donnait vraiment un aspect paradisiaque. Et ce n’était pas l’océan à perte de vue, qui la bordait au sud, qui allait enlever une parcelle de son charme. Et pourtant, ce paradis n’allait bien plus n’être qu’un souvenir. Les météorites pleuvaient de partout, par milliers, créant des cratères ici et là, et imposant des explosions spectaculaires. Une vague de souffre arrivait à l’horizon de l’océan, ravageant au passage une pyramide blanche posée sur l’océan. La terre se fendait, au centre de la cité. Tout, sur Krypton allait sombrer. Tout. Elle emporterait ainsi avec elle l’une des civilisations les plus développées de l’univers.
Et soudain, l’image s’arrêta en une fraction de seconde, comme si le temps s’était figé. Le vaisseau de Kal-El restait en suspend au dessus de la cité, tandis que la vague de souffre entourait la pyramide de verre, sur l’océan. Des météorites étaient comme accrochées dans le ciel, la traînée de feu la suivant. La silhouette de Jonathan se pixellisa alors dans le ciel, aussi étrange que cela puisse paraître. Ainsi, il se vit apparaître à proximité du vaisseau de Kal-El, qui flottait en suspend. Jonathan baissa les yeux vers ses pieds, abasourdi de flotter ainsi dans les airs. Il regarda tout autour de lui, cherchant ce qui cochait. Jusqu’à ce que la voix de Jor-El se fasse entendre, venant de derrière lui.


Jor-El : Alehi est en train de sombrer …

Surpris, prenant quelque précautions par peur de se voir tomber vers la cité, Jonathan se retourna, délicatement et vit avec surprise que Jor-El était apparu derrière lui, tout il l’avait fait auparavant. Seulement, il ne semblait pas s’agir du Jor-El qui venait de laisser partir son fils. Non. Celui-ci était vêtu d’une toge blanche, avec ce 8 bleu, inscrit sur le tissu à hauteur du torse, ayant à coté un petit point identique. Il s’agissait certainement du Jor-El qui lui avait proposé ce voyage.
Jonathan, fronçant les sourcils, lui demanda alors, en baissant les yeux vers la cité, au bas :


Jonathan : Alehi ?

Jor-El esquissa un sourire. Evoquer ce nom ramenait de nombreux souvenirs, heureux comme malheureux, à la surface. Mais il était tellement doux, à l’oreille, qu’il adorait relatait son histoire.

Jor-El : c’était la cité-mère de Krypton …

Jonathan comprit immédiatement. Krypton ne devait pas avoir plusieurs nations, comme la Terre. Krypton devait être un monde coordonné parfaitement, par un seul pouvoir : soit une dictature, soit la plus belle démocratie jamais créée.

Jonathan : (soucieux) qu’est ce qui m’arrive ?
Jor-El : je viens de vous montrer le départ de Kal-El.
Jonathan : merci, j’avais bien compris … mais je ne comprends pas, quel intérêt de me le montrer ? Je sais déjà que Clark est parti de Krypton avant sa destruction !
Jor-El : votre confiance en moi est très fragile. Votre peuple est ainsi. Ses cultures sont basées sur le mensonge, la trahison et le faux-savoir … Votre méfiance st donc une qualité que j’apprécie. Mais pour aider Kal-El dans l’avenir qui l’attend, votre confiance en moi doit être totale. C’est pourquoi il est nécessaire que je vous montre tout ce qui a amené son destin prodigieux … Commençons par le commencement …

 

Dôme Artificiel - Hors de l'Espace - Hors du Temps

Jonathan sut avant même la fin des paroles de Jor-El que le monde qui l’entourait allait une nouvelle fois basculer. Ainsi, il vit le vaisseau, restant à côté de lui, repartir en arrière tout d’abord lentement avant de prendre un élan ahurissant. Jonathan le vit se poser dans la salle de son départ, tandis que lui revenait dans le coin sombre de la salle. A cet instant, le flot d’images accéléra encore nettement et Jonathan se rendit compte que de tous côtés, des images défilaient très vite, ne laissant que des traînées de couleurs derrières elles. Après d’interminables secondes, le phénomène s’interrompit. Un calme apaisant s’empara des sens de Jonathan tandis qu’une brise d’une fraîcheur agréable se mettait à lui caresser le visage. Il leva les yeux.
Son regard, partant du ras du sol, s’éleva lentement vers le ciel, à mesure que le bleu de ses yeux caressait la structure sans égal, se trouvant devant lui. Il s’agissait de ce dôme pyramidal d’un alliage d’une blancheur inégalable qu’avait Jonathan depuis le ciel d’Alehi, cette pyramide qui s’était vue enveloppée du mur de souffre. La surface de chacune de ses quatre parois blanches, obliques, était parfaite. Aucune anicroche, aucune trace du passé, du temps qui devait défiler depuis sa création antique. Il semblait parfait, comme un rêve devenu réalité. Le plus étrange restait certainement sa place. Malgré le poids énorme qu’elle devait faire, elle flottait comme si de rien était, à la surface de l’Océan immense, telle une immense bouée. Jonathan baissa les yeux vers la surface de l’eau et constata avec stupeur qu’il marchait à sa surface. Les fines vaguelettes traversaient ses jambes, devenant translucides à son contact et venaient frapper la surface solide de la pyramide.
Jonathan tourna la tête sur sa droite et vit que Jor-El était réapparu, le sourire aux lèvres.


Jonathan : qu’est ce que c’est ?

Jor-El prit un court instant d’un silence apaisant avant de répondre. Ce lieu était le plus mystique de Krypton et il était également l’origine de la destinée de Clark. Enfin, il prit sa voix la plus voilée possible et répondit :

Jor-El : c’est le dôme du Destin …
Jonathan : (surpris) le dôme du Destin ?
Jor-El : oui …

Jonathan ne quittait plus des yeux Jor-El, attendant la moindre révélation qui pourrait lui indiquer quelque chose sur l’avenir de son fils. Ainsi, il vit Jor-El lever lentement la tête, vers le sommet de le pyramide et figeait son regard à cet endroit. Alors, il reprit :

Jor-El : au jour de la 8e éclipse, la Prophétie des deux fils s’est inscrite d’elle même sur le verre du dôme, définissant ainsi l’avenir de la planète … selon la légende, ce sont Råo et Sethi eux mêmes qui l’ont écrites …
Jonathan : (ne comprenant pas) Råo et Sethi ?
Jor-El : les Dieux créateurs de Krypton …

Jonathan ne laissa rien paraître du peu de raison que lui inspirait un tel récit. Comme des dieux pouvaient créer une planète ? Mais peu lui importait. Il avait bien compris que Clark voyait sa destinée dicter par Jor-El. Et peut être que ses souhaits provenaient de cette prophétie ?
Voyant que Jor-El ne détachait pas son regard du sommet du dôme, Jonathan dévia son propre regard de Jor-El et leva à son tour la tête. Il comprit alors ce qui absorbait sa concentration : au dessus de la pyramide, dans le ciel, apparaissait un disque noir, entouré d’un liseré blanc ; une éclipse. Mais le plus effarant restait ses auras de lumières, qui divaguaient, aux aléas du vent, autour de l’éclipse. Il semblait y avoir trois couleur, bien distinctes : une bleue, une rouge et une jaune.


Jor-El : suivez-moi …

Jonathan baissa les yeux juste au moment où Jor-El se mettait à avancer, sur l’eau et où il traversa la paroi oblique blanche du dôme, comme s’il s’était agi d’un vulgaire mur de lumière. Jonathan ne cacha pas son effarement vis-à-vis de cet acte. « Suivez-moi ». Il aurait aimé lui répondre « d’accord, et il est où le mode d’emploi ? … voyons, article XIII-a : marcher sur l’eau ». Puis, il revint à la réalité. Il avait flotté dans les airs, vu des images défiler autour de lui … Aussi, d’un geste délicat, il souleva son pied de l’eau et l’avança devant lui. A sa grande surprise, Jonathan sentit un appui suffisant pour marcher. Il répéta son geste et s’arrêta devant la paroi oblique de la pyramide. Il prit une grande inspiration, ferma les yeux et avança de nouveau … Après trois pas, il les rouvrit et constata qu’il venait d’entrer dans un lieu qui lui était extrêmement familier.
Constitué d’une unique salle enveloppée de blanc, la salle ressemblait à s’y méprendre à celle dans laquelle s’étaient entretenus Jonathan et Jor-El, avant le début de son « voyage ». Jor-El l’attendait au centre de la salle. Entendant son pas résonner en écho dans toute la salle, Jonathan rejoignit Jor-El et se posta sur sa droite. Il attendit alors. Jor-El leva une nouvelle fois la tête et planta son regard sur le toit pointu.


Jor-El : vous allez pouvoir contempler le plus beau spectacle auquel vous sera jamais donné d’assister …

Jonathan avait des doutes quant aux affirmations du père biologique de son fils mais après tout, s’il le disait. Aussi, il leva la tête à son tour et regarda le sommet de la pyramide. A son grand étonnement, il se rendit compte que contrairement à l’extérieur, il était possible de voir au travers des parois comme s’il s’agissait d’un verre transparent. Ainsi, il vit nettement l’éclipse, dans le ciel sombre, auréolé de bleu, de rouge et de jaune. Mais le « spectacle » ne faisait que commencer. Un flot de lumière noire apparut à la pointe du sommet et, déversant une espèce de peinture noire luisante, la laissa couler sur chacune des parois de verre de la pyramide. Ainsi, après quelques secondes seulement, Jonathan vit les parois diaphanes viraient à un noir intarrissable. Même le sol immaculé vira à cette couleur, sous ses pieds.
Peu après, tout autour de lui, Jonathan vit des inscriptions blanches, Kryptoniennes, très variées, apparaître sur les parois sombres. Elles semblaient se graver dans l’alliage obscure d’une peinture blanche luisante, créant de très nombreuses colonnes de symboles. Jonathan tourna sur lui même, pour observer le phénomène sur chaque paroi : les colonnes s’inscrivaient simultanément. Il y en avait tellement. Des années de transcriptions. Il aurait tant aimé pouvoir les comprendre …


Jonathan : ces symboles … expliquent la destinée de Clark ?

Les colonnes de symboles, partant du haut des parois vers le bas, continuaient de s’inscrire, magnifiquement. Jor-El baissa les yeux un instant, cessant de les observer. Il esquissa un sourire.

Jor-El : entre autres …

Jonathan voulait savoir, il avait besoin de cette réponse. Après c’était pour ça qu’il était là.
Jor-El se retourna vers Jonathan et lui fit face, le regardant droit dans les yeux. La scène était superbe. Jonathan et Jor-El, les deux pères de Kal-El, face à face au centre du dôme, habillés de blanc, avec tout autour, sur les parois noires, la Prophétie de ce fils unique qui s’inscrivait.


Jor-El : cette Prophétie annonce la fin du monde Kryptonien … la seule manière qui lui soit possible de pérenniser et la destinée qui attend les deux fils sur la troisième planète …
Jonathan : (surpris) les deux fils ?
Jor-El : (calme) oui, les deux fils …

Jonathan comprit que Jor-El ne lui en dirait pas plus, à ce sujet. Mais il ne lui en voulait pas. Il était là pour Clark, et juste pour Clark. Si un autre Kryptonien était présent sur Terre, tant mieux pour lui.
Jor-El esquissa un nouveau rictus joyeux et tourna à nouveau le dos à Jonathan. Il s’éloigna de lui et marcha sur plusieurs mètres, sous l’œil attentif du père adoptif de Clark. Jor-El s’arrêta face à une paroi sombre, regardant les colonnes s’inscrire devant lui.


Jor-El : il faut que vous sachiez que le plan que j’ai mis en place n’a pas été créé par ma propre personne … ce sont les instances supérieurs qui nous l’ont dicté
Jonathan : Råo et Sethi ?

Jor-El esquissa un sourire, continuant de regarder la paroi.

Jor-El : oui …

Jonathan avait toujours un peu de mal à le croire, surtout en voyant la scène se dérouler sous ses yeux. Mais Clark était Kryptonien, il pouvait faire tant de choses alors pourquoi ses Dieux ne seraient ils pas eux aussi hors normes ?
Jonathan entendit un bruit de grincement aigu dans son dos. Surpris, il se retourna et baissa les yeux vers le sol noir, très dur et lisse. Ainsi, il vit apparaître en son centre un disque de lumière blanche, assez surprenant. Peu après, le grincement aigu s’intensifia et Jonathan assista à un nouveau phénomène inégalable. Un disque de métal blanc sortit du sol et, surmonté d’un pied cylindrique presque aussi large, s’éleva au dessus du sol jusqu’à s’arrêter à hauteur de 50 centimètres. Un promontoire pyramidale s’extirpa du métal blanc du disque et s’arrêta peu après. Un seul cercle de pierre blanche, plane, demeurait autour de la pyramide blanche présente au centre de ce socle. Tout autour, trois lueurs apparurent, à équi-distance : l’une bleue, la deuxième rouge et la dernière dorée. Une quatrième lueur apparut, d’une blancheur éblouissante, flottant à quelques millimètres au dessus du sommet du dôme pyramidal, au centre du socle. Captivé par la contemplation de ce spectacle, Jonathan s’avança lentement vers lui, lentement, jusqu’à s’arrêter juste devant. Les quatre lueurs se mirent à refléter sur son visage ébahi, tandis que leur intensité diminuait rapidement. Leur reflet apparaissait également dans le bleu clair des yeux de Jonathan … Et soudain, elles disparurent. La caméra tourna alors son plan vers le socle, révélant l’origine des lueurs. Une clé octogonale, celle du vaisseau de Kal-El , flottait dans les airs, à plat, juste au dessus du sommet de la pyramide, à la place de la lueur blanche. Et, tout autour de cette pyramide étaient placés des pierres pyramidales, à trois faces, aux lieux et places des trois autres lueurs, chacune d’elle encrée dans des cavités adéquates. Celle de gauche était de couleur noire et portait l’inscription représentant l’ESPOIR, de couleur argentée. Celle de droite étai transparente et comportait le symbole représentant le DIAPHANE en noir. Et la troisième, placée de l’autre coté de la table, était rouge et comportait le symbole représentant le SAVOIR, de couleur blanche.


Jonathan : (s’adressant à Jor-El) qu’est ce que c’est ?

Jor-El s’empressa de répondre à Jonathan d’une voix qu’il trouva subitement beaucoup plus proche que celle qu’il avait entendu quelques secondes plus tôt.

Jor-El : ce sont les cristaux du Destin, les trois pierres que doit réunir Kal-El …

Jonathan tourna vivement la tête vers sa droite et constata avec surprise que Jor-El se trouvait désormais à ses côtés. Mais Jonathan n’y prêta pas attention.

Jonathan : et à quoi servent-elles, ces pierres ?
Jor-El : la noire renferme les espoirs et les âmes de mon peuple … la blanche représente les pouvoirs des ancêtres de Kal-El et la rouge … la rouge renferme toutes nos connaissances …

Jor-El marqua une pause. Il dévia son regard de Jonathan, très attentif, vers le socle qu’il observa à son tour d’un regard extatique, comme s’il s’était agi du Graal.

Jor-El : une fois réunies, elle mène au temple de Kal-El édifié par son peuple …
Jonathan : à son temple ?

Jor-El se renfrogna soudainement. Cette question faisait battre son cœur d’une manière qu’il aurait préféré éviter.

Jor-El : il ne vous en a pas parlé ?
Jonathan : non …
Jor-El : sa part d’ombre est donc plus présente que je ne le pensais …

Jor-El baissa un instant les yeux, cette situation lui faisait plus mal qu’il ne voulait l’admettre. Son fils, l’espoir de tout son peuple, pouvait à tout moment céder au pouvoir sombre. Il espérait que cela n’arrive jamais, bien qu’une possibilité perdurait toujours.

Jor-El : ce temple est l’endroit où est renfermé ce qui a fait de Krypton son unité …le jour venu, Kal-El réunira les trois cristaux dans cet endroit bâti des années auparavant et choisira sa voie …

Jonathan posa une dernière fois son regard sur le socle, apercevant ces trois cristaux si précieux aux yeux de Jor-El. Et il y avait de quoi : ils étaient les seuls vestiges de Krypton, hormis ce temple.
Jonathan releva son regard droit devant lui, le portant sur la paroi noir, gravée de colonnes de symboles Kryptoniens blanc, lui faisant face à plusieurs mètres. Il était captivé par le phénomène, qui continuait d’évoluer. Les inscriptions continuaient. Et soudain, jaillissant d’un des symboles inscrits au centre de la paroi, représentant un grande cercle ainsi qu’un deuxième, beaucoup plus petit, accroché en dessous, s’illumina d’une blancheur éblouissante. La lumière gagna en intensité à la vitesse éclaire et bientôt, elle envahit la totalité du dôme du Destin et aveugla la vue de Jonathan. Celui-ci, sentant ses rétines oculaires le brûler amèrement, ferma les yeux et baissa la tête, avant de porter son bras droit en visière. Et malgré cela, un intense faisceau de lumière continuait de percer vers ses yeux, indiquant que sa puissance n’avait toujours pas diminuée.
Puis, sans signe avant-coureur, Jonathan se rendit compte que le faisceau se retirait, repartant en sens inverse. D’une attitude précautionneuse, Jonathan enleva son bras de son visage et se redressa. Il rouvrit les yeux et releva la tête, s’apercevant que la lumière avait disparue, ainsi que l’enceinte du dôme du destin. Il se trouvait désormais dans ce qui ressemblait à la pièce principale d’un grand appartement. De forme carrée, aux coins arrondis, elle était elle aussi, tout comme le dôme du Destin, constituée d’une paroi blanche éblouissante, immaculée de toute autre couleur. Sur la gauche, une parte bleue, d’un pâle allant à la perfection avec la couleur des lieux, fermait l’accès à la salle se trouvant derrière. La porte, translucide, était dépourvue de poignée et de serrure. Sur la droite, un autre accès menait à une autre salle. Il s’agissait d’une petite arche, peinte de trois couleurs distinctes, se mélangeant à leur jonction : le rouge, le bleu et le jaune. Des symboles Kryptoniens, de couleurs blanches, étaient inscrits sur toute la longueur de l’arche. Aucune porte, translucide ou non, ne fermait la sortie, permettant ainsi de voir une partie de la salle, éclairée d’une lumière dorée assez envoûtante. Et contre le mur du fond, très large, se trouvait un grand écran plat accroché audit mur. Un visage matérialise en son centre, se pixelisant de façon étrange. L’homme aux traits âgés devait avoir la quarantaine. Ses cheveux noirs coupés courts et la teinte obscures de ses yeux porcins auraient pu laisser croire à une âme maléfique si l’expression de son visage n’avaient pas exprimés une peur et un désarroi palpables. Regardant droit devant lui, l’homme semblait en proie à des doutes ultimes, à l’approche de l’échéance finale.
A un mètre devant lui, un autre homme se matérialisa, en une ombre tout d’abord floue. Puis, lentement, son corps apparut avec plus de précision avant que la silhouette d’un autre homme, la cinquantaine, ne se fasse violence à devenir vivant. Il était vêtu d’un pantalon de tissu léger bleu et d’un maillot sans manches, d’un rouge vif étonnant, mettant en valeur ses biceps. Il avait des cheveux grisonnants coupés courts et une attitude qui tendait à prouver que, tout comme son interlocuteur, il n’avait rien de mauvais. Il tenait dans ses mains une grande toge, en tissu blanc, froissé.
Le sourcils froncés, Jonathan avança de quelques pas et vint se placer sur la gauche de cet homme, qu’il avait l’impression de connaître. Il s’arrêta et écarquilla les yeux, surpris. Il s’agissait de Jor-El. Souriant, les yeux braqués sur l’écran, il enfila sa toge. Jonathan tourna la tête sur sa droite et vit un autre Jor-El , celui qui l’accompagnait dans son voyage, se tenir dans un coin, à observer la scène en silence. Jonathan reporta son regard sur le Jor-El face à l’écran et comprit que la technologie de Krypton était réellement impressionnante.
Le Jor-El face à l’écran, lui aussi marqué par les doutes, tentait néanmoins de rassurer son acolyte.


Jor-El : l’échéance approche, comme tu le sais. Les principaux obstacles sont derrière nous et j’aimerais pouvoir te dire que tout se passera bien mais, moi même, j’essaie de m’en persuader !

L’homme, sur l’écran, effectua une moue de dépit. Jor-El semblait aussi désemparé que lui et, intérieurement, il était certain qu’il l’était même plus que lui, c’était de son fils qu’il s’agissait. Mais il ne put s’empêcher d’ajouter :

???: parfois, je me demande si Råo a élaboré toutes les conséquences de cette Prophétie !

Jor-El, qui remettait correctement son capuchon sur sa nuque, interrompit son geste.

Jor-El : Yen-Al, tu sais, les Dieux ont beau être des dieux, ils n’en demeurent pas moins Kryptoniens … J’ai foi en eux et je sais que tout ira bien …
Yen-Al : et si la troisième planète ne l’acceptait pas ! Si finalement, ils réussissaient à le tuer !
Jor-El : le peuple de la Terre n’est certainement pas le plus méritant mais ils ont un grand cœur. Certaines de leurs pulsions malsaines les poussent à agir dans le mauvais chemin mais je sais qu’avec un sauveur comme Kal-El, leur planète peut devenir un monde aussi bon que Krypton …

Une fois de plus, Jonathan voyait une facette de Jor-El qu’il ne connaissait pas. Le message dans le vaisseau de Clark, disait pourtant : « Cette race est faible. Tu les gouverneras pas la force ». Et ce Jor-El, devant ses yeux, montrait la foi qu’il avait en ce peuple « faible ». Il semblait leur porter une sympathie extrême.
Sur la droite de Jor-El, des bruits de pas se firent entendre. Il tourna la tête dans cette direction, attirée par ce bruit. Yen-Al, sur l’écran, en fit autant ainsi que Jonathan et le Jor-El resté en retrait de la scène. Peu après, une femme habillée d’une toge blanche sortit de la salle, traversant l’entrée. Ses longs cheveux noirs étaient relevés en un chignon, mettant en valeur ses yeux bleus d’une clarté étonnante. Son sourire, si ensorcelant, était pourtant inexistant. Un masque de froideur enveloppait les traits de son visage. Elle tenait dans ses bras un bébé de trois ans, enveloppé dans un drap en soie luisante, de couleur dorée. Lara, la mère biologique de Clark, vint jusqu’à Jor-El qui, souriant, lui tendait le bras. Elle vint jusqu’à sa droite et, se forçant à sourire à Yen-Al, vint se blottir contre le flanc droit de son mari. Ce dernier, radieux, passa son bras dans le dos de sa femme et posa sa main sur sa hanche. Il baissa la tête et posa son regard bleu sur son fils, Kal-El, dans les bras de Lara. En voyant Yen-Al, sur l’écran, le jeune Kal-El s’esclaffa joyeusement. Yen-Al retrouva son sourire charmeur.


Yen-Al : mais c’est notre jeune élu … Kal-El …

A ces mots, Lara perdit un peu plus de sa joie. Les paroles de Yen-Al étaient précisément celles à éviter. Le Kryptonien, relevant la tête de Kal-El , adressa un sourire poli à Lara.

Yen-Al : Lara …

La jeune femme se força à sourire, ne voulant pas manquer de respect à leur ami d’enfance. Mais elle reprit bien rapidement ce masque froid qu’elle portait depuis de longues journées.
Jor-El, lui, avait à nouveau baissé le regard vers son fils. Levant les yeux vers son père, Kal-El laissa un nouveau rire des plus joyeux sortir de sa bouche. Ceci suffit à Jor-El pour sourire radieusement.
Il finit par relever la tête vers l’écran et adressa ces mots solennels à son ami :


Jor-El : je me dépêche …

Yen-Al acquiesça d’un abaissement de la tête, fermant les yeux. L’instant suivant, la communication était coupée. Le visage de Yen-Al disparut au profit d’un fond d’un bleu dur, parcouru d’une bannière défilante, en plein centre, marqué d’une ligne de symboles Kryptoniens blancs. Jor-El se détourna de l’écran et se tourna à nouveau vers son fils. Il enleva son bras du dos de Lara et se pencha vers son fils, un sourire radieux accroché à ses fines lèvres.

Jor-El : Bonjour, toi !

Une nouvelle fois, Kal-El s’esclaffa, éclatant littéralement de rire. Jor-El tendit les mains vers lui et prit le bébé des bras de Lara, souriant. Cette dernière ne lui adressa pas le moindre regard, visiblement furieuse. Tandis que Jor-El hissait son fils dans le creux de ses bras, sa femme le contourna et fonça vers Jonathan. Celui-ci eut la désagréable surprise de voir et de sentir Lara lui passer au travers, tel un spectre. Il se retourna, alors qu’un bruit de coulissement sourd et très rapide se faisait entendre. Lara avait disparue derrière la porte translucide.
Le Jor-El qui tenait Kal-El, attristé par son attitude, leva les yeux de son fils et les posa sur Jonathan, qui venait de se retourner. Jor-El le regardait profondément, comme s’il voyait au travers de lui. Jonathan le vit avancer vers lui, Kal-El dans ses bras et n’eut pas le temps de réagir : il sentit à nouveau un corps lui passer désagréablement au travers. Un nouveau bruit de coulissement rapidement se fit entendre. Jonathan se retourna : Jor-El était dans l’autre pièce. Décidément, son excursion dans le monde de Krypton lui donnait de curieuses facultés.
Et il commençait à les comprendre, une à une. Si les personnes « physiques » pouvaient le traverser alors, il pouvait certainement traverser les personnes physiques, ainsi que les objets. Aussi, sans attendre son guide, il se retourna et avança vers la paroi translucide de la porte, comme il l’avait fait pour la paroi oblique du dôme du Destin. Ainsi, sans anicroche, il la traversa et pénétra dans ce qui ressemblait à l’espace d’une petite cuisine, en largeur. Au centre se trouvait une plaque de verre diaphane, flottant dans les airs à mi-hauteur. Tout autour de la salle étaient visibles des sortes de demi-bulles, en verre transparent, accrochés aux différentes parois murales : il devait s’agir du mobilier. De l’autre côté de la table, Lara se tenait, bras tendu contre le mur, tête baissée vers le sol. Son malheur, ses peurs accumulées, semblaient refaire surface dans toute leur intensité. Jor-El, debout derrière elle, Kal-El dans ses bras, semblait très touchée par son attitude. Il détestait par dessus tout la voir dans cet état. Une nouvelle facette de cet homme que Jonathan avait jadis considéré comme un tyran sans pitié.


Jor-El : (voix douce et compatissante) Lara, qu’est ce que tu as ?

La réponse de Lara ne se fit pas attendre. Cependant, le ton qu’elle emprunta fut très éloigné de cette voix veloutée qui était d’ordinaire la sienne. Une colère incommensurable ne peignait chaque nuance.

Lara : ne fais pas l’innocent, Jor ! Tu sais exactement ce que j’ai !!

Jor-El fit une curieuse moue, de dépit. Comment n’avait-il pas pu comprendre de quoi il s’agissait ? C’était pourtant évident. Jours et nuits Lara était tiraillait par ce sentiment d’impuissance, de douleur éternelle qui la rongeait de l’intérieur. Son fils allait devoir la quitter, définitivement malgré l’amour éperdu qu’elle éprouvait pour lui, rien ne changerait cela. Leur destinée était prédite à être séparées, à tout jamais.

Jor-El : Lara, on en a déjà parlé … on ne peut aller contre la volonté des Dieux !

Mais la réaction de Lara fut encore plus vive. En une seconde, elle se retourna vers son mari et, le visage crispé par la fureur qui s’échappait de son corps, elle lui répliqua de cette voix forte, pourtant sur laquelle la tristesse prenait le pas sur la colère. Le ton diminua, à mesure que les mots sortaient de sa bouche jusqu’à ce qu’elle ne fasse que murmurer, les yeux embués de larmes.

Lara : On a ... toujours … le choix ! … c’est de notre fils … que tu parles …

Jor-El sentit lui même cette horrible sensation de frustration, de désarroi enfouis au plus profond de lui même. Ce sentiment d’injustice envers des instances supérieurs qui avaient décidés que Krypton serait détruite et que leur fils, Kal-El, serait envoyé à des années lumières de sa planète natale sous prétexte d’assurer la pérennité de Krypton. Il aurait aimé pouvoir dire que Kal-El resterait ici et mourrait dans leurs bras. Mais c’était impossible. D’une la Prophétie devait s’accomplir, non seulement pour la survie de Krypton mais aussi pour celle de la Terre mais surtout, surtout, pour épargner la vie de son fils unique.

Jor-El : Lara, crois-moi, rien ne m’a été plus difficile, dans toute ma vie, tu m’entends ?Dans toute ma vie, que de prendre la décision de me séparer de mon fils ! … Kal-El et toi êtes tous ce que j’ai de meilleur dans ce monde ! …Mais s’il ne part pas, il mourra, comme toi, comme moi …

Jor-El, le regard mêlé dans celui, embué de larme de sa femme, vit une larme déborder de l’œil droit de Lara et couler, délicatement, sur sa joue douce. Il se rapprocha un peu plus d’elle. Kal-El s’était calmé, comme touché par les paroles touchantes de son père.

Jor-El : au lieu de ça, il pourra grandir et être aimé là-bas, comme il l’était ici. Il pourra même faire mieux … il saura éradiquer le mal de la troisième planète … tu entends ? Ton fils sera un véritable sauveur …

Ces mots résonnèrent dans la tête de Jonathan comme une révélation enfouie dans sa tête depuis le jour où, en plein milieu d’une pluie de météorites destructrice, il avait trouvé Clark, au beau milieu d’un champs, à côté de son vaisseau. Dès l’instant où le premier pouvoir de Clark s’était manifesté il l’avait su : son fils deviendrait un sauveur.
Tenant toujours Kal-El d’un bras, Jor-El amena son autre bras, le gauche, vers le dos de Lara et, posant sa main sur l’arrière de sa tête, l’amena délicatement contre lui. Kal-El, entre eux deux, amusé par la situation, éclata une nouvelle fois de rire, tandis que sa mère laissait une nouvelle larme ruisseler le long de sa joue. Elle entoura ses bras autour de la taille de Jor-El et lia ses mains dans le bas de son dos. Jor-El plaça sa tête sur l’épaule de sa femme, regardant droit devant lui, lui aussi les yeux embués de larmes. Lara baissa la tête vers son fils, Kal-El, qui la regardait en souriant.


Jor-El : (plus bas) ton fils sera un sauveur …

Ces mots se répercutèrent en écho, dans la tête de Jonathan, alors qu’il voyait la famille El, pour la dernière fois réunie. Il ressentait tout ce désarroi implacable qu’avaient ressenti les parents biologiques de Clark, cette haine envers l’injustice qu’il l’avait arraché à eux.
Soudain, une aura de lumière blanche enveloppa Jonathan, le forçant à fermer les yeux. Il se sentit quitter terre et sut qu’il allait une nouvelle fois changer d’endroit.
Il sentit de nouveau de douceur, tiède et enivrante, recouvrir tout son corps, comme si une chute d’eau coulait lentement sur le haut de sa tête et ruisselait, d’une délicatesse éperdue, tout le long de son corps, traversant le tissu léger de sa toge. « Quelle sensation ensorcelante ! », pensa une nouvelle fois Jonathan. Il aurait aimé que son pouvoir dura éternellement, que cette douceur ne cessa pas de vagabonder sur tout son corps à nu. Une paix étonnante, semblable à celle qui devait occuper le paradis, l’accompagnait, pouvant apaiser le plus sombre des esprits. Une paix qui, cependant, ne suffisait pas à faire disparaître ce souvenir, d’une famille déchirée pour une destinée décidée par une instance supérieure.
Et, tout aussi subitement, la sensation s’interrompit. Jonathan se sentit à nouveau lui, dénué de toutes sensations douces. Il rouvrit les yeux. Le blanc immaculé avait repris place autour de lui. Cette lumière céleste, dépourvue de toute structure. Jonathan, à nouveau vêtu de cette longue toge blanche, semblait flotter au milieu de nulle part, dans un océan de clarté éblouissante. Il était à nouveau esseulé, sans accroche extérieur ou sociale. Seul son esprit semblait exister dans ce lieu épargné de toute notion de temps et d’espace.
Jonathan commença à tourner en cercle, tout autour de lui, à la recherche de Jor-El, qui ne devait pas être loin. Il ne laisserait pas seul, dans cette étendue de souvenirs qui n’avait rien à voir avec lui, Jonathan Kent, simple père adoptif d’un jeune homme unique au monde.
Un faible râle de vent s’éleva, derrière Jonathan et frappa le tissu léger de sa toge, qui se colla à la peau de son dos sous son effet. Jonathan fit volte face et vit Jor-El, dans sa magnifique toge blanche, lui faire face. Les bras croisés dans ses manches amples, il regardait Jonathan le sourire aux lèvres, son regard bleu azur exprimant une bienveillance sans égales. Jonathan, se calmant un peu après ce court moment d’inquiétude, posa la question qui le travaillait depuis le début de ce voyage.


Jonathan : pourquoi me montrez-vous tout cela ?
Jor-El : je veux vous montrer ce pour quoi la destinée de Kal-El doit être accomplie …

Mais Jonathan pensa très fortement, pour que Jor-El capte au mieux ses pensées, que ce projet n’était pas une réussite. On pouvait même appeler cela un échec cuisant. Jusqu’à maintenant, il avait juste montré à Jonathan la manière dont la Prophétie expliquant la destruction de Krypton était apparue. Jonathan compatissait à l’égard de Jor-El, désormais, et il avait envie de faire en sorte que son sacrifice, ainsi que celui de sa femme, n’étaient pas vain. Certes, l’apparition de ces étranges cristaux et de la clé octogonale était intrigante, mais il ne voyait pas en quoi cela prouvait que Clark devait acquérir cet « héritage ».

Jonathan : je ne vois pas en quoi il doit réunir ces cristaux !
Jor-El : une fois réunies, les trois pierres du Destin apporteront à Kal-El le savoir qui lui sera nécessaire pour éradiquer la plus grande menace pouvant détruire la troisième planète.

Jonathan avait peur de ne pas saisir tout à fait les propos prononcés par le père biologique de Clark. Aussi, fronçant les sourcils en signe de mauvaise compréhension, il répliqua :

Jonathan : c’est de la Terre que vous parlez ?

Sans un sourire, Jor-El fit oui de la tête, en l’abaissant légèrement. Puis, il reprit la parole d’une voix sombre, laissant présager des mots ouvertement obscures.

Jor-El : une force maléfique guette le moment d’intervenir. Sans ce savoir, Kal-El ne sera jamais apte à la détruire.

Jonathan prenait subitement conscience de ce que révélait Jor-El. Visiblement, un « homme » était tapi dans l’ombre, sur la Terre, attendant son heure. Et le moment venu, il aurait les moyens de répandre le mal absolu. Peut être était-ce là l’origine de la légende Shamane, inscrite dans les grottes Kawache ?

Jonathan : de qui s’agit-il ?
Jor-El : je vais vous montrer …

 

Dôme Artificiel - Hors de l'Espace - Hors du temps

Jonathan sentit à nouveau cette aura lumineuse, d’une blancheur totale, lui caresser le visage alors qu’elle s’étendait à tout son corps. Une lueur céleste devenue habituelle, une lueur qui, d’un phénomène que Jonathan n’aurait jamais su exister, le mènerait vers un tout autre souvenir, intégré au monde antique de Krypton.
Jonathan rouvrit enfin les yeux, le sourire figé sur ses lèvres après avoir à nouveau cette douceur sur sa peau. Il perdit bien vite ce rictus élargi, découvrant ses dents blanches. Ce qui se trouvait devant ses yeux lui procurait, étrangement, une sensation apeurée dans tout son être. Peut être dû au fait que la salle, devant lui, lui faisait amèrement penser à une de ces sectes impensables, si nombreuses sur Terre.
Il s’agissait en fait d’une petite salle circulaire construite, comme toutes les salles de Krypton, de cet alliage d’une blancheur immaculée. Au fond, une baie vitrée, à l’aspect translucide, donnait au dehors de cette salle. Elle devait être située au sommet d’une de ses immenses tours blanches, caractérisant la cité d’Alehi. Ainsi, au travers du verre apparaissaient de nombreuses autres tours blanches, présentes autour de la tour dans laquelle se trouvait Jonathan. Il porta ensuite son regard juste devant lui, analysant la salle elle même.
Au centre, sur le sol blanc d’une platitude sans équivoque, était placardé un grand symbole Kryptonien doré, représentant le « Destin ». L’entourant, un long bureau blanc, en demi-cercle, était installé remplissant ainsi tout l’espace de cette pièce étroite. Derrière ce bureau, posés à équidistance, se trouvaient cinq petits sièges blancs, à la structure bombée et creusée. Quatre d’entre eux étaient occupés, par les membres de ce qui ressemblait à un conseil. Seul celui, à l’extrême gauche, restait vide. Et c’était précisément ces personnes, présentes derrière le long bureau, qui inspiraient à Jonathan cette comparaison à une secte. Chacun d’eux était vêtu d’une grande toge en tissu ample, de couleur blanche, couvrant la totalité de leur corps. Leurs bras étaient croisés dans leurs manches et leur visage, dissimulé par un large capuchon, resté braqué droit devant eux, comme s’il regardait le mur, derrière Jonathan. Seul celui du centre, était vêtu d’une toge couleur dorée, le différenciant ainsi de ses acolytes. Une ambiance calme mais stressante baignait la salle, Jonathan n’aimait vraiment cette sensation. Comme si quelque chose d’important était sur le point de se passer. Qu’attendaient-ils tous, dans cette position ? Ou peut être, qui attendaient-ils ?
Et soudain, en plein centre de la salle, une lueur bleue, pure et envahissante, apparut au dessus de la marque du Destin, portant chacune de ses lueurs tout autour d’elle, se reflétant ainsi sur les murs magnifique, sur le bureau et sur chacune des tuniques des membres du conseil. Pourtant, aucun d’eux ne fit le moindre geste, signifiant une quelconque gêne. Non. Ils restaient parfaitement immobiles, face à cette lueur si aveuglante. Bientôt, sa puissance commença à s’atténuer tandis que son origine se centrait vers la mi-hauteur, cessant de se répandre autour de cette sphère lumineuse, désormais présente à quelques dizaines de centimètres au dessus du sol. Partant d’elle, des branches de la lumière bleutée la quittèrent et, en des gestes amples plutôt imprécis, se mirent à vaciller, de haut en bas, comme pour tracer une forme, floue. Les branches, semblable à des fins filets de fumée bleutée, se décuplèrent rapidement et bientôt, la structure de ce qui ressemblait à un corps put être identifié, tandis que la lumière bleue de la sphère, flottant à mi-hauteur, devenait peu à peu translucide, se teintant de la même couleur que ces branches, qui dessinaient cette silhouette floue. Un soudain flash lumineux, d’un bleu aveuglant, s’échappa de ce qui restait de la sphère lumineuse et, l’instant d’après, lorsqu’il fut à nouveau possible de distinguer les éléments de la salle, Jonathan put constater qu’une cinquième personne venait d’apparaître en lieu et place de la silhouette diaphane bleue : il s’agissait d’un homme d’un mètre quatre-vingt environ, habillé lui aussi d’une grande toge blanche. Seulement, le capuchon de recouvrait pas sa tête. Si bien que sa nuque à nue était visible ainsi que l’arrière de sa tête, pourvu de courts cheveux grisonnants. Lui aussi semblait avoir les bras croisés, bien que le fait de la voir de dos n’affirmait rien de bien précis. C’est alors qu’une voix s’éleva, appartenant à l’homme vêtu de la tunique or. Une voix grave, dur et empli de charisme. Un ton qui ne présageait rien de très enjoué, un ton implacable contre lequel il valait mieux ne pas lutter avec trop d’insistance.


???: tu es en retard …

L’homme, devant Jonathan, figée sur la marque du « Destin », semblait assez confiant. Malgré le ton froid et agacé de son interlocuteur, il n’avait pas l’intention de se laisser marcher sur les pieds. La caméra tourna autour de lui, sur sa gauche et se plaça de côté, filmant son visage d’un plan oblique. Elle révéla ainsi son visage : celui de Jor-El. Son expression fermée et son regard bleu, d’un froid implacable montraient bien que cet homme, face à lui, ne l’impressionnait nullement. Mais il ne devait pas se tromper d’ennemi.
Aussi, perdant un peu de la froideur métallique qui étirait ses traits, il répliqua, baissant les yeux :


Jor-El : oui, je sais … une crise familiale …

La vaste capuche doré, dont les plis tombaient sur les épaules du Kryptonien du centre sembla tressaillir à cette excuse, comme si sa tête avait tremblé après ces mots. Malgré l’ombre intense qui couvrait son visage, dissimulant des traits flous, Jor-El identifia cela comme une inquiétude certaine. La phrase qui suivit encouragea ce sentiment.

???: rien de grave ?

Jor-El eut un curieux rictus, comme si ces doutes le faisaient rire. Alors que c’était tout le contraire. Il n’avait aucune confiance en cet homme qui dirigeait pourtant l’opération qui ferait de son fils un sauveur. Peut être parce qu’il avait été le mentor du Kryptonien le plus redouté de tous les temps. En tous les cas, il ne parvenait pas à dissiper cette répugnance qu’il lui inspirait.

Jor-El : non … mais Lara s’inquiète …

L’homme en tunique dorée baissa légèrement la tête. Jor-El était surpris par son attitude, d’ordinaire dénuée du moindre sentiment, ce qui n’était pas pour accentuer l’estime que Jor-El lui portait. Mais ce dernier dut admettre, à contre-cœur, que les mots qu’il prononça ensuite semblaient plutôt sincères.

???: je la comprends … envoyer son fils à des années lumière de sa planète natale doit être une décision atroce à prendre …

Jor-El laissa un instant sa surprise se manifester, regardant l’ombre sur le visage de cet homme qu’il haïssait plus que tout au monde. Jouait-il la sympathie ou était-il réellement sincère ? Il n’aurait su le dire.
Aussi, reprenant la parole sur un ton plus doux, exprimant ouvertement ses soupçons, Jor-El lui fit :


Jor-El : oui … (rehaussant le ton) mais le destin qui l’attend vaut bien ces sacrifices …

Jor-El aurait aimé croire à ses propres paroles mais c’était très loin d’être le cas. En fait, malgré ce qu’il faisait croire à tout le monde, y compris à Lara, il avait peur de craquer au moment du départ de son fils. Après tout, il n’était qu’un Kryptonien. La souffrance ne lui était pas étrangère et il la sentait sommeiller au fond de lui-même, menaçant de faire surface à tout moment et d’éclater dans toute son intensité. Il espérait juste que ce moment arriverait au plus tard ; lorsque le vaisseau de Kal-El survolerait Alehi.

???: installes-toi, Jor-El …

En signe de respect, Jor-El acquiesça d’un timide abaissement de la tête, fermant les yeux. Il releva la tête lentement, rouvrant les yeux et observant un nouvel instant ce visage ombré, qui pouvait coûter tant à son fils. Anah-Ven, car tel était son nom, souhait un tout autre avenir que celui d’un sauveur pour Kal-El. Seul Jor-El l’avait découvert et il avait orchestré un plan, minutieux et secret, pour permettre à son fils d’y échapper. Il espérait juste que cela suffirait. Il avait foi en son fils et était certain que sa véritable nature serait la plus forte. Pourvu que cela soit le cas …
Jor-El enleva sa main droite de son autre bras, révélant ce qu’il tenait jusqu’alors : une sorte de bracelet métallique, de couleur noire luisante. Une plaque bleue, posée dessus, brillait étrangement. Jor-El décroisa ses bras, ne se préoccupant pas de ce mode de téléportation et amena ses mains aux rebords de sa capuche, posée sur sa nuque. Il la releva et, se tournant vers sa gauche, l’enfila sur sa tête. Il contourna le coin du bureau blanc et s’installa dans son fauteuil, très peu confortable. Jonathan le vit alors se figer sur place, tandis qu’il ne semblait pas encore complètement installé. Tout, dans cette salle, de Jor-El à Anah-Ven, en passant par les vaisseaux spatiaux, passant au ras de la baie vitrée, au fond, semblaient s’être figé.
A ce moment, le Jor-El présent sur sa droite, celui qui le guidait depuis le début dans son voyage, s’avança de plusieurs pas et passa devant un Jonathan qui n’y comprenait plus rien. Jor-El avança ainsi jusqu’au centre de la salle et se plaça sur la marque du « Destin », à l’endroit même où s’était tenu son double juste avant lui. Après quelques secondes durant lesquelles il contempla le conseil, le regard de Jonathan braqué dans son dos, Jor-El se retourna et adressa à son « ami », un regard bleu plus froid qu’à l’habitude.


Jor-El : connaissez-vous ces personnes ?

Sans que l’idée ne passa par son cerveau, Jonathan articula, de ses fines lèvres :

Jonathan : non.

Jor-El n’en était pas surpris le moins du monde. Comment aurait-il pu en être autrement. Il poursuivit son exposé d’une voix posée résonnant en écho étrangement.

Jor-El : ils composaient le Conseil d’Alehi … leur rôle était à la fois simple et indispensable …

Jor-El marqua une pause, laissant sa phrase en suspend. Jonathan savait très bien ce qui allait suivre, ce Conseil était l’aboutissement logique de ces souvenirs que lui avait montré Jor-El. Quel aurait pu être son autre rôle ? Il l’écouta ainsi transposer à l’oral ce que son esprit pensait si puissamment.

Jor-El : … organiser le destin sans équivoque de mon fils …

Jonathan sourit en entendant les paroles du père biologique de son propre fils. Lorsque celui-ci avait prononcé les mots « mon fils », Jonathan avait entendu « votre fils ». Car oui, il s’agissait de son fils, Clark Kent, élevé comme n’importe lequel des terriens mais promis à un destin hors du commun. Jonathan comprenait maintenant combien devait être importante la portée de cette destinée. Sinon, pourquoi tant de personnes se seraient affairés à l’organiser, dans la minutie la plus aiguë ? Il était fier de ce petit garçon qu’il avait aidé à devenir un homme. Il était fier de faire partie de la vie de celui qui resterait à jamais sauveur, à ses yeux.
Jor-El tourna le dos à Jonathan, pivotant sur lui même et porta son regard à son double, en train de s’installer sur l’extrême gauche du bureau.


Jor-El : cinq membres le composaient … moi, Jor-El, père biologique de Kal-El et représentant de ses intérêts …

Jor-El marqua une pause. Jusque là, Jonathan suivait parfaitement. Avant son voyage, Jonathan aurait mis sa main à couper que le père de Clark était le seul maître d’orchestre de la Destinée de son fils. Mais ce ne semblait pas être le cas, loin de là.
Jor-El dévia son regard sur l’homme, sur la gauche du Jor-El au bureau et reprit :


Jor-El : … Yen-Al, que vous avez vu tout à l’heure me parler … Il était le dernier prophète de Krypton. C’est lui qui a su précisément comment faire pour éviter à Kal-El de tomber en de mauvaises mains. En d’autres termes, c’est lui, avec ma suggestion, qui vous a choisi, Martha et vous …

Jonathan écarquilla les yeux. Pour une révélation, c’était vraiment une grosse révélation ! Jonathan avait toujours cru avoir trouver Clark par pur hasard, un don du ciel dans un certain sens. Mais cela ne semblait pas être le cas. Jor-El avait choisi Jonathan pour élever son fils, signe d’une confiance sans égal.

Jonathan : (abasourdi) vous nous avez … choisi ?
Jor-El : (sans regarder Jonathan, souriant) oui …

Jor-El imposa de nouvelle secondes silencieuses avant de se tourner vers l’homme du centre, le dénommé Anah-Ven. Jonathan, par ce phénomène étrange qu’il ne comprenait toujours pas, ressentit de nouveau cette haine qui se manifestait en Jor-El, chaque fois qu’il faisait face à ce Kryptonien. Il le détestait au plus haut point, c’était une certitude. Et la voix dure, plus froid qu’auparavant que prit Jor-El, ne fut pas pour déformer ces dires.

Jor-El : Anah-Ven était le Grand Maître du conseil, un peu votre président … c’est lui qui a tout organisé, du début à la fin. Il avait accès à des éléments que personne d’autre ne pouvait voir …

Et visiblement, cela inspirait en Jor-El un désarroi mêlée à une furie qu’aucun mot n’aurait su exprimer. S’il avait pu, Jonathan était certain qu’il aurait utilisé ses pouvoirs pour pulvériser ce dénommé Anah-Ven. Mais qui était-il ? Pourquoi lui en voulait-il autant ?
Jor-El porta son attention sur la personne au corps mince, plus que les autres, présente sur la gauche d’Anah-Ven.


Jor-El : Ira-Is … responsable des relations inter-planètaires et lien avec le peuple des Kawache, de la cité d’arrivée de Kal-El …

Une nouvelle fois, Jor-El apprenait un élément des plus importants à Jonathan. Les Kryptoniens avaient donc été liés, d’une façon ou d’une autre, avec le peuple des Kawache. Cela expliquait beaucoup de choses : la légende inscrite sur les parois de la grotte, l’esprit de Lara incarné en Kaliya et l’esprit de Jor-El enfermé dans ces grottes … Rien avait laissé au hasard, rien.
Jor-El porta son regard bleu, devenu vide de toute expression après le passage sur la silhouette de Anah-Ven, vers l’ultime membre du conseil, assis à l’extrême droite du bureau.


Jor-El : et enfin, Ava-El … mon frère et guide de Kal-El durant son voyage formateur …

Jonathan fronça alors les sourcils, en entendant ce nom, « Ava-El ». Il était certain de l’avoir déjà entendu, peut être de la bouche de son fils. Il n’aurait su dire quand et pour quelle raison mais il était certain de le connaître, d’une manière ou d’une autre.

Jonathan : Ava-El ? Qui est-ce ?

Toujours le dos tourné au père adoptif de son fils, Jor-El esquissa un large sourire. Oui, Jonathan le connaissait, il ne pouvait en être autrement. Sinon, cela voudrait dire que la relation sans secrets père-fils qu’il s’était donné tant de mal à instaurer, entre Clark et Jonathan, ne serait qu’un voile dissimulant la triste vérité.
Il se retourna lentement et adressa à Jonathan un regard bleu qui avait retrouvé cet aspect bienveillant qu’avait hérité Clark de son père biologique.


Jor-El : le nom de « Josh Servant » vous parle peut être plus ?

Jonathan écarquilla les yeux, tellement cette révélation était importante. Il se rappela alors ce moment, où Clark lui avait révéler ce qui s’était passé à l’hopital de Smallville, lorsque Jor-El lui avait retiré ses pouvoirs « Il l’a appelé Ava-El … je crois que Josh n’est pas vraiment celui qu’il paraît ! ». Oui, Clark avait raison : Josh n’était pas du tout celui qu’il paraissait.
Mais comment cela était-il possible ? Le seul Kryptonien ayant survit à la destruction était Clark, la Prophétie était formelle.


Jonathan : mais comment … ?
Jor-El : celui qui se fait appeler Ava-El n’est qu’un clone de mon frère …

Jor-El esquissa un nouveau sourire. L’effarement présent sur le visage de Jonathan l’amusait, cette expression abasourdie était si cuisante.

Jor-El : lorsque nous avons découvert que Kal-El serait envoyé sur Terre, il nous ait apparu indéniable qu’il devrait être guidé. Mon frère s’est alors proposé pour ce rôle ; il avait une dette envers Lara et moi … J’ai donc mis un plan dont je suis fier en place : j’ai confié un échantillon de son sang à un puissant terrien et comme je m’en doutais, il s’est empressé de faire renaître Ava-El …

Jonathan aurait aimé connaître également le nom de ce puissant terrien. Mais Jor-El ne lui dirait peut être jamais. Et puis, après tout, peu lui importait son nom. Ava-El était digne de confiance, il avait montré à maintes reprises.

Jor-El : la tâche du Conseil s’est révélée plus ardue que prévue. Ce que vous allez voir est l’aboutissement de son travail …

Jonathan, regard braqué dans le dos de son interlocuteur, le vit disparaître en super-vitesse, dans un sillon de couleurs blanches. Ainsi, il revint à sa place initiale : sur la sa droite. Le temps reprit sa place, débloquant la scène.
Le Jor-El, derrière le bureau en demi-cercle, termina de s’installer tandis que la voix d’Anah-Ven, au centre, s’élevait de nouveau, d’une froideur implacable mais qui l’enveloppait d’une extraordinaire aura de puissance et de charisme.


Anah-Ven : nous attaquons aujourd’hui la dernière ligne droite du projet … nous allons décider des lieux qui abriteront les cristaux du Destin, avant que Kal-El ne soit apte à les retrouver lui même …

Avant même que les derniers mots de sa phrases ne se soient évanouis, au centre de la salle, devant le bureau, une lueur dorée était apparue. Rapidement, elle traça, à l’aide de faisceaux lumineux translucides, ce qui ressembla bien vite à l’hologramme de la table du dôme du Destin, supportant un petit dôme pyramidal en son centre. Au dessus de son sommet, flottait la clé octogonale, réplique parfaite de la réel, de sa forme à ses symboles. Tout autour du dôme, sur la platitude de la table, étaient posés les trois cristaux, dans tous leur détail. La seule différence demeurait leur diaphanéité.

Anah-Ven : nous commencerons par le cristal de l’Espoir …

L’hologramme doré pivota pour présenter le cristal de l’Espoir, face au bureau. Le cristal translucide s’agrandit de lui même avant d’être le seul à apparaître, flottant au dessus de la marque du destin.

Ira-Is : les Shamanes ont prouvé leur loyauté, on peut leur faire confiance aveuglément.
Jor-El : (approuvant) Lara serait d’accord.
Anah-Ven : bien, qu’il en soit ainsi …

Obéissant au pensées du Grand Maître, l’hologramme rapetissa et laissa réapparaître l’hologramme de la table du dôme du Destin. La table pivota sur elle-même et laissa le cristal du Savoir apparaître face au bureau, posé sur la table. Une nouvelle fois, le cristal s’agrandit, comme son prédécesseur et se mit à flotter au centre de la salle.

Anah-Ven : vient ensuite le cristal le plus puissant, celui du savoir …

Mais soudain, une nouvelle lueur apparut, non commandée par l’esprit d’Anah-Ven. Une lueur d’un rouge vif, intense et ensorcelant. Sa puissance dépassait de très loin celle qui avait enveloppé Jor-El, à son arrivée en ces lieux. Elle était si puissante que chacun des membres, contrairement au moment de l’arrivée du père de Kal-El, se détournèrent, écartant leur regard de cette aura de lumière qui ne cessait de gagner en intensité. Une sphère de lumière rouge, d’un éclat éblouissant, venait d’apparaître à mi-hauteur, flottant au travers de l’hologramme doré. Elle tournoyait lentement, majestueusement sur elle même. Mais sa rotation commença rapidement à gagner de la vitesse, pendant de trop courtes secondes. Après une seconde d’une rotation devenue trop effrénée pour durer, elle explosa et provoqua une violente onde de lumière rouge qui s’échappa de son implosion et se dirigea vers les parois de la pièce. Elle frappa chacun des membres du Conseil, qui n’y réagirent pas. Mais, lorsqu’elle frappa la baie vitrée, derrière eux, la vitre explosa et tomba bruyamment sur le sol.
Jonathan, traversé par l’onde, resta un instant la tête baissée, abasourdi par ce qu’il venait de voir. Puis, sentant étrangement une présence obscure, non voulue, il releva les yeux, tout comme l’avaient fait chacun des membres du Conseil d’Alehi.
Il porta son regard au bas d’une silhouette habillée d’une grande toge de tissu ample, d’un rouge vif éclatant. Lentement, il releva les yeux le long de son corps mystérieux, le caressant de ses rétines claires jusqu’à arriver à hauteur de l’arrière de sa tête, couverte d’un large capuchon.
Tout comme elle l’avait fait à l’arrivée de Jor-El, la caméra contourna le nouveau venu par la gauche et vint le filmer mais cette fois devant, en un plan oblique. Malgré ce plan destiné à découvrir son identité, c’était peine perdue. Le large capuchon tombant sur son visage, assombrissait les traits flous, ombrés qui faisaient sa personne. Seul un teint blanc et un sourire radieux étaient visibles, dans l’ombre.
Le temps sembla à nouveau se figer, avant que Jor-El ne reprenne la parole, à côté de Jonathan.


Jor-El : connaissez-vous cet « être » ?
Jonathan : non.

Et Jonathan était plus qu’honnête. Jamais il n’avait entendu parler, dans toute sa vie, d’un homme habillé de telle manière, aussi voyante.
Lorsque Jor-El reprit la parole, Jonathan comprit très rapidement que cet « être » comme il l’avait appelé, devait être la menace dont il lui avait parlé. Le timbre de sa voix était macabre et parcouru d’une peur, d’une panique qui ne lui étaient pas habituels.


Jor-El : il se nomme Anu’kh … il est l’instigateur de la destruction de Krypton …

Jonathan tourna vivement la tête vers son homologue Kryptonien. Les yeux écarquillés, il regarda Jor-El comme s’il le voyait réellement pour la première fois. Lui qui avait toujours cru que Krypton avait explosé suite à des conséquences naturelles, il n’aurait jamais pensé qu’elle l’avait été par la volonté d’un simple homme.
Il reporta son attention sur Anu’kh, de dos, immobile, tel une statue de cire.


Jor-El : il faut que vous sachiez que, selon la légende, Krypton a été créée par deux dieux créateurs : Råo et Sethi … Kal-El serait l’ultime descendant de Råo, Anu’kh l’ultime descendant de Sethi. A ce titre, il prétendait être le seul à avoir le droit de gouverner Krypton, Kal-El étant trop jeune. Mais le Conseil ne l’approuvait pas, ses vœux de conquête en faisaient un grand danger. Vous allez le voir par vous-même …

Le temps reprit de nouveau la place qui lui était propre laissant l’image redémarrer. Le cœur battant à tout rompre, Anah-Ven, reconnaissant la silhouette atypique de Anu’kh, se leva brusquement de sa chaise et s’avança devant son siège. Visiblement très inquiet, il amena sa main droite au niveau de son ventre et l’ouvrit. Peu après, une sphère de lumière dorée y apparut, tournoyant sur elle même. Il s’exclama, à l’adresse d’Anu’kh :

Anah-Ven : que fais-tu là ??!

Il ne faisait aucun doute que la présence d’Anu’kh, Le Sauveur, était une grande surprise pour Anah-Ven. Les bras croisés dans ses larges manches, Anu’kh profita au mieux de cette situation qui le faisait âprement sourire.

Anu’kh : pourquoi tant d’animosité ! … toi qui prône la solidarité ! Je t’avouerai que je suis profondément déçu !

Cette douce ironie, sonnant dans sa voix délicate, faisait froid dans le dos. Anu’kh se jouait, comme à son habitude, de la peur de son interlocuteur. Un interlocuteur qui pouvait avoir doublement peur : il était celui qui avait enseigner à Anu’kh tous ses pouvoirs et donc le mieux placer pour savoir que son pouvoir était infini.

Anah-Ven : tu ne devrais pas être là ! Comment tu … ?
Anu’kh : (froidement, l’interrompant) comment je suis revenu de ce monde dont on ne revient pas ? … (baissant la voix) je ne suis pas comme tout le monde, tu le sais …

Anah-Ven faisait référence à un monde parallèle, créé par les Kryptoniens pour y envoyer les criminels. Personne n’en était jamais revenu, personne jusqu’à Anu’kh. Ce monde était une sorte d’enfer perpétuel, des flammes qui brûlaient n’importe quoi. Anu’kh y avait été envoyé pour avoir violé un temps, à Alehi et avoir volé un cristal ancestral, renfermant le pouvoir de Sethi. Il avait essayé d’éradiquer la population avec. Un plan qui avait finalement pu aboutir, tel était le destin de la planète.
Anu’kh semblait appuyer son regard puissant sur le visage ombré de son homologue Kryptonien, dont les traits flous se révélaient grâce à la lueur dorée de la sphère lumineuse, dans le creux de sa main.
Il ajouta d’un ton ouvertement enjoué :


Anu’kh : tu devrais être fier ! Ton apprentissage m’a permis de m’en sortir …

Mais cela semblait loin d’être le cas. Cette partie de sa vie à laquelle faisait allusion Anu’kh, Anah-Ven l’avait rayé de son esprit. Ces cauchemars, présent dans son esprit depuis de longues années n’avaient cessé de s’accentuer, au fil de ces derniers mois jusqu’à atteindre leur paroxysme, au début de cette nouvelle semaine. Il avait alors compris, après ses nombreux réveils en pleine nuit, que quelque chose d’horrible se préparait, étranger à la prochaine destruction de la planète. La silhouette d’Anu’kh, présent juste devant lui, était la réponse et la matérialisation de ces rêves continuels. Pourtant, cela ne le rassurait en rien. Au contraire, cela ne faisait qu’empirer les choses : comment imaginer que la prochaine destruction de Krypton et la réapparition soudaine du Mal en personne soient une curieuse coïncidence ? Anah-Ven voyait plutôt en cela une réponse à l’origine de cette destruction.
Anu’kh laissa un curieux rire, dénué de la moindre joie mais teinté d’une moquerie ouverte jaillir de sa gorge, avant d’ajouter, de cette même voix enjouée faisant frémir les esprits les plus forts de l’assemblée.


Anu’kh : que comptes-tu faire de cette boule d’énergie ? me la lancer … ?
Anah-Ven : (voix dure) ne m’y obliges pas !!

Anu’kh éclata d’un nouveau rire glacial, teinté d’une moquerie encore accrue. Il trouvait cela tellement ridicule, surtout en sachant que Anah-Ven l’avait forgé lui même.
Anu’kh fit volte face, gardant les bras croisés et traversant les faisceaux lumineux dorés, constituant l’hologramme du cristal du Savoir et s’éloigna lentement vers le fond de la salle, en direction de Jonathan. Ce dernier le regarda approcher, de ce pas délicat, majestueux, tout comme le faisaient chacun des membres effrayés du Conseil d’Alehi. Inlassablement, Jonathan vit son visage blanc, envahi d’ombre, devenir plus distincte, moins flou. Encore quelques pas et Jonathan verrait son visage de tout juste quelques centimètres : peut être réussirait-il à voir son visage, malgré le capuchon. Anu’kh s’arrêta à moins d’un pas de Jonathan, regardant au travers de lui. Il pouvait presque sentir son souffle chaud, sortant de ses fines narines, caresser la peau de son visage dans un râle sourd. L’ombre provoquée par les bords vifs du capuchon rendait son visage pâle obscure, maléfique. Ses yeux, qui auraient pourtant dû apparaître malgré la pénombre, tel deux pierres précieuses envahie d’obscurité, restaient parfaitement dissimulés. Seul son large sourire maléfique, radieux, était visible, constitué de deux fines lèvres étirées au maximum. Jonathan n’eut aucun mal à reconnaître ce sourire, aux nuances sombres qui était resté gravé dans son esprit. Il le connaissait, et très bien même. Jonathan laissa une stupeur sans égal traverser son visage, comprenant ce qu‘était et surtout, qui était la menace dédiée à la Terre.
Anu’kh tourna à nouveau les talons, comme s’il avait vu Jonathan, face à lui et était satisfait de son acte. Il s’immobilisa alors, apercevant enfin l’hologramme du cristal du Savoir, flottant au dessus de la marque du Destin. Son sourire au bas de son visage –seul élément éclairé de son visage- s’accentua, le reconnaissant. Il avança de trois pas, s’éloignant de Jonathan et s’arrêta devant l’hologramme, le regardant avec un intérêt non dissimulé :


Anu’kh : oh, mais ne serait-ce pas le cristal du Savoir, l’entité de Krypton ?

Anu’kh releva lentement la tête de l’hologramme vers la silhouette dorée d’Anah-Ven, lui adressant ce sourire extatique qui provoquait un effroi sans égal en celui qui fut son mentor, jadis.

Anu’kh : vous touchez au but donc …

Anah-Ven se sentait boullir, intérieurement. Non pas de cette peur grandissante, sans équivoque, que provoquait Anu’kh à chacune de ses apparition. Non. Une haine mêlée à cette haine impossible à mesurer. Une haine contre lui même d’avoir créer le monstre qui se trouvait devant lui, aujourd’hui même et qui avait assassiné, sous ses propres yeux, sa femme et ses deux enfants, sans éprouver le moindre remords. Le seul sentiment qui avait jalonné cet acte dénué de toute humanité, encré en Anu’kh, avait été cette joie de voir l’autre souffrir le martyr. Il aimait tant cette sensation.
Anah-Ven laissa cette fureur éclater et resserra un peu plus son étreinte sur la sphère de lumière doré, manquant presque de l’éteindre sous la pression. Il se reprit pourtant aussitôt, reprenant un peu du self-contrôle qui l’empêchait d’annihiler Anu’kh, face à lui. Ou tout du moins essayer. Il cracha alors ces paroles emplies de rage au visage de d’Anu’kh, qui ne tressaillit même pas.


Anah-Ven : Anu’kh, sors d’ici !!

Anu’kh perdit un instant son sourire, observant le plus intensément possible le visage aux traits furieux d’Anah-Ven. Celui-ci crut pendant un doux moment avoir gagner. Il eut même l’impression de voir une lueur rouge envelopper la tunique de son homologue Kryptonien. Mais cela n’était qu’illusion, pur fruit de son imagination. Le Sauveur, comme il se faisait appeler sur Terre, retrouva trop rapidement son sourire au goût d’Anah-Ven. Sa rage explosa subitement sans qu’il ne puisse rien faire pour l’empêcher.
Anah-Ven se pencha sur le bureau blanc en arrachant son épaule devant lui : il venait de lancer la boule d’énergie à une vitesse phénoménale en direction d’Anu’kh. [SLOWING DOWN – Un sillon de vitesse, véritable suite de cercles flous translucides, apparurent dans la course de la sphère lumineuse qui arriva bien trop vite à hauteur d’Anu’kh pour qu’il puisse réagir. Mais au moment où la sphère arriva à deux centimètres de la tunique rouge d’Anu’kh, une barrière de lumière noire apparut, le protégeant, électrisée d’un courant doré la parsemant. A son contact, la sphère explosa furieusement dégageant un souffle prodigieux, se dissipant en cercle tout autour de la table. Sous son effet, chaque capuchon de chaque membre du Conseil vacilla, découvrant leur visage. Anu’kh n’était pas épargné : sa capuche s’abaissa également. La caméra fit un gros plan dessus.
Son visage blanc, aux traits fins, juvéniles, n’étaient étrangers à personne. Son sourire machiavélique, perçant son visage pâle, n’avait d’égal que celle de son paternel. Son crâne luisant était dépourvu de cheveux, tout comme la totalité de son visage : ce visage était très pour trait celui de Lex Luthor, l’ex-ami et futur ennemi de Clark. Deux seuls éléments différenciaient Anu’Kh de Lex : un grand tatouage noire, d’origine Sethi, peint sur le côté gauche de son visage et le couvrant, du haut de son crâne jusqu’au milieu de sa joue creusée ; ainsi que son regard. Le bleu presque diaphane qui le remplissait avait été remplacé par une noirceur totale, inexpugnable. Pas une autre couleur n’était présente dans ses yeux, le noir absolu.
Le Conseil n’en revenait pas. La sphère de lumière n’avait pas eu le moindre effet sur Anu’kh. Anah-Ven avait pourtant démontré à maintes reprises qu’il était le puits de puissance du peuple, personne n’avait encore résisté à cette attaque. Mais Le Sauveur n’était pas n’importe qui, et Anah-Ven aurait dû s’y attendre.
La barrière de lumière noire s’abaissa, disparaissent complètement. Mais Anah-Ven ne s’arrêterait pas là. Il ouvrit ses deux mains et y laissa apparaître une sphère de lumière dorée chacune. Rageur, il poussa un hurlement et lança coup sur coup les deux sphères, avant d’en faire réapparaître deux nouvelles, qu’il lança à leur tour. Mais cela n’avait aucun effet : chacune d’elle explosait au contact de la barrière de lumière et ne provoquait qu’un nouveau vent puissant. Après dix sphères lancées, sans conséquences, Anah-Ven s’immobilisa, essoufflé, sous le sourire d’Anu’kh.
Reprenant son souffle, Anah-Ven ne put qu’admettre l’abjecte vérité : il était impuissant. Anu’kh décroisa lentement les bras, les enlevant de ses manches et découvrit deux mains blanches, la droite pourvue d’un tatouage Sethi noir. Il renversa cette main et l’ouvrit, tout comme l’avait fait Anah-Ven avant lui. Peu après, une boule de feu, entremêlés de flammes étranges, y apparut, flottant au dessus de sa paume et tournoyant doucement sur elle même. Fixant Anah-Ven, son visage asiatique tiré par la peur et la fatigue, il reprit la parole de ce ton horriblement calme :


Anu’Kh : même à cinq, vous n’avez pas l’ombre d’une chance …

Cette phrase provoqua un froid glacial qui se propagea de corps en corps, tel un virus particulièrement rapide et virulent. Même Jonathan se sentit parcouru d’une vague de frissons indescriptibles. Ce Anu’kh avait un sens inné pour provoquer la peur. Chacun des membres voyaient sa vie défiler devant ses yeux, certain que leur dernière heure était arrivée.
Mais, à leur plus grand étonnement, Anu’kh ferma cette main et éteignit la boule de feu. Des fins filets de fumée s’échappèrent de sa main serrées, entre ses doigts. Souriant, il reprit d’un ton moins ferme, plus enjoué.


Anu’kh : je sais que Kal-El s’apprête à quitter Krypton …

Cela n’annonçait rien de bon. En son absence, le Conseil de Krypton avait pu organiser le départ du dernier fils sans se soucier de le cacher mais s’il était revenu, il ne faisait aucun doute qu’Anu’kh en avait entendu parler. Son départ semblait donc très compromis, le connaissant. Et pourtant …

Anu’kh : … mais je ne comptes rien faire pour l’empêcher. Si j’avais voulu le faire, il serait déjà mort …

Derrière son bureau, Jor-El sentit ce froid, en lui, s’accentuer alors qu’il gagnait les seules parties de son corps qui n’étaient pas encore atteintes. Une colère commençait pourtant à naître, au fin fond de lui même. Une haine qu’il faudrait canaliser, pour éviter d’aller au devant de graves ennuis.

Anu’kh : … la Prophétie parle de deux fils, comme vous le savez. La destinée du fils du mal me tient à cœur. Je tenais donc à fournir un élément qui vous sera fort utile : les deux fils devront embrasser leur destinée finale trois ans, jour pour jour, après leur rencontre. Sinon quoi, tous deux mourront …

Anu’kh laissa un long silence s’installer, la brise provenant de dehors, au travers de la baie vitrée brisée, venant souffler sur son visage. Le noir de son regard perçait l’air et refroidissait Anah-Ven en son for intérieur. L’attitude d’Anu’kh était plus que surprenante, cela n’était pas dans ses habitudes. Que préparait-il dans l’ombre ? Anah-Ven devait savoir.
Anu’kh avait tourné les talons et s’avançait de nouveau vers Jonathan, quand la voix du Grand Maître s’éleva, l’interpellant sans assurance quelconque.


Anah-Ven : (voix froide) pourquoi nous dis-tu cela ?

Anu’kh s’arrêta, regardant droit devant lui. Un sourire de dément traversa son visage radieux.

Anu’kh : je te le dis parce que la conquête de la troisième planète passe par Kal-El … mais ça, tu le sais déjà …

Jonathan entendit les derniers mots prononcés par Anu’kh résonner en un curieux écho, dans sa propre tête. Une douceur palpable l’enveloppa de toutes parts, s’emparant de ses cinq sens et lui procurant une sensation de bien-être encore jamais ressenti. Ou peut être si … Ce sentiment évoquait en lui quelque chose, un souvenir pas si lointain que ça. Jonathan essaya de se le remémorer, fermant les yeux et esquissant un large souvenir. Mais sa mémoire lui faisait défaut. Ou peut être … Peut être ne voulait-il pas se rappeler. Peut être que cette sensation enivrante était trop apaisante pour qu’il ne veuille pas en profiter, durant le temps qu’elle enveloppait son corps, durant cette période extatique appelée à se terminer, à tous moments. Jonathan devait s’attendre à cette éventualité certaine. Une éventualité devenue réalité, quelques secondes plus tard …
Jonathan rouvrit les yeux. Une clarté d’une blancheur éblouissante lui jaillit aux yeux, le forçant à les refermer aussi tôt. La douceur avait complètement disparue sustentée par ce picotement, au creux de ses rétines oculaires. Le père adoptif de Clark cligna plusieurs fois des yeux, essayant à grand peine d’adapter sa vue au nouveau lieu car, c’était un fait, il avait à nouveau changé de lieu. Enfin, après de longues secondes, il put regarder droit devant lui. La lumière blanche aveuglante, les parois obliques, le silence total …Aucun doute possible, Jonathan était revenu à son point de départ, dans le Dôme Artificiel. Il baissa les yeux vers son corps, il connaissait le seul moyen d’en être sûr. Sa tunique blanche avait été remplacée par cette chemise en soie noire, posée sur un jean grisé. Jonathan sentit une légère brise de vent souffler dans son dos et se retourna, sachant ce qu’il verrait face à lui : Jor-El. Le père biologique de Clark souriait radieusement, regardant Jonathan droit dans les yeux, les bras croisés. Ce dernier se retourna complètement et, les sourcils froncés, lui demanda, pour en être certain :


Jonathan : je suis …
Jor-El : revenu ? oui …

Jonathan baissa un instant les yeux. Il se rappelait très précisément chacune des scènes auxquelles il avait assisté, chacun des endroits qu’il avait visité, chacun des visages qu’il avait observé. Le monde antique de Krypton resterait à jamais gravé dans sa mémoire. Pourtant, une visage, une silhouette, une scène prenait toute la place de son esprit, celle concernant la menace planant sur la tête de Clark : Anu’kh. Surtout son visage … Lex était cette menace.
Jor-El prit la parole, le visage ferme, le regard charismatique.


Jor-El : ce n’est pas Lex que vous avez vu.

Jonathan sentit à nouveau cette colère que lui provoquait Jor-El chaque fois qu’il pénétrait dans son esprit. Il détestait cette violation de son intimité, s’il ne pouvait plus penser en paix, que pouvait-il encore faire sans être épié ?
Il essaya de ne pas y prêter trop attention et répliqua, de la voix la plus égale possible, percée d’une pointe de réprimande :


Jonathan : il avait son visage, je l’ai vu de mes propres yeux !
Jor-El : je le sais, Jonathan. Je dois avouer que c’est une curieuse coïncidence mais le fait est que Lex ne peut pas être Anu’kh … Ce dernier descend de Sethi, un dieu Kryptonien. Lex est un terrien ; ce qui m’amène à cette interrogation : pourquoi Lex est-il le deuxième fils ?

Jor-El révélait un élément crucial à Jonathan : Clark était donc le Naman de la légende Kawache et Lex, Saguis. Martha et lui avaient toujours consideré Lionel comme ce Saguis mais si c’était Lex, alors cela changeait tout. La légende prenait tout son sens désormais : « Deux frères devenant ennemis, pour l ‘équilibre de la planète ». Elle semblait retracer l’évolution de ce lien si fort entre Clark et Lex.
Pourtant, quelque chose ne collait pas, Jonathan s’en rendait compte. Avant de lui montrer ce dernier souvenir, Jor-El lui avait dit qu’il allait lui révéler « la menace qui guettait Kal-El ». Mais si cette menace n’était pas Anu’kh, pourquoi lui avoir montré cette scène ?


Jonathan : je ne comprends pas bien le rôle d’Anu’kh dans tout ça. Il n’a rien à y voir !
Jor-El : oh si, au contraire ! Il a tout à y voir …

Jonathan attendait la suite avec impatience. C’était peut être l’un des derniers points obscures de toute cette histoire qui avait amenée Clark sur Terre. Jor-El reprit la parole, d’un ton grave ne présageant rien de très positif.

Jor-El : tout comme l’avait été Anah-Ven, Anu’kh est devenu le mentor de Lex. Je ne sais pour quelle raison mais il le guide vers les cristaux et l’héritage qui lui est dû …
Jonathan : mais c’est impossible ! Anu’kh est mort dans l’explosion de Krypton … non ?

Jonathan avait baissé le ton, sur ce dernier mot, preuve que lui même il n’était pas convaincu. Et ce n’était pas le regard claire, touché par le désarroi, de Jor-El, qui allait le rassurer. Il se rappela alors qui il avait en face de lui : un entremêlant de volonté, de souvenirs et de lumière qui représentaient un homme, un père, qui était mort 16 ans auparavant. Aussi, lorsque Jor-El lui répondit, il ne fut pas surprise par les mots que formèrent sa bouche :

Jor-El : non … Son esprit a été transféré dans un autre vaisseau, qui quitta Krypton peu après celui de Kal-El. Il a dû finir par attérir sur Terre, mais j’ignore où. Et, par un phénomène qui m’est totalement inconnu, il a réussi à prendre le contrôle d’un humain. Il l’habite …

C’était pire que tout, Jonathan s’en rendait compte. Un Kryptonien, du temps de Krypton, habitait le mal absolu, personne ne semblait capable de l’arrêter. Et cet esprit maléfique s’était réincarné dans un humain et venait de s’associer à Lex Luthor, pour l’aider à acquérir un pouvoir certainement plus destructeur encore que celui présent dans ses gênes. Le mal enchaîné dans le mal. La menace était dévastatrice.
Le visage frappé par l’effroi, les yeux écarquillés de stupeur, Jonathan trouva cependant les forces d’articuler cette phrase :


Jonathan : et Clark, il le sait.
Jor-El : non … mais tant qu’il n’aura pas acquis l’héritage de son peuple, il ne possèdera pas l’ombre d’une chance de les vaincre …

Jor-El marqua une pause, le regard mêlé dans celui de Jonathan. Ce dernier baisse les yeux vers le sol, comprenant enfin la menace qui guettait son fils, une menace de mort pire que tout ce qu’il avait dû affronter jusqu’à maintenant.

Jor-El : (voix douce) c’est pour cela que vous devez l’aider …

Jonathan releva les yeux vers Jor-El. IL les braqua délicatement dans le sien et lut dans ses rétines quasiment translucide cette peine, cette peur même de pouvoir voir son fils le rejoindre ici même, après sa mort. Il ne voulait et ne pouvait accepter cette éventualité.

Jor-El : acceptez-vous de joindre votre amour à mon esprit pour éviter le pire ?

Jonathan attendit quelques instants. Son vœu de sauver Clark du pire était-il assez puissant pour oser faire confiance à celui qui avait toujours fait croire que Clark deviendrait un tyran ? Devait-il rayer cette méfiance de son esprit pour se laisser complètement envahir par l’esprit de Jor-El et ne faire plus qu’un ?
Jonathan sentit alors une étrange sensation s’emparer de lui, tel une douceur émanant de Jor-El. Il venait de lire son esprit : un esprit tourmenté et apeuré, qui se sentait désemparé à l’idée de ne pas pouvoir pérenniser la vie de son fils. Jonathan esquissa un sourire.


Jonathan : j’acceptes !
???: votre sacrifice sera vain, humain …

Jonathan, désormais conscient qu’il avait le don de lire les esprits, sentit cette haine aussi puissante que ses propres peurs apparaître à l’instant même où la voix s’élevait. Une voix dure, froide, implacable et inconnue de Jonathan. Face à face, les deux pères de Clark tournèrent la tête –Jonathan sur sa droite, Jor-El sur sa gauche- et écarquillèrent les yeux en apercevant cette troisième personne.
La caméra se plaça entre les deux pères de Clark et, rasant le sol d’un plan basculé vers le bas, fit défiler le sol blanc avant de relever son objectif vers l’intrus : un grand homme vêtu d’une toge rouge et son visage couvert d’un large capuchon. Ses bras étaient croisés dans ses manches et son visage couvert d’une ombre surnaturelle : Anu’kh.

 

Cimetière – Smallville – 10h18

Une tombe, parmi les trop nombreuses tombes du cimetière de Smallville ressortait avec une évidence apparente : celle constituée d’un étrange marbre sombre, au reflets bleutés sublimes. Sa forme, arrondie, alliée à cette couleur sans égale dans l’étendue de malheur qu’était ce cimetière, faisait de cette tomber, ainsi que de son pauvre propriétaire une singularité toute particulière. Et ce n’était pas les mots destinés au défunt, inscrits en blanc dans la roche sombre, qui allaient amenuiser cette singularité. Celui qui avait imaginer ces mots devaient connaître tout, absolument tout, de la vie de cet homme avant son arrivée à Smallville :

« Josh SERVANT
12 Juillet 1985
08 Août 2005
His past was sacrified,
His present fulfilled,
His future stolen »

Chacune de ces phrases, chacun de ces mots, portaient une signification bien particulière qui révélait à elle/lui seul(e) qui Josh avait été. Malgré un passé qu’il n’avait révélé à personne, pas même à Clark, l’homme à l’origine de sa venue sur Terre, de sa résurrection sans pareille. Il avait juste agi comme il pensait être convenable jusqu’à rencontrer un ennemi mortel, destiné à Clark. Un ennemi prêt à tout pour arriver à ses fins …Prêt à tout … Même à tuer quiconque se trouverait sur son passage et constituerait un obstacle inopiné ; ce que Josh avait fait. Anu’kh l’avait donc supprimé, sans le moindre scrupules.
Lentement, quittant la tombe installée sur la pelouse semblable à un tapis de billard, la caméra recula dans un travelling délicate et laissa apparaître la silhouette mince d’une jeune femme, immobile devant cette tombe. Habillée d’un jean légèrement délavé, saillant son corps de mannequin et d’une veste de tailleur noire, cintrée, la jeune femme semblait absorbée par l’observation de cette tombe, face à elle. Ses cheveux blonds mi-courts tombaient, légèrement courbés à leur pointe, sur des épaules minces. La tête baissée, elle ne pouvait quitter des yeux les noms « Josh SERVANT », des larmes roulant doucement, à écart régulier, le long de ses joues douces et rosies. La caméra passa d’un plan filmant son dos à un plan de profil, en la contournant par sa gauche. Le visage humidifié par les larmes de Stefany Fener apparut, ses yeux d’un bleu déjà si intensément claire devenu presque translucide. Embués de larmes, ils semblaient atrocement brillant, révélant une détresse telle qu’elle n’en avait plus ressentie depuis la mort prématurée de sa mère, lorsqu’elle avait cinq ans. Elle serrait contre elle un bouquet de fleurs blanches, qu’elle s’apprêtait à déposer, depuis de longues minutes déjà, sur la tombe de son défunt petit ami. Elle ferma les yeux, laissant une nouvelle vague de larmes rouler sur son visage. Déposant une partie de leur humidité sur la peau douce de la jeune femme, le reste des larmes fut aspiré par le coin des lèvres pincées de Stefany et les mouillèrent. Elle renifla une nouvelle fois, brisant l’insupportable silence du cimetière. Sentant cette détresse l’envahir d’instants en instants, s’intensifiant à chaque seconde de manière exponentielle, Stefany rouvrit les yeux et décida d’avancer vers la tombe, d’un pas lent, ne quittant pas des yeux les mots destinés à Josh. Elle s’arrêta juste devant, au bord de la pierre déjà couverte d’une foule de fleurs toutes plus jolies les unes que les autres.
Elle le regarda encore quelques nouvelles secondes la pierre tombale, aux éclats bleus sublimes, avant de s’accroupir, doucement. Restant dans cette position, le bouquet de Chrysanthèmes serré dans ses deux mains liés, elle posa son regard sur ces mots « future stolen ». Elle considérait que cette personne, responsable de sa mort, lui avait du même coup voler son propre futur. Car oui, Stefany était certaine que son petit ami avait été tué. Il ne pouvait en être autrement. Elle n’avait jamais connu quelqu’un d’aussi fort. Sa seule faiblesse semblait être ce lourd secret, qui l’habitait continuellement et qu’il redoutait plus que tout de révéler, à quiconque. Un secret qui avait fini par le rattraper.
Laissant une nouvelle larme rouler le long de son visage couvert d’humidité, Stefany posa délicatement le bouquet sur la pierre lisse, posée parallèlement au sol. Relevant lentement la tête, submergée par une nouvelle vague de larmes dévastatrice, Stefany glissa, aussi étonnant que cela puisse paraître, les mots suivant, dans un murmure difficilement audible, même au milieu d’un silence tel que celui qui régnait alentour.


Stefany : prends soin de toi …

Stefany, suite à ces mots, baissa de nouveau les yeux en esquissant un large sourire, tandis qu’une énième larme débordait de son œil gauche. Elle laissa cette larme rouler le long de sa joue et releva les yeux vers la tombe, la regardant une dernière fois. Et, enfin, elle se releva lentement, ne pouvant quitter des yeux la tombe devant elle. Elle n’arriverait jamais à partir : le simple fait de s’éloigner de cette tombe signifierait qu’elle abandonnerait à jamais Josh, qui l’avait fait vibrer comme personne. Il était le premier à la considérer comme elle le souhaitait, comme une véritable femme, avec des sentiments et non une belle blonde à la silhouette parfaite. Elle ne pouvait se résigner à l’oublier, c’était impossible. Elle n’osait croire qu’il était mort, même avec la pierre tombale, devant ses yeux.
Une main se posa délicatement sur son épaule gauche, l’étreignant avec douceur. Le regard brillant, Stefany amena sa propre main droite vers cette épaule et serra la main de son amie, touchée par le réconfort qu’elle essayait de lui apporter. Ces mots suivirent :


???: viens … il est temps …

Stefany perdit les moindres petites nuances de son sourire. « Elle a raison » pensa-t-elle, assez fort pour s’en convaincre. Lâchant la main, sur son épaule, Stefany ferma les yeux et se retourna enfin vers son amie. C’est ainsi qu’apparut la petite silhouette, mince, de Lana Lang, habillée de la même manière que son amie. Ses longs cheveux bruns, ondulés, tombaient sur ses épaules. Elle sourit, de façon à encourager Stefany, et se plongea dans le regard empli de désarroi de Stefany.
Mais à cet instant précis, Lana vit une toute autre émotion se mêler dans les rétines quasi diaphanes de son amie. Une peur, une surprise des plus intenses confirmées par un reflet rouge assez intense. Un reflet qui indiquait clairement à Lana ce qui se trouvait derrière elle, ce qui affolait Stefany subitement. Aussi, le cœur battant, Lana se retourna à son tour pour faire face à celui qui motivait son rôle de Gardienne, celui qui incarnait le mal en puissance, celui qui avait tué Josh : Anu’kh.
Lana leva la main droite, prête à agir contre lui bien qu’elle savait qu’elle n’avait aucune chance. Mais Anu’kh fut le plus rapide. D’un geste ample de sa main droite, partiellement couverte d’une manche de tissu rouge, il effectua un arc de cercle supérieur, de gauche à droite. Sous son effet, sa main légèrement bronzée, marquée d’un tatouage noir Sethi, se couvrit d’une lumière mêlant rougeâtre et orangé et traça, dans sa course, une courbe de cette lumière étrange. Regardant l’ombre intense, intarissable, couvrant le visage de son homologue, Lana ne put empêcher une douceur incontrôlable, enivrante, de s’insinuer dans la moindre parcelle de son corps. Le venin soporifique, partant de ses hanches et remontant vers sa tête était d’une telle virulence que, à l’instant où ses particules envahirent l’esprit de Lana, cette dernière sentit ses paupières alourdies se fermer rapidement et le sommeil l’envahir. L’instant suivant, tout comme Stefany, elle tombait dans un sommeil artificiel des plus profonds. D’un autre geste de sa main droite, Anu’kh les fit s’élever juste au dessus du sol et, délicatement, les posa devant la tombe, à droite de celle de Josh. Aussi surprenant que cela puisse paraître, Anu’kh prit bien soin de poser les deux corps le plus doucement possible sur l’herbe de la pelouse. Ceci fait, il s’avança lentement vers la tombe de Josh et s’arrêta au bord, la regarda avec une satisfaction non dissimulée.
Soudain, il releva les bras et les tendit à la perpendiculaire de son corps, droit devant lui, révélant le dos de ses deux mains. Une seule portait un tatouage, celle de droite. Il se concentra pleinement sur ce qu’il s’apprêtait à faire. La même lumière mêlant orangé et rougeâtre, teinta la peau bronzée de ses deux mains et agit sur la pierre tombale, sous ses bras. Quelques secondes plus tard, la pierre sombre, aux reflets bleu foncé, s’éclaircit nettement et se lit à luire d’un reflet blanc éclatant, avant qu’un entremêlement d’éclairs de cette couleur ne zébra étrangement la paroi plane, couverte de bouquets de fleurs. Les particules de la pierres semblaient se séparer, s’écarter sous un effet des plus étranges. Comme si, d’un pouvoir surprenant, Anu’kh parvenait à séparer les atomes constituant la paroi dure de la tombe. Par instant, il était même possible de voir au travers, la terre retournée qui avait recouvert le trou dans lequel reposait le cercueil de Josh. Gardant les doigts tendus, anu’kh releva pourtant presque imperceptiblement, les doigts de sa main droite vers le haut avant qu’ils ne reprennent leur place initiale. Un geste qui ne serait pas sans conséquences, c’était une certitude.
Et en effet, tout juste quelques secondes plus tard, le montant d’une forme d’un noir très sombre, luisant étrangement, émergea au centre de la tombe désormais translucide, morcelé de part et d’autres. D’abord basée au centre, cette surface bombée noire continua de jaillir de la tombe et s’élargit rapidement, prenant la taille de la pierre tombale. Et le phénomène continuait. Bientôt, ce qui avait paru n’être qu’une plaque d’alliage noir se révéla avoir une profondeur assez conséquente et constituée de la même armature luisante, lisse et arrondie. Enfin, après de longues secondes, le fond aux courbes arrondies apparut et la forme noire, très longue, se mit à flotter entièrement au dessus de la tombe de Josh. Il s’agissait ni plus ni moins que du cercueil de Josh, auparavant enterré dans le sol dur du cimetière. Anu’kh avait réussi à rendre la matière du sol et de la pierre tombale informe, de façon à faire jaillir le cercueil du sol et à le faire flotter au dessus de la pierre tombale. Ses pouvoirs étaient sans égal.
Anu’kh leva alors la tête vers le cercueil flottant dans les airs, faisant frémir légèrement le tissu rouge vif de son large capuchon. Il ne se passa que quelques secondes avant que le cercueil noir, luisant, ne soit lui aussi parcouru de cet entremêlement de fins éclairs blancs, le rendant informe. La conséquence semblait alors évidemment. Peu après, le cercueil amorça une lente et délicate descente vers sa place initiale, traversant le corps sans vie, habillé d’un costume, de Josh. Rapidement, le cercueil l’eut traversé et commença à entrer de nouveau dans la terre, traversant de nouveau la pierre tombale translucide, diaphane. Lentement, il reprit sa place : seul Josh, allongé dans les airs au dessus de la tombe, la tête ballante, demeurait en dehors.
Lentement, Anu’kh ferma son poing droite, visiblement ravi de ce qu’il venait d’accomplir. Pourtant, sa tâche n’était pas achevée. Suite à son geste, le corps pourtant sans vie de Josh commença à se recroqueviller et pivota sur le côté. Demeurant inerte, il se mit en position fœtale, pour sa « renaissance ». Une lueur rouge, créée par une lumière douce, l’enveloppa de toutes parts, constituée de fins bras de fumée rouge. Ces bras, mouvant avec douceur, l’embrassaient de toutes parts, le couvrant d’une couverture de lumière sans égal. A l’instant où la lumière atteignit son paroxysme, une violente onde de cette lumière s’échappa du corps de Josh, s’évaporant alentour, à l’instant où, dans le ciel affreusement noir, un éclaire zébra les nuages menaçant.
L’onde de lumière frappa Anu’kh de pleine face, sans l’atteindre plus que cela. La seconde suivante, le corps de Josh avait disparu. Une fine pluie commença à tomber, se déversant des nuages obscures, dans le ciel. Au fil des secondes, tandis que Anu’kh baissa les bras le long de son corps, la pluie s’accentua jusqu’à devenir diluvienne. Le capuchon d’Anu’kh frémit une nouvelle fois, alors qu’il portait son regard sur la tombe de Josh.


Anu’kh : (pour lui même) maintenant, tu es seul Kal-El …

Anu’kh n’attendit même pas d’avoir terminé ses mots pour disparaître. Ces derniers s’évanouir en écho, étonnement. Un sillon de vitesse rougeâtre suivit Anu’kh qui partait vers la gauche dans une vitesse indescriptible.
******
La caméra descendait, dans un plan tournoyant sur lui même, vers le corps de Lana, allongée sur le dos sur la pelouse, au pied d’une tombe. Endormie, elle avait les yeux fermés et deux mèches de cheveux bruns tombaient en travers de son visage d’ange. La pluie diluvienne ruisselait sur son visage intensément humide, tant que des larmes d’eau roulaient inlassablement, régulièrement sur ses joues, vers ses oreilles. Ses cheveux, bien qu’épais, étaient déjà trempés de la racine à la pointe. Son débardeur noir, sous sa veste de tailleur contré, collait à son corps mince de mannequin. Rien ne semblait pouvoir la réveiller. Rien …hormis sa propre volonté.
Un bruit sourd, délicat, se fit entendre à proximité de la jeune femme. Lorsqu’il s’interrompit, un bras bronzé, le droit selon toute vraisemblance, approcha du cou de la jeune Lang, le poignet couvert d’un bracelet noir. L’homme joignit son index à son majeur et prit ainsi le pouls de la jeune femme. Il fut rassuré de sentir son sang battre sous ses doigts, signifiant qu’elle n’était qu’évanouie. S’il avait attendu ne serait-ce que quelques secondes, il aurait pu s’en rendre compte sans avoir à prendre son pouls. Car en effet, l’instant suivant, Lana ouvrit les yeux et, le rythme de son cœur s’emballant soudainement, elle se releva en s’asseyant et cria, d’une voix perçante :


Lana : Anu’kh !!!

La première image qui apparut dans ses yeux, au moment où elle avait repris connaissance, avait été le visage ombré d’Anu’kh. La menace était donc plus présente que jamais. Anu’kh, le mal en personne, était bel et bien à Smallville et avait fait face à Lana. Pourtant, pour une raison restée obscure, il ne lui avait fait aucun mal. Il savait que Lana était une des trois Gardiennes. Mais non, il l’avait juste empêché d’agir. Une réaction étonnante en le connaissant.
Réalisant où elle se trouvait en voyant la rangée de tombes, de l’autre côté de l’allée, Lana reprit contact avec la réalité. Elle était assise sur le sol mouillé du cimetière, l’eau de pluie ruisselait sur son visage. Lana écarta les deux mèches de cheveux mouillés, plaqués sur son visage et tourna enfin la tête sur la gauche, sentant une présence à ses côtés. Relevant les yeux vers l’homme, elle s’exclama, surprise :


Lana : Kelhan ?! Qu’est ce que tu fais là ?!

La caméra remonta à nouveau son plan le long du corps accroupi de Kelhan, à gauche de Lana. Habillé d’un jean délavé et d’un maillot noir surmonté d’une veste de cuir, il regardait sa petite amie d’un regard sérieux, inquiet qui lui était inhabituel. La bonne humeur qui le caractérisait l’avait quitté, au profit de l’inquiétude qui avait naquit en observant Lana évanouie au beau milieu d’un cimetière. Ses cheveux noirs coupés courts gouttaient d’eau, son visage bronzé ruisselant de plusieurs gouttes d’eau. Son regard sombre ressortait magnifiquement au milieu de cette humidité sans pareille.

Kelhan : je pourrais te poser la même question !

La tranquillité surprenante qui habitait son visage bronzé et le timbre de sa voix ne présageaient rien de bon, Lana le savait. Les rares fois où il avait été aussi sérieux, leur discussion s’était portée sur le lien entre Lana et Clark et leur passé tumultueux. Chaque fois, une dispute s’en était suivie.
Lana esquissa un sourire gêné et baissa les yeux, ne supportant pas cette façon de laquelle Kelhan la regardait, comme s’il lisait dans sone sprit au travers de ses yeux bruns.


Lana : j’accompagnais Stefany … mais j’ai eu un malaise !

Lana releva instantanément les yeux vers son petit ami, lui adressant un regard perçant. Un charisme impressionnant enveloppait sa silhouette massive, accentué par le regard pénétrant, sérieux qu’il adressait à Lana. Il ne faisait aucun doute qu’il ne l’avait pas cru une seconde.
Demeurant accroupi, il se retourna lentement et dirigea son regard vers le corps de Stefany, allongé sur le sol, un peu plus loin. Il s’écarta suffisament pour permettre à Lana de regarder son amie. Puis, il revint vers Lana, reprenant cet échange de regards perçant.


Kelhan : et Stefany aussi a eu un malaise ? … je sais que Smallville est une ville étrange mais là, tu avoueras que ça sort de l’ordinaire !

Lana garda un long instant le regard planté sur la silhouette endormie de Stefany. Comment avait-elle pu oublier que le même traitement avait été infligé à Stefany ? Lorsqu’elle reporta ses yeux sur le visage de Kelhan, elle se força à arborer un sourire amusé, comme si elle n’en savait rien. Elle enchaîna en répliquant :

Lana : désolé mon chéri, mais ce n’est pas moi l’experte en phénomènes étranges ! Pour ça, il faudra prendre rendez-vous avec le Docteur Chloé Sullivan !

Dans le même temps, Lana avait quitté Kelhan du regard et s’était relevé, en s’appuyant sur ses deux mains. Lorsqu’elle fut enfin relevée, elle adressa un regard lumineux d’amusement vers Kelhan, resté accroupi, mais tête levée vers sa petite amie.
D’une voix des plus sérieuses, il lui répliqua :


Kelhan : depuis qu’on est revenu aux Etats-Unis, tu es très bizarre …

Lana sentit le rythme de son cœur s’emballer rapidement, Kelhan avait donc remarqué. Le visage soudainement marqué par la peur, Lana le regarda se relever lentement et lui faire face. Son visage déçu, son regard luisant de soucis, Kelhan semblait vraiment touché par ce manque de confiance.

Kelhan : j’espère que tu ne me caches rien ?

Lana aurait aimé plus que tout au monde répondre : « Mais non mon amour, je n’ai aucun secrets pour toi ! ». Malheureusement, c’était loin d’être le cas. Elle était si heureuse, en France de sortir, enfin, avec un homme sans histoires, sans secrets. Elle avait elle même sabotée sa relation si parfaite en dissimulant son rôle de Gardienne. Mais comment lui confier un tel secret ? Comment ?Jamais il ne serait de taille à admettre qu’un extra-terrestre vivant sur Terre mérite la protection, au péril de sa vie, de sa petite amie. Elle avait détruit leur relation, inconsciemment. Inconsciemment ? Lana finissait par se le demander. Peut être qu’intérieurement, elle aimait encore trop Clark pour s’en séparer définitivement. Peut être qu’elle espérait secrètement revivre leur idylle. Non c’était impossible. Elle aimait Kelhan du plus profond de son âme ! … ?

 

Manoir des LUTHOR – Smallville – 10h42

De ce plan fixé dans les airs et basculé vers le bas, une tale blanche, d’un alliage à la luisance extrême apparaissait, seule attention de la caméra. De forme triangulaire et de fine épaisseur, sa platitude totale était juste rompu par une fente octogonale, assez fine elle aussi, creusée au centre du socle solide. La clé octogonale grise, autrefois possession de Clark Kent, était posée à l’intérieur. Seul le symbole du « Diaphane », gravé sur l’un des nombreux bords de la clé ancestrale, baignait d’une lueur intense de couleur jaune.
La caméra redressa son plan et filma droit devant elle. Un peu plus loin, deux hommes faisaient face à l’un des trois parois obliques, d’une blancheur immaculée, constituant la salle. Une lueur d’un jaune identique à celui de la clé jaillissait de chaque côté de leur silhouette, les enveloppant d’une aura surprenante. Celui de gauche était vêtu tout de blanc –pantalon de costume, chemise légère- tandis que son homologue recouvert de tissus noirs –long manteau de cashmere et pantalon-, créant un contraste étonnant entre eux. Le crâne chauve de l’homme de droite le rendait aisément reconnaissable : il s’agissait de Lex Luthor et de son frère, Julian Luthor, les cheveux rasés très courts. Tous deux les mains dans les poches, ils observaient le mur, d’un regard sérieux. Contre lui, un socle pyramidal de couleur noire était accroché, lui même creusé d’une encoche pyramidale à trois face. A l’intérieur était encré le cristal du « Diaphane » irradiant de la lueur dorée éclatante. Seul le symbole noir inscrit sur le paroi de verre de la pierre ressortait par son obscurité.
Lentement, le sourire aux lèvres, Lex tourna la tête sur sa gauche et posa son regard d’un bleu claire envoûtant sur le visage bienveillant de son petit frère et lui lança, d’une voix douce que l’on ne lui connaît pas :


Lex : j’ai toujours su que tu étais « spécial », depuis le premier jour où je t’ai serré dans mes bras …

A son tour, Julian quitta le cristal des yeux et déporta la clarté intense de ses yeux bleus vers son frère, en tournant la tête sur sa droite. L’intense transparence de ses rétines semblaient comme une marque de son rôle de Gardien du Diaphane. Il garda un court instant son regard braqué dans celui de son frère avant de répondre, armé d’un sourire :

Julian : je suis un Luthor …

Lex laissa à son tour un large sourire étirer ses fines lèvres, un sourire qui traduisait, pour la première fois depuis longtemps, un bonheur intense. Il regarda, tout comme Julian le faisait, son frère au plus profond de son regard avant de cligner des yeux en accentuant, pendant une courte seconde, un peu plus son déjà très large sourire. Puis, il se détourna de son frère et s’éloigna, dans leur dos, pour s’approcher de la table triangulaire, devant la quelle il s’arrêta. Sous les yeux brillant de Julian, Lex reprit, le regard déposé sur la clé octogonale en partie lumineuse :

Lex : je n’aurais jamais osé espérer qu’un tel destin attendrait notre famille.

Julian ne fit pas un geste, ne dit pas un mot. Si bien qu’un intense silence s’installa entre les deux frères Luthor, séparés par tout juste quelques mètres. Julian pivota sur ses talons et s’approcha de Lex. Il s’arrêta sur sa droite, portant lui aussi son regard sur la clé octogonale, posée au centre de la table blanche.

Julian : c’est surtout le tien qui importe.

Lex détourna lentement son regard azur de la table éblouissante et reporta son attention sur le visage de Julian : jamais ce dernier ne pourrait savoir combien sa présence à ses côtés, désormais définitive, lui apportait. Aucun mot n’aurait su l’exprimer.

Lex : (bienveillant) oui, mais sans toi, je ne parviendrais jamais à l’accomplir !
Julian : tu te trompes, tu en es capable, comme pour les grandes choses que tu t’apprêtes à accomplir …

Lex sentait à nouveau cette douceur indescriptible recommencer à lui caresser le visage, se déversant de ses yeux : le regard de son frère semblait en être l’origine, peut être l’une de ses si nombreuses facultés. Lex ne parvenait pas à quitter des yeux ceux de Julian, presque translucide, brillant d’une lueur très étonnante, enivrante même. D’une voix encore plus douce, le plus jeune des Luthor reprit :

Julian : (baissant les yeux) et puis en réalité, mon rôle est assez limité.

Lex esquissa un petit sourire, amusé, que Julian ne put voir puisque lorsque ses paupières se rouvrirent, ce sourire avait disparu du visage de son frère, pour laisser sortir de sa bouche ces mots pleins d’affection :

Lex : mais je ne parlais pas seulement de ton rôle de Gardien … je te parlais de toi, Julian Luthor, mon frère … ta présence auprès de moi était déjà cruciale bien avant que tu ne deviennes Gardien …

Une partie de cette chaleur, de cet amour fraternel qu’éprouvait Lex à l’égard de Julian venait de prendre l’emprise du visage de Julian, étirant
Ses jeunes traits en une expression radieuse, il était si fière de Lex. Fier d’être son frère, fier de porter le même nom que lui, le même code génétique, fier de constater que, malgré l’influence maléfique de son père, il avait su devenir un homme et non un monstre …
Aussi, marquant cette fierté d’un sourire très large, ses yeux transparents luisant d’une brillance extrême, Julian répliqua d’une voix douce et délicate :


Julian : je serais toujours là pour toi, même après ma fin …

Lex resta un long instant sans voix, entendant seulement le rythme de son cœur battre rapidement à ses tempes, dans un bruit mat insupportable. Il ne pouvait plus bouger un membre, plus articuler un mot. Et, enfin, il retrouva ses esprits et forma avec ses lèvres le mot « merci » sans pourtant que le moindre son ne sorte de sa bouche ; sa gorge était encore trop nouée.
Le jeune Luthor cligna deux fois des yeux, comme pour revenir à la réalité et dévia son regard du visage de Julian, reportant son attention sur la table sur sa gauche. Ce regard diaphane avait quelque chose de troublant, d’enivrant. Une sensation qui, une fois déversée sur son interlocuteur, agissait en lui tel un venin particulièrement virulent. Julian esquissa un sourire, ravi de cette expérience. Il laissa son frère contempler un long moment la pièce octogonale de métal, dans un silence total, avant de répliquer, quelques secondes plus tard, sur un ton beaucoup plus sérieux :


Julian : Lex … que sais-tu des cristaux ?

Lex se redressa légèrement. Il savait beaucoup plus aujourd’hui, qu’hier mais beaucoup moins encore que demain. Mais surtout, il était bien loin d’être le puits de connaissances que devait être Julian. Aussi, esquissant un large sourire et ravi d’avoir complètement retrouvé ses esprits, Lex répliqua d’une voix assurée :

Lex : j’en sais beaucoup moins que toi tu dois en savoir !

Lentement, Lex se retourna vers son frère et, arborant ce large sourire sûr de lui, braqua son regard extatique dans le sien, plus mystérieux. Mais à sa grande déception, Lex ne vit pas se sourire déclencher un ravissement de son frère. Au contraire, fixant Lex droit dans les yeux, il continua de demeurer sérieux, sans sourire, impassible. Comme si ce que venait de dire Lex n’avait aucun sens, comme si les mots employés par son frère provenaient d’une langue encore inconnue à ses yeux.
Lex perdit son sourire, prenant le même sérieux, déçu que son frère. Il avait compris.


Lex : tu ne comptes pas me dire le moindre éléments les concernant, c’est ça ?

Julian décelait déjà cette haine intense naître en Lex et prendre une proportion exaltante en tout juste quelques secondes. Il n’en revenait pas que son propre frère, membre des plus importants de la Prophétie, un de ceux qui devaient en connaître le plus au sujet de ce qui l’attendait ne veuille pas lui venir en aide.
Julian brisa ce masque de fermeté qui entravait sone expression déçue de paraître sur son visage et laissa se manifester toute sa frustration :


Julian : crois-moi, si je le pouvais, je le ferais ! Mais les lois sont strictes : aucun des trois Gardiens ne doivent influencer ne serait-ce qu’un seul des deux héritiers …

Lex voyait déjà les traits du visage de Lex se tirer en une expression ouvertement furieuse, cette colère hargneuse prête à éclater à tous moments. La pupille noire de ses yeux commençait déjà à luire, signe que Sethi se réveillerait prochainement.
Aussi, Julian, d’une voix désolée, s’empressa d’ajouter :


Julian : …mais ces lois ne m’empêchent pas de t’interdire les impasses.

La furie de Lex s’arrêta instantanément, se bloquant au moment même où ces paroles parvenaient à son cerveau. Il réalisait ce que devait être le rôle d’un Gardien : agir pour la volonté des deux héritiers sans enfreindre des lois imposées par des instances supérieures. Mais ces lois pouvaient être contournées, non sans risques. Mais Julian était prêt à tout pour aider son frère à accomplir son destin, une preuve d’amour hors normes. La lueur dans les yeux de Lex s’atténua et il laissa un sourire apparaître, radieux après ce que Julian venait de révéler.

Lex : Julian, je …

Mais Lex ne put terminer sa phrase. Droit devant lui un coulissement sourd venait de détourner son attention. Il en oublia totalement ce qu’il s’apprêtait à confier à son frère, l’amour qui allait jallir de sa bouche s’évapora en quelques secondes. L’arrête séparant les deux pans de murs obliques, au bout de la salle, s’écartait étrangement laissant jaillir une intense lumière blanche. Pourtant, la lumière ne se dégageait que de par les contours minces d’une personne, dans l’encadrement. Sa silhouette, sous le contre-jour de la lumière, restait trop sombre pour être reconnue. Elle avança rapidement et s’arrêta devant la table triangulaire, face à Lex et Julian. Lex esquissa un large sourire, reconnaissant le visage chevallin de sa femme, Helen Luthor. La porte surprenante resta encore un long moment ouverte, laissant apparaître trois autres personnes, qui restèrent en retrait par rapport à Helen : Chloé Sullivan, Ian Nash et Lucas Luthor. L’ouverture, dans leur dos, se referma lentement dans un coulissement sourd, laissant la lumière disparaître à la même vitesse.
Sous le sourire de son mari, Helen lui lança ses mots au visage, d’une violence inouie :


Helen : tu comptes nous éviter encore lontemps ?!

Lex laissa un rire sortir de sa bouche ; décidément, Helen le ferait toujours rire. Il s’empressa de répondre, de ce ton enjoué, amusé :

Lex : je ne vous évite pas ! Je passe juste un peu de temps avec mon frère …

Le rire de Lex n’améliora en rien la mauvaise humeur de sa femme. Un frisson parcourut le dos de Lucas, il avait de ce qui allait suivre. Helen se renfrogna un peu plus et répliqua, d’une voix encore plus froide et colérique qu’auparavant :

Helen : tu te fous de nous ?? Lucas a toujours été avec nous !!

Lex eut un nouveau rire amusé. Une fois de plus, il devait se rendre à l’évidence qu’il ressemblait de plus en plus à son père. Il ressentait à nouveau ce sentiment enivrant, ce venin, cette drogue, qu’éprouvait son père en voyant les autres fous furieux contre lui. Cette jouissance, cette supériorité, Lex les ressentait désormais, il s’en jouait aussi habilement que son paternel et en redemandait à chaque fois un peu plus.
C’est pourquoi il attendit quelques secondes, avant de répondre, le plus calmement possible :


Lex : je parlais de mon plus jeune frère …

Lentement, le regard pétillant de malice, Lex tourna la tête sur sa droite, vers Julian. Lucas, sentait le rythme de son cœur accélérer nettement, par échelons, toutes les 5 secondes. Lex était sur le point de briser leur pacte, de morceler leur confiance mutuelle. Lex allait révéler, contre l’accord qu’ils avaient passé, l’existence de Julian.

Lex : (regardant Julian) Julian

Lucas se sentit frissonner d’une manière assez virulente, comme si un vent glacial s’était insufflé dans son métabolisme. Un vent que rien ni personne ne parviendraient à réchauffer. Lex avait osé, il avait trahi sa confiance lui qui prônait la confiance mutuelle.
Quant aux trois autres membres du Projet « Naman », personne ne semblait y croire. Pour chacun d’entre eux, Lex venait de fournir l’excuse la plus bidon qui soit. Helen traduisit par la parole ce sentiment, avant tout le monde.


Helen : Julian ?! C’est impossible, il est mort !

Lex accentua encore un peu plus ce sourire radieux, empli d’un machiavélisme éperdu et tourna lentement la tête vers sa gauche, de façon à faire de nouveau face à son auditoire. Il dévia alors son regard légèrement sur la droite de sa femme afin de croiser le regard bleu de son autre frère, Lucas. Lorsque leurs regards se croisèrent, des éclairs auraient pu les relier que cela n’aurait pas paru déplacé. Lucas en voulait terriblement à Lex, de l’avoir ouvertement trahi de la sorte. Même si aucun son ne sortait de sa bouche, il était indéniable que Lucas aurait voulu lui cracher au visage de répugnance. Préservant son large sourire, Lex poursuivit avec ces mots qui terminèrent d’acheminer en Lucas une haine irréversible envers son frère aîné.

Lex : non … avec les soins de Lucas Luthor, tout devient possible !

Chacun se tourna vers Lucas, le plus en retrait du groupe. Lex était allé encore plus loin en révélant son entière implication dans l’affaire, en ommettant le fait que Lex avait insité pour ramener Julian à Metropolis.
Lucas resta concentré, la haine battant à ses tempes, sur le visage souriant de Lex. Une voix douce se fit entendre, brisant le lourd silence. La voix de Chloé :


Chloé : personne ne peut ressuciter les morts !

Lex déporta son regard de Lucas pour le dévier sur la gauche de sa femme ; sur la petite silhouette de Chloé. La mine sérieuse, nullement touchée par l’assurance qui émanait de la personne de Lex, elle le fixait, droit dans les yeux. Lex sentait qu’un changement s’était opéré en elle, comme si un sérum l’avait lavée de toute méfiance, de toute hésitation. Il n’aurait su dire d’où se changement venait, mais il semblait irréversible.
Lex soutint son regard et reprit, d’une voix à nouveau enjouée :


Lex : personne ? en es-tu si sûre Chloé ?

Cette fois, une brillance balaya la rétine noisette des yeux sublimes de Chloé. Même si son visage demeura impassible, elle ne put dissimuler cette surprise qui caressa ses rétines oculaires. Lex avait-il eu vent de l’exploit de Chloé, à l’hopital, lorsqu’elle avait ramené à la vie Susan Despite ? Elle avait peine à le croire, personne n’était présent ce jour-là. Et pourtant … Les yeux de Lex, ainsi que son sourire radieux, semblaient indiquer qu’il savait tout.
Clignant des yeux, il poursuivit sur un ton moins accusateur, plus neutre :


Lex : les Luthor sont plein de ressources …

Chloé et Lex restèrent un long instant à se regarder mutuellement, chacune des nuances du regard de l’autre mêlées à celles de l’autre. Cet échange semblait marquer la prise de supériorité entre les deux. Aucun des deux n’aurait voulu baisser ou même cligner des yeux. Chloé se força pourtant à sourire, d’un geste plus moqueur qu’amusé.

Helen : et il sait pour la Prophétie ?

Lex dévia lentement son regard sur la droite, quittant Chloé des yeux. Celle-ci en profita pour enfin baisser les yeux et respirer plus calmement.
Lex porta ce même regard profond sur sa femme et entreprit de la regarder avec le même charisme entourant sa silhouette. Puis, après quelques secondes, il répliqua :


Lex : Julian en sait plus à ce sujet que nous 5 réunis !

La surprise tira les traits de chacun. Une expression qui fut accentuée sur le visage de Lucas. Il connaissait assez bien Julian pour savoir que ce n’était pas le cas, loin de là. « Sûrement encore un de tes mensonges » pensa-t-il.

Helen : (ton narquois) alors peut être que lui aura le droit de savoir ?
Lex : (surpris) savoir quoi ?
Helen : (haussant le ton) ce qui s’est passé dans le tombeau ! Je te signales que …
Julian : (la coupant, d’un ton froid et cassant) tais-toi … (regard planté derrière Helen, baissant le ton) on nous écoute …

Tous les membres du Projet « Naman » venaient de se tourner vers Julian, jusqu’alors silencieux. Le regard fixe, sérieux, il regardait intensément la paroi par laquelle étaient entré Helen et compagnie. Pourtant, il n’y avait rien à voir, seule la couleur immaculée de la paroi en V. Lex releva les yeux et se mit à regarder à son tour dans cette direction, absorbé par cela. Il était le seul, hormis Julian, à regarder vers cette paroi murale.
Julian avança subitement et contourna la table triangulaire par la droite et passa juste à côté de Lucas, qu’il ne regarda même pas. Il continua ainsi de marcher vers la fameuse paroi, sous les regards de chacun des membres du Projet « Naman ». De cette démarche assurée, il s’approcha rapidement du mur. Arrivé à moins de deux mètres d’elle et sans s’arrêté, il effectua un geste ample de sa main droite, formant un arc de cercle de gauche à droite en fendant l’air. La paroi blanche, devant lui, se teinta d’une lumière jaune translucide, séparée par des éclairs fins, plus clairs, sur sa totalité. Julian continua d’avancer vers elle et, sans la moindre hésitation, la traversa avant de disparaître derrière. Le blanc immaclé reprit sa place, faisant disparaître la kumière jaune translucide.
Lucas fut le premier à faire volte face, abasourdi par ce qu’il venait de faire. Il braqua sur Lex un regard à la fois effaré et furieux qui ne troubla en rien Lex. Souriant, il continuait d’observer les deux parois obliques joints en cette rainure sombre. Il attendait le retour de Julian avec impatience, rien de ce qu’il venait de voir ne le surprenait. Au contraire, il s’en ravissait au plus haut point. Chaque membre fit les mêmes gestes, à l’idem de Lucas. Ils regardèrent Lex droit dans les yeux, attendant une justification ; qui aurait pu se faire attendre une éternité.
Et soudain, sans signe avant-coureur, un cri horrible apparut dans la salle, s’élevant vers le toit pointu. Une silhouette sombre traversa la paroi que regardait Lex et fendit les airs de ce mur vers celui derrière Lex. Les membres, tournés dans cet direction, virent l’homme frapper lourdement la paroi oblique à deux mètres au dessus du sol. Malgré le choc, de plein fouet, l’homme habillé d’un long manteau noir semblable à Lex, resta comme accroché au mur. Des cris d’effarement, provenant de Chloé et Helen, se firent entendre alors que l’homme, quasiment inconscient, restait comme figé dans les airs. Lex se retourna lentement, très calme. Il leva les yeux vers cet intrus qui semblait au bord de l’évanouissement et élargit un peu plus son sourire. Il avança de deux pas, restant toujours silencieux.


Julian : il nous enregistrait !

Le même mouvement fit bouger les cinq membres du Projet « Naman » : Lex, Helen, Lucas, Ian et Lucas se retournèrent et virent, dans leur dos, la silhouette habillé de blanc de Julian. Une aura de lumière jaune émanait de sa nuque, enveloppant le bas de l’arrière de son crâne. Sous sa chemise, une autre aura jaune traversait le tissu et brillait d’une intensité palpable. Mais le plus impressionnant restait ses yeux et sa main droit. Ses yeux transparents brillaient d’une vague de lumière jaune, tournant en cercle autour de ses pupilles noires. Il avait brandi son bras droit devant lui et ouvert sa main, vers le plafond. Une boule de lumière jaune y reposait, d’où émanait une clarté si intense que l’extrémité de ses doigts n’étaient plus visibles.
L’effarement et la stupéfaction étaient de mises, pour tout le monde. Tout le monde … hormis Lex, bien sûr. Il souriait ardemment.
Lex finit par se retourner et commença à s’avancer vers l’homme, fixé à la paroi. Il s’arrêta à un mètre du mur et accentua la puissance de son regard et la teneur de son sourire. Il demanda alors à son interlocuteur, d’une voix calme :


Lex : pour qui travailles-tu ?

L’homme au dessus de lui tremblait de partout. Sa respiration était si saccadée qu’il paraissait respirer par d’autres orifices que ceux de son nez. La peur qui tiraillait son corps, de l’intérieur, semblait le tuer à petite dose. Pourtant, il sembla trouver la force nécessaire pour articuler ces mots, si hésitants soient ils :

Homme : pe-pe-per-sonne-ne …

Lex sourit, laissant un petit rire s’échapper de sa bouche. Il respectait cette resistance dont faisait preuve cet homme. Mais même s’il resistait à son frère, il ne pourrait lui resister à lui, Lex Luthor, héritier du grand Sethi. Il releva les yeux et, armé d’un sourire encore plus meurtrier, reprit :

Lex : je vais reformuler ma question : qui vous a demandé de m’espionner ?
Homme : per-sonne-ne !
Lex : (à Julian) fais le descendre !

Julian ne risqua même pas un regard vers son frère, loin devant lui. Il se contenta d’ourvrir un peu plus sa main. La sphère s’éleva dans les airs et diminua rapidement en taille jusqu’à disparaître complètement. A cet instant précis, l’emprise sur l’homme explosa : il amorça une chute rapide le long de la paroi, heurtant au passage violemment le socle dans lequel était rangé le cristal du Diaphane, toujours lumineux. Martelé par la douleur, il frappa le sol violemment, tombant sur le ventre. Il soufflait bruyamment, tant sa souffrance était intense. Mais il rassembla une nouvelle fois ses forces et, désormais aux pieds de Lex, parvint à se redresser. Non sans efforts, il se laissa aller contre la paroi, contre laquelle il s’adossa dans un nouveau gémissement douloureux ; il avait même dû fermer les yeux. Lex avança d’un pas et s’accroupit devant en lui, en enlevant les mains de ses poches. Il se stabilisa dans cette position et amena ses mains de façon à entremêler ses doigts. Il concentra son regard bleuté, extatique sur les yeux fermés de cet inconnu. Soudain, l’homme rouvrit les yeux et révéla à Lex des rétines verdoyantes.
L’homme comprit qu’il aurait mieux valu que ses yeux restèrent fermés. Les pupilles noires de Lex commencèrent à s’élargir lentement couvrant ses rétines claires. Bientôt, elles attinrent les bords des yeux de Lex : seul le noir couvrait ses globes oculaires. L’homme sentit un froid glacial pénétrer dans ses yeux. Cette sensation, effroyable, quitta le cerveau de l’homme et s’écoula rapidement vers le bas de son corps. Toute joie, tout espoir, toute volonté, quittaient son être. Le vide total … Seule cette voix, résonnant dans sa tête le guidait, une voix qui lui montrait le chemin à suivre pour revenir à la réalité tant espérée. « Pour qui travailles-tu ? ». L’écho résonna horriblement dans sa tête, pendant quelques courtes secondes. Et, enfin, il répliqua, d’une voix douce et absente :


Homme : pour Virgil Swann

Lex esquissa un sourire. Lentement, la noirceur couvrant ses yeux repartit en sens inverse, quittant le bord de ses yeux. Rapidement, ses yeux reprirent leur aspect habituel. Il se leva, décroisa ses mains et revint vers ses collaborateurs. L’ homme sentit la douleur réapparaitre dans toute son intensité : son corps semblait brisé de partout . Sans la sensation de vide, il aurait envie de mourir.
Ian prit la parole :


Ian : Swann … il pourrait devenir un obstacle !
Lex : non, je m’en occupe !

Lex, malgré le sourire qui étirait ses lèvres, sentait une fois de plus le regard glacial, empli d’une noirceur nouvelle, de Lucas. Il fixait son frère droit dans les yeux, se retenant pour ne pas hurler à pleins poumons toute la haine accumulée depuis quelques minutes.
Lex tourna lentement la tête vers lui et croisa son regard. Il accentua son sourire, lisant cette haine dans les yeux de Lucas. Ce dernier réussit à se canaliser et, d’une voix implacable, répliqua :


Lucas : ce n’est pas Julian !
Lex : (radieux) bien sûr que si ! Voyons Lucas, tu ne reconnais pas ton petit frère ?
Lucas : (haussant quelques peu le ton) Julian n’a jamais eu de tels pouvoirs !!
Julian : beaucoup de choses ont changées, Lucas …

Lucas se retourna et tourna son regard vers son petit frère, comme l’avait surnommé Lex. Un charisme effroyable enveloppait sa personne. Julian n’était plus le même, c’était un fait. Restait à savoir en quoi et pourquoi.

Julian : maintenant, je suis l’un des trois Gardiens de la Prophétie … celui du « Diaphane »

 

Le Talon – Smallville – 12h03

[If only – THE CALLING]

-Un plan de caméra plongée vers le bas filmait la totalité du salon de thé, du palier, à l’étage, près de la porte de l’appartement de Josh. Ainsi, les tables étaient toutes visibles : chacune d’elles supportant des chaises renversées, elles-même recouvertes de légers draps sombres- Au fond de la salle entièrement vide, du bruit se faisait entendre, brisant l’intense silence régnant ici-bas. Seules les faibles nuances d’une musique d’ambiance, If Only, interprétée par le groupe américain The Calling, brisait le calme impressionnant. La seule personne présente se trouvait être la co-propriétaire de ce café, Lana Lang. Ayant enlevé sa veste de tailleur pour être mieux à son aise, Lana prenait une à une chaque chaise métallique, autour de cette table, à proximité de la porte d’entrée et les retournait, avant de les poser à plat, sur la table ronde. Elle se retourna et prit un voile sombre, derrière elle, posé sur une table déjà recouverte de draps. Elle revint vers la tables et recouvrit les chaises renversées dudit drap. Enfin ! Elle avait fini !
Elle tourna les talons et revint, de ce pas rapide et assuré vers le comptoir du Talon, à l’autre extrémité du café. Comme chacun des recoins de la salle, il avait été complètement vidé des moindres accessoires, appareils et autres gourmandises autrefois rangées dedans et dessus. Seul un carton marron, fermé par un épais scotch noir, y était posé. Lana s’arrêta juste devant et le prit de ses deux mains. Elle poussa un soupir de fatigue, sentant cepoids assez difficile à soutenir. Elle tourna sur sa gauche et commença, le visage crispé, à longer le comptoir pour se diriger vers la porte ballante de la réserve, plusieurs mètres plus loin. Aucun sourire n’étirait ses lèvres, aucune lueur de bonheur dans ses yeux ; juste la stricte fermeté que lui inspirait ce moment de peine grandissante. La porte se rapprocha rapidement, à mesure que ses talons aiguille résonnaient en écho dans la grande salle de dégustation. Et soudain, alors qu’elle s’apprêtait à pousser la porte de la réserve, la cloche de la porte d’entrée teinta, tandis qu’un client entrait, malgré la pancarte posée devant le Talon. Lana ne s’en préoccupa pas. Elle accola son flanc gauche contre la porte et, à l’aide de sa hanche, poussa cette porte, sans adresser un regard au nouvel arrivant. Elle se contenta de lancer cette phrase, sur un ton neutre :


Lana : désolée, mais nous sommes fermés !

Lana n’attendit même pas d’avoir une réponse ; le carton était beaucoup trop lourd. Elle passa dans l’embrasure de la porte et pénétra dans l’atmosphère confinée de la réserve. Une pénombre presque totale envahissait les lieux, rendant les détails impossible à distinguer. Elle s’approcha du mur sur la droite et s’arrêta devant. Elle entreprit de s’accroupir, très lentement pour ne pas se blesser au dos et déposa délicatement sur le sol dur le carton. Ceci fait, elle souffla bruyamment, les bras et les épaules meurtris par le poids que contenait le carton. Elle se redressa et, après avoir repris son souffle, se baissa de nouveau, légèrement sur la droite du carton. Elle saisit une lanière et l’amena à son épaule, en soupesant à nouveau un poids, bien plus léger. Elle hissa la lanière vers son épaule droite et la posa dessus : il s’agissait d’un sac de voyage bleu. Le visage à nouveau crispé par la peine, de plus en plus présente sur son magnifique visage, ses cheveux tombant sur ses épaules, elle poussa de nouveau la porte, à l’aide de sa hanche gauche. Elle fit une volte sur elle même et se remit droite en pénétrant dans la salle de dégustation, baignée de lumière.
Au moment où elle entendit la musique plus puissamment que dans la réserve et sentit la lumière jaillir à ses yeux brillant, Lana put apercevoir, tout en continuant de marcher, le client qui était entré, à l’instant où elle-même entrait dans la réserve. Pour toute autre personne, elle se serait mise en colère et aurait menacé d’appeler la police s’il ne sortait pas à l’instant même. Mais, quand cet homme massif, vêtu d’une veste en cuir, détourna son regard du comptoir pour se tourner vers Lana, cette dernière ralentit sa marche et esquissa un large sourire, faisant ainsi disparaître toute sa rancœur … Kelhan, son petit ami, l’attendait près du comptoir. Kelhan se tourna vers elle et, armé d’un sourire radieux, regarda Lana baisser les yeux, radieuse. Il en profita pour s’exclamer, d’une voix où perçait l’humour :


Kelhan : moi qui espérait un capuccino !

Lana releva les yeux et continua d’avancer vers lui.

Lana : je suis désolée, cher Monsieur, mais je pense que vous devriez prendre un abonnement chez un de nos concurrents … Les capuccinos risquent de se faire rares d’ici quelques temps …

Kelhan esquissa à son tour un sourire radieux alors que Lana s’arrêta devant lui. Cette brillance, dans les yeux bruns de Lana, lui donnait un charme unique au monde. Kelhan ne put empêcher son sourire de s’accentuer un peu plus, avant que Lana ne lui demande, sur un ton doux et tendre :

Lana : qu’est ce que tu fais là ?
Kelhan : j’affrétais la limousine de ma princesse !

Lana émit un gémissement de bonheur, ne croyant pas à son bonheur. Elle avança encore un peu plus vers son petit ami de façon à se coller presque à lui et entoura de ses bras minces son cou musclé. Rapprochant son visage du sien et gardant un long instant son sourire, Lana déposa alors doucement l’extrémité de ses lèvres sur celles de Kelhan, échangeant avec lui un doux baiser. Kelhan s’empressa de lui en donner un, à son tour, tout aussi délicat avant qu’un troisième ne vienne clore cet échange affectif. Fermant les yeux, Lana s’écarta de son visage. Elle finit par rouvrir les yeux et, redevenant un tant soit peu sérieuse, détacha son étreinte du cou de Kelhan et amena sa main droite vers la main en face d’elle, de Kelhan. Elle entremêla l’extrémité de ses doigts avec ceux de son petit ami.
Kelhan amenuisa à son tour son sourire, calquant son sérieux sur celui de Lana.


Kelhan : tu es sûre que tu veux le faire ?
Lana : (grave) oui … et puis d’un autre côté, je n’ai plus vraiment le choix !

Kelhan demeura le plus sérieusement du monde. Il regardait Lana droit dans les yeux, d’un regard empli d’une affection toute particulière. Il aimait plus que tout la protéger et détestait au plus haut point la voir souffrir. Et même si elle n’en disait rien, il ressentait sans difficultés la peine intense que lui procurait de se séparer du Talon, le lieu de recueil de son adolescence. Lana soutint un long instant son regard, d’une profondeur exaltante. Même sans les mots, Kelhan avait ce don de lire en elle et de la réconforter, avec une efficacité à toutes épreuves. Elargissant son sourire, Kelhan ajouta pourtant :

Kelhan : tout ira bien, je te le promets !
Lana : (sérieuse mais souriante) je le sais … c’est pour ça que je veux vivre avec toi !

Kelhan aurait aimé prendre de nouveau possession des lèvres de Lana mais il pensait qu’elle avait besoin de rester plongée dans ses pensées, même si cela devait la faire souffrir. Aussi, il se contenta d’approcher sa main droite, la libre, de l’épaule droite de Lana. Il souleva la lanière de l’épaule et amena le sac à son épaule droite, sur laquelle il la posa. Etreignant la main de Lana, il passa sur sa gauche et la força à le suivre, main dans la main. Le visage marqué par la douleur sentimentale qui la tiraillait de parts en parts, Lana finit par se retourner et suivit son petit ami, qui l’amena à arpenter une ultime fois, l’allée principale menant à l’entrée du café. –La musique s’intensifia, seules ses nuances envoûtantes se faisant entendre, couvrant les bruits de pas- Lana suivait de près Kelhan, juste devant elle. Elle porta son regard sur la droite, caressant de la rétine de ses yeux les tables rondes, supportant les chaises renversées et couvertes de draps sombres. Elle voyait presque assis autour de cette table, Clark, Chloé et Pete, riant avec effervescence.
Elle détourna son regard, les ombres de ses amis se dissipèrent en un léger coup de vent ; elle en avait presque les larmes aux yeux. Kelhan passa entre deux pilonnes rond, jaune pâle, entre lesquels Lana passa à son tour. Elle avait l’impression de tout voir au ralenti, comme si cette sortie marquait le passage de l’adolescence à la vie d’adulte : ce qui était le cas. Enfin, après des secondes que Lana ne vit pas passer, Kelhan arriva à hauteur de la porte vitrée, traversée en son centre d’une barre en fer servant de poignée. Le jeune homme posa sa main dessus, prêt à la tirer vers lui pour l’ouvrir. Lana se retourna une dernière fois et observa l’espace de la salle. Sa voix sembla se répercuter en écho et le son devenir bien bas, sourd, couvert par la musique :


Lana : attends …

Kelhan se retourna vers sa petite amie, assez surprise par ce mot et la vit lâcher sa main pour se diriger vers le mur, sur leur gauche. Lana s’en approcha et s’arrêta devant. Elle leva sa main droite au dessus de l’interrupteur situé le plus haut des trois dans le mur. Elle laissa son index en suspend et tourna la tête sur sa gauche, regardant la salle s’étendre jusqu’au fond, au pied de l’escalier menant à l’appartement de Josh.
[SLOWING DOWN -Enfin, elle abaissa l’interrupteur : au fond de la salle, au dessus du comptoir, les lumière s’éteignant, plongeant cette partie de la salle dans la pénombre. Lana amena sa main, lentement, vers l’interrupteur du dessous, sans détacher son regard de la salle. Elle l’abaissa à son tour : toutes les lumière séparant le comptoir de l’entrée du Talon s’éteignirent. Lana descendit sa main vers le dernier interrupteur. Elle laissa son index en suspend, pendant de longues secondes. Et enfin, d’une lenteur indescriptible, elle l’abaissa. Les lumière, au dessus d’elle et Kelhan s’éteignirent, ainsi que la bannière lumineuse, à l’extérieur du café. Une larme perla à l’œil de Lana. Elle venait de dire adieu à une partie de sa vie.
Elle baissa les yeux, vers le sol devenu sombre et laissa la larme rouler lentement de son œil droit vers l’extrémité de sa bouche. Enfin, après de longues secondes, elle releva la tête et tourna son regard vers Kelhan, un peu plus loin. Elle finit par esquisser un sourire, malgré la larme qui faisait luire sa joue, sur toute sa longueur. D’un pas lent, elle s’approcha de Kelhan, qui la regardait, radieux. Lana prit sa main dans la sienne et le suivit au dehors, alors que la porte se refermait derrière eux- FIN]
-La caméra leva son plan vers la vitre de la porte et filma au travers, les gens qui passaient sur le trottoir, devant l’entrée du Talon. Par un phénomène étrange, la caméra les filma en passant à une vitesse accéléré, comme si le temps avait décidé de faire un bond dans le temps-
-Une lumière blanche illumina l’image avant de créer un fondu superbe. Ainsi, peu après, un nouveau plan de caméra, survolant la foule de Metropolis, révéla un trottoir bordant l’une des grandes avenues de la métropole. Une foule effarante se mêlait dessus, dans un pas effréné. Pourtant, une silhouette parmi toutes les autres se détachait, de par se démarche et son assurance. Les cheveux noirs devenus très épais, il était vêtu d’un maillot de corps noir. L’esprit de Kal-El était de plus en plus présent en Clark Kent-
-La caméra le quitta et, se tournant vers une tour de verre et d’acier, sur sa gauche, remonta rapidement le long de sa paroi, faisant apparaître à chaque étage, de nombreux balcons, semblables à celui de Loïs Lane. Arrivée à un étage bien précis, elle s’immobilisa et filma l’un des fameux balcon : Kelhan et Lana, blotti l’un contre l’autre, se tenaient au pied de la rambarde de verre et regardaient, radieux, le soleil se coucher au loin. Lana semblait au paroxysme du bonheur-
-Un dernier flou laissa disparaître le couple heureux et fit apparaître une cage de verre, rectangulaire. De forme arrondie, elle laissait voir sans peine ce qui se trouvait à l’intérieur : un homme nu. Une cicatrice étonnante marquait le haut de son torse. Une lumière rouge vif s’en dégageait, comme jaillissant de l’intérieur de son corps. De nombreux fils transparents étaient plantés dans tout son corps, faisant ressortir son sang, inlassablement. Malgré ses paupières fermés et ses cheveux rasés, son visage restait aisément reconnaissable : il s’agissait de Josh Servant. Anu’kh était sur le point de faire de lui un tout autre homme. Sa renaissance était proche-
-Le dernier plan montra la porte vitrée du Talon. En son centre, une pancarte bleue indiquait, en lettres rondes blanches :

« PERMANENT CLOSURE »

 

Dôme Artificiel – Hors de l’Espace --- Hors du Temps

Face à face, Jonathan, vêtu d’une chemise noire et Jor-El, vêtu d’une longue toge blanche, venaient de tourner la tête dans la même direction, soit sur la droite pour Jonathan et sur la gauche pour Jor-El. Mais l’expression de leur visage se rejoignaient par leur ressemblance : tous deux étaient effarés par la présence d’Anu’kh dans le dôme, bien que ce n’était pas pour les mêmes raisons –Jor-El ne pensait pas qu’il pourrait venir jusqu’ici et Jonathan le croyait mort sur Krypton-.
[La caméra longea le sol blanc, le filmant au ras de sa surface et s’éloigna ainsi des deux pères de Clark pour s’approcher, à une vitesse fulgurante d’Anu’kh, à plusieurs mètres d’eux. Arrivée à ses pieds, elle redressa son plan et fit défiler son corps d’un travelling vers le haut jusqu’à figer son objectif à hauteur de son visage. Un large capuchon de tissu rouge vif recouvrait sa tête et une ombre très épaisse, semblable à un liquide noir, dissimulait son visage mystérieux]
Le Sauveur avait croisés les bras dans ses manches de tissu rouge, épaisse. La manche droite était brodée d’une suite de caractères d’origine Sethi, de couleur blanche. Toute sa personne scintillait d’une aura rougeâtre, mêlée d’un orangé translucide qui rendait sa présence presque fantomatique. Il luisait étrangement au milieu du blanc immaculé du dôme.
Lentement, Anu’kh décroisa ses bras et les enleva de ses larges manches, dévoilant ainsi deux mains légèrement bronzées ; la droite portait, jusqu’à mi dos de la main, un tatouage noir d’origine Sethi. De ce geste nonchalant, il amena ses deux mains à plat, l’une contre l’autre, sentant le regard de ses deux acolytes captivés par ce geste. A partir de cet instant, la lumière éclatante, d’une blancheur inégalable commença à s’atténuer rapidement. La nuit semblait tomber sur le dôme et envahir la moindre parcelle d’espace. Surpris, Jor-El et Jonathan relevèrent les yeux et braquèrent leur regard sur le plafond en pointe de la pyramide. Un phénomène étonnant apparut alors à leur yeux : une épaisse couche de noir descendait de la pointe de la pyramide et recouvrait chacune de ses parois obliques, tel une déferlante d’ombres à l’aspect liquide. Jonathan suivit la descente de la substance visqueuse des yeux et la vit arriver à la base du sol. L’étrange matière s’affaira à recouvrir le sol plat et lisse, se rapprochant du centre. A cet endroit, les quatre parties du fluide obscures se rejoignirent et firent jonction. Le phénomène s’interrompit : le dôme auparavant d’une blancheur immaculée avait finalement viré à un noir intarissable, envahissant chaque centimètre carré de la pyramide. Jonathan ramena son regard vers Anu’kh, qui était resté dans la même position.
Jor-El en fit autant et même mieux, dans l’espoir de prouver à son ennemi qu’il n’avait pas peur de lui. Il se détourna complètement de Jonathan et se tourna vers Anu’kh. Il avança de deux pas, s’écartant un tant soit peu de Jonathan, qui resta, lui, immobile. Le visage de Jor-El se crispa et laissa disparaître la bienveillance qui creusait jusqu’alors ses traits. La chaleur dans ses rétines bleues se transforma en froid glacial et tout sourire s’atténua. Une haine implacable naissait dans ses traits âgés. Anu’kh le répugnait plus que tout. Gardant les bras le long de son corps, Jor-El serra intensément ses poings, le plus fort qu’il put. Ses veines ressortirent alors assez étrangement, signifiant réellement qu’une haine circulait dans ses veines, au sens propre comme au figuré.
La réplique prononcée par Anu’kh ne fit qu’accentuer cette fureur folle :


Anu’kh : les deux pères du jeune Kal-El oeuvrant main dans la main … (air faussement touché) que c’est touchant !

Jonathan, lui, n’avait plus quitté Jor-El des yeux. Contrairement à la scène du conseil d’Alehi, dans la mémoire de Krypton, plus aucune peur ne se dégageait de la personne de Jor-El ; peut être parce qu’il était déjà mort ou, peut être parce qu’il voulait protéger son fils, coûte que coûte … Jonathan, enivré par cette pensée et la sensation qui l’accompagnait, se détourna de sa posture initiale et avança à son tour, avant de s’arrêter sur la droite du père biologique de Kal-El. Surpris, celui-ci tourna furtivement la tête vers sa droite et vit Jonathan, à ses côtés. Ce dernier ne détourna pas son regard devenu dur, braqué sur Anu’kh. Tous deux feraient front, main dans la main comme venait de dire Anu’kh. Jor-El finit par revenir, du regard, sur Anu’kh.

Anu’kh : hey bien Jor, tu n’es pas content de me revoir ??

La réponse à cette question était plus qu’évidente. Bien sûr que non il n’était pas content de le revoir, il était même certain jusqu’à quelques minutes plus tôt, qu’ils ne se reverraient plus jamais. La résurrection d’Anu’kh avait donc marché à la perfection et, contre toute attente, il avait retrouvé ses pouvoirs à une vitesse fulgurante, ce qui n’était pas pour rassurer Jor-El.
D’un autre côté, il n’était plus tout à fait seul : Jonathan le soutenait, désormais. Avec son appuie, Kal-El était un peu plus en sécurité. Aussi, Jor-El esquissa un léger sourire et reprit, d’un ton amusé :


Jor-El : finalement, tu avais raison : rien ni personne ne peut t’arrêter, pas même la mort …

Dans la tête de Jonathan, la voix de la raison lui murmura « As-tu réellement raison de lui faire pleinement confiance, de lui confier la vie de ton fils unique ? ». Mais extérieurement, Jonathan demeura impassible et continua de fixer Anu’kh d’un air froid et appuyé.

Jor-El : … personne … personne à part l’élu !

Jonathan esquissa un semblant de rictus. Il avait eu raison, Jor-El et lui seraient liés par la destinée colossale de leur fils. Ils affronteraient les dangers, quels qu’ils soient. La voix de la raison s’était tue à l’instant où la confiance de Jonathan atteignait son paroxysme.
Mais cette phrase, emplie d’assurance, ne sembla pas décourager Anu’kh. Au contraire, il s’en ravissait.


Anu’kh : ton frère n’est plus un obstacle, je dirais même qu’il n’est plus … tout simplement !

Anu’kh avait espéré, mieux, il était certain que suite à ces dires, le sourire de Jor-El allait disparaître. Après tout, même si Josh n’était que le clone d’Ava-El, il n’en restait pas moins son frère. Mais le père biologique de Clark se contenta d’élargir son sourire ; il laissa même un petit rire amusé s’échapper de sa gorge, au moment où il clignait des yeux. D’un air moqueur, il répondit à son homologue Kryptonien :

Jor-El : Anu’kh, Anu’kh, Anu’kh … je t’ai connu moins naïf tu sais ! … tu croyais réellement que le conseil allait confier l’avènement du dernier fils de Krypton à un simple clone, créé en laboratoire ? Tu me déçois tu sais …

Le ton moqueur utilisé par Jor-El, allié aux paroles ouvertement blessantes, suffirent à calmer Anu’kh dans son extrême suffisance. Il n’avait pas pour habitude de se faire avoir de la sorte. Mais Jor-El semblait bien sûr de lui. Aussi, le Sauveur observa Jor-El, souriant, qui poursuivit sa phrase :

Jor-El : tu ne sais rien de cet élu, tu peux en être sûr ! Lui même ne savait pas qu’il l’était avant de débuter son apprentissage. Cette phrase, de la Prophétie, aurait due te mettre sur la voie : « Elu parmi les siens, il obscurcira les ténèbres et illuminera la voie céleste. Son pouvoir ancestral sera la clé et non la finalité ». L’élu terrien est celui qui permet l’accès au savoir. Et comme je l’ai façonné pour qu’il aide Kal-El, l’héritier du mal n’a aucune chance … Personne ne peut l’élu, ni Kal-El, ni l’héritier du mal, ni même moi …

Tant de révélations en si peu de temps paraissaient surnaturelles aux yeux de Jonathan, surtout après tout ce qu’il avait dû assimilé. Un homme, sur Terre, était indestructible et opérait pour le bien de Clark. Quoi de plus rassurant ?
Anu’kh ne tarda pas à retrouver cette assurance éternelle qui caractérisait sa personne.


Anu’kh : personne n’est indestructible … je le tuerai, c’est inéluctable !

Malgré tout ce que Jor-El venait de dire au sujet de cet élu, Anu’kh ne se décourageait pas : il voulait l’éliminer. Puissance inégalable ou folie totale ? Jonathan aurait tant voulu avoir une réponse à ce dilemme. Mais peut être qu’il détenait un peu des deux, ce qui n’aurait pas paru totalement absurde.
Anu’kh finit par séparer ses deux mains, toujours étroitement liées et laissa son bras gauche revenir le long de son flanc. Il amena, dans le même temps, sa main droite à hauteur de son bassin et l’ouvrit de la même manière que s’il avait serré une boule. A cet instant, une lueur d’un rouge flamboyant apparut dans le creux de sa main. L’aura de lumière éclaira l’ombre, sur le visage d’Anu’kh, sans la dissiper et éblouit sa main bronzée. La lumière était telle qu’elle parvenait même à jaillir sur les vêtements de Jonathan et Jor-El, pourtant à plusieurs mètres de leur ennemi.
La sphère, tout d’abord de la taille d’une balle de ping-pong, gagna rapidement en taille. En tout juste quelques secondes, elle atteignit la taille et la forme d’une balle de tennis. A la différence près, que sa surface liquéfiée était d’un rouge éclatant et que son noyau était constitué d’une lumière blanche immaculée. Anu’kh écarta lentement les doigts de sa main, libérant la sphère. Elle s’éleva au dessus de sa paume et, flottant dans les airs, se mit à tournoyer sur elle-même. Anu’kh entreprit d’avancer vers Jonathan et Jor-El, s’arrêtant juste devant eux.


Anu’kh : mais revenons-en à la raison première de ma venue ici : le père adoptif de Kal-El … en d’autres termes, vous, Jonathan Kent …

Jonathan sentit son rythme cardiaque s’emballer et une fièvre impressionnante s’emparer de la totalité de ses sens. Anu’kh ne se trouvait plus qu’à quelques centimètres d’eux et Jor-El ne bougeait pas, il semblait figé.
Anu’kh continua d’avancer vers Jonathan et s’arrêta à moins d’un demi mètre de Jonathan. Ce dernier voyait cette ombre liquéfiée, aux reflets inquiétants, devant lui. Cette ombre qui dissimulait le visage d’Anu’kh. Le visage apeuré de Jonathan, désemparé, se reflétait dans l’obscurité qui envahissait le capuchon aux bords rouge vifs. Jonathan ne sentait plus son corps, figé par le pouvoir ultime d’Anu’kh. Son cerveau agissait, mais son corps restait immuable. Ses sens ne répondaient plus, seul Anu’kh avait l’emprise sur lui.
Jonathan tourna les yeux, d’un geste furtif et inquiet, sur sa gauche et vit Jor-El, tout aussi immobile. Le pouvoir d’Anu’kh était sans équivoque : les deux pères de Kal-El restaient figés sur place, sans pouvoir faire un geste. Le vide total envahissait l’esprit de Jonathan, accompagnée de cette douceur familière. Ses inquiétudes, pourtant, restaient bien présentes. Anu’kh avança un peu plus son visage vers Jonathan, ce dernier entendit sa voix résonner dans sa tête :


« Jonathan … j’ai les moyens de vous montrer l’avenir qui attend Clark … laissez-vous tenter … »

Jonathan savait que cela n’était pas préférable ; qui aurait pu savoir les répercutions qu’aurait l’intrusion d’Anu’kh dans son esprit. Et pourtant, son cœur ouvrait les portes au Sauveur. Il en profita rapidement. Sa main droite se referma sur la sphère de lumière rouge et l’éteignit, ce qui provoqua un sentiment et un phénomène étrange : le dôme fut envahi d’un froid glacial implacable et d’une pénombre inaltérable. Seules les silhouettes de Jonathan et d’Anu’kh, l’un en face de l’autre, restèrent éclairées, par un faible faisceau d’une blancheur très pâle, tombant du plafond. Jonathan écarquilla les yeux, en observant ce que Anu’kh réalisait.
Une ombre presque translucide, d’un noir luisant s’échappait du milieu du torse d’Anu’kh. Une ombre obscure, aux reflets blancs luisants. Elle semblait constituer une forme semblable un filet de fumée, qui s’échappait petit à petit du corps du Sauveur, ce qui provoquait le froid glacial environnant. Jonathan, sans pouvoir réagir, vit l’ombre percer son torse et entrer en lui à une vitesse effarante. Il comprit alors que le froid qui englobait le dôme n’était rien comparé au froid qui matérialisait l’ombre, désormais complètement entrée en lui. Un flash lumineux, d’une rare blancheur, aveugla les yeux de Jonathan. Lorsqu’il put les rouvrir, un tout autre endroit se présentait à ses yeux.
En effet, rien n’aurait pu être comparable avec le dôme artificiel envahi de noir, ou de blanc, si paisible. Mais la différence était si frappante, la peur que provoquait cet endroit si puissante qu’on venait réellement à penser si un tel endroit pourrait exister un jour, même dans l’esprit le plus machiavélique qui soit. Le ciel était couvert d’une couche nuageuse d’un pourpre vif, teinté en plusieurs endroits d’épais nuages noirs. Par instant, un faible éclair venait illuminer une partie de nuage, bien que le grondement se faisait très lointain. Aucun rayon de soleil, aucune parcelle de ciel bleu n’aurait pu traverser cette couche nuageuse pour le moins surprenante. Une pluie diluvienne se déversait à grands flots de ces énormes nuages et frappait le sol avec une force sans égale. Au dessous, cet homme, torse nu, ne semblait pas s’en préoccuper. A genoux sur le sol dur, ruisselant d’eau, il avait la tête baissée et le regard meurtri par ses sentiments. La pluie faisait briller son corps musclées, ruisselant de l’eau continuelle.
[La caméra effectua un plan en contre-plongée, restant fixée sur le sol dur. Ainsi, elle filma le haut du corps de l’homme]
Une cicatrice impressionnante marquait tout le haut de son corps : un 8 encadré d’un pentagone. Ses yeux bleus étaient baignées de larmes, se mêlant à l’eau de pluie qui inondait déjà son visage carré … Clark KENT. Pour une raison obscure, Clark fixait le sol du regard, submergée par une vague de larmes qui ne semblait pas pouvoir s’arrêter. Il regardait ses mains, posées à l’envers sur ses genoux. Elles étaient couvertes de sang, un sang encore humide …
Soudain, un éclaire zébra le ciel ténébreux et éclaira ce qui entourait Clark : une spirale de tombes plantées tout autour du jeune Kent. Mais la lumière disparut et empêcha d’en lire les inscriptions.
[La caméra, malgré la pénombre, effectua un travelling circulaire, de devant les tombes]
Un nouvel éclaire zébra le ciel sombre et permit de lire les inscriptions mortuaires : « Lewis Lang ; Laura Lang ; Lana Lang ; Leyana Leon ; Pete Ross ; Chloé Sullivan ; Loïs Lane ; Martha Kent et … Jonathan Kent ». La pénombr revint dans ce pseudo-cimetière.
[La caméra s’éleva au dessus de Clark et filma le terrain qui s’étendait tout autour de Clark]
Un troisième éclaire zébra le ciel, d’une intensité encore accrue. Ainsi, on put voir que ce n’était pas une spirale de tombes qui entourait Clark mais une centaine, peut être même plus. Assis à leur point d’orgue, Clark semblait en être l’origine, le responsable.
[Le plan suivant montra Clark, filmée en contre plongée]
Un éclaire zébra de nouveau le ciel rouge et ombre et une autre silhouette apparut dans le dos de Clark. La réplique parfaite du jeune Kent … Kal-El. Debout, le Kryptonien était vêtu d’un jean grisé et d’une chemisette noire. Son regard glacial et son sourire de dément le rendaient terrifiant. L’eau de pluie inondait également son épaisse chevelure ténébreuse mais, peut être parce qu’il n’était pas là depuis longtemps, son visage blanc ne ruisselait pas d’eau de toutes parts.
Sans un sourire, sans même un rictus, Kal-El s’avança vers Clark et de sa main droite, saisit puissamment le cou du jeune Kent. De cette étreinte inébranlable, Kal-El souleva Clark de terre et l’amena vers lui sans que ce dernier ne manifeste la moindre réticence. Kal-El força Clark, le visage toujours baigné de larmes à se blottir contre le torse de son homologue Kryptonien et passa son bras gauche autour de son cou. Il enleva sa main droite du cou et la porta au sommet du crâne de Clark. L’étreinte si puissante, si possessive que même si le jeune Kent avait essayé de s’en défaire, il n’en aurait eu aucune chance. Et, de toutes manières, hormis pleurer toutes les larmes de son corps dans un quasi-silence, Clark ne semblait pas prêt à se débattre. Kal-El resserra un peu plus son étreinte, son regard froid braqué droit devant lui. Tandis que la pluie commençait à couler, à la verticale, dans les traits de son visage, un rictus effroyable étira ses lèvres. Il lança alors ces mots, dans la nuit noire :


Kal-El : père avait raison : ton humanité t’a affaibli ! Tu n’avais aucune chance contre moi …

Kal-El accentua alors son petit rictus, ravi à l’idée d’éliminer la seule barrière, plus minime qu’il ne l’avait pensée, à sa destinée. D’un geste vif il tordit le cou de Clark, faisant craquer bruyamment ses cervicales. Le bleu des yeux de Clark se vida de toute expression, bénéfique ou négative, et l’expression de son visage se figea en une stupeur mêlée d’effroi. Kal-El détacha son étreinte du cou de Clark et le laissa tomber sur le sol dur et poussiéreux, à ses pieds. Dans un bruit mat, le corps désormais inerte de Clark s’affala contre le bas des jambes de son meurtrier.
A la fois ravi et dégoûté par la vue de Clark, Kal-El recula de deux pas, donnant un petit coup au corps mort de Clark.
[Un plan en contre-plongée, fixé au sol, montra en premier plan le cadavre de Clark et, un peu plus loin, la haute silhouette massive de Kal-El. En arrière plan fut visible le ciel pourpre et obscure : un nouvel éclaire le zébra]
Kal-El releva alors lentement la tête droit devant lui et continua ce geste, jusqu’à lever les yeux vers le sol. Il laissa de courtes secondes l’eau ruisseler sur son visage, traversé d’un large sourire machiavélique. Il croisa les bras sur son torse, restant dans cette même posture.
[La caméra s’écarta de lui et le filma dans son ensemble, Clark allongé sur le sol]
Le temps sembla ralentir, étant donné que des cercles de vitesse, brouillés, entourèrent les pieds de Kal-El et provoquèrent des vagues de puissance sur le sol, leur point d’origine étant les pieds du Kryptonien. Il fléchit légèrement les jambes et, l’instant suivant, il s’éleva dans les airs dans un bruit assourdissant laissant dans son sillage un sillon de vitesse, brouillée. Tandis que Kal-El s’envolait vers sa destinée dévastatrice, le seul capable de l’en empêcher gisait sur le sol du cimetière.
[La caméra fit un gros plan sur le visage mort de Clark, plaqué contre le sol dur du cimetière]
Un deuxième flash blanc aveugla Jonathan qui comprit que la vision était terminée. Il se sentit respirer profondément, comme s’il respirait pour la première fois réellement depuis quelques minutes. Il ouvrit les yeux et sentit le froid glacial se réunir, de toutes parts, pour se rejoindre au centre de son abdomen. Surpris, Jonathan baissa les yeux –sa tête ne pouvait toujours pas bouger, ainsi que ses membres- et put voir ce nouveau phénomène sans pareil.
L’ombre noir, caractérisant l’esprit machiavélique d’Anu’kh ressortait du corps de Jonathan aussi vite qu’il y était entré. En tout juste quelques secondes, le spectre se trouva à flotter littéralement entre Jonathan et Anu’kh. Le père de Clark ne pouvait le quitter des yeux. Pourtant il aurait dû le faire, il le savait : une fois que l’ombre avait quittée le corps d’Anu’kh, l’ombre dissimulant son visage s’était atténuée, Jonathan aurait pu identifier son visage. Mais son regard bleu ne parvenait à se détacher de l’ombre. Elle cessa alors de flotter à mi-hauteur, en des gestes amples, et traversa le bassin du Sauveur. Toute nuances de sa forme disparut alors et la pénombre envahit de nouveau son visage énigmatique, son le capuchon rouge. Le froid environnant disparut à son tour et Jonathan releva les yeux vers le visage d’Anu’kh. Il vit de nouveau son visage se refléter dans l’ombre du visage d’Anu’kh, tel un miroir obscure. Jonathan et Jor-El retrouvèrent leur liberté de mouvement.


Anu’kh : (voix profonde) est-ce cela que vous voulez pour votre fils ?

La réponse était bien évidente aux yeux de Jonathan, pourtant il ne dit pas mot. Il resta immobile, à écouter le rythme de son cœur battre de façon frénétique à ses tempes, dans un bruit mat assourdissant. Il baissa les yeux vers le sol noir, sans tâche et se mit à réfléchir. Dans cet endroit, toute pensée, tout fait émanait de l’esprit du maître des lieux. Lorsque Jor-El était ce maître, il lui avait montré l’antique Krypton et lui avait, soi-disant prouvé que le peuple Kryptonien voulait pour Clark une destinée pacifique, une destinée de Sauveur.
Mais Anu’kh venait de montrer que si Clark persistait dans cette voie, il y trouverait la mort. Kal-El le tuerait et dominerait la Terre. Que devait-il choisir ?
Jor-El sentait cette hésitation, cette frustration qui grandissait dans l’esprit de Jonathan. Le descendant de Sethi avait une nouvelle fois réussi à semer le doute.


Jor-El : (furieux) peu importe ce que tu as voulu lui faire croire, je ne te laisserai pas nuire à mon fils !
Anu’kh : (calme) la seule véritable menace de Clark reste lui même ! Tu me croiras si tu veux, mais je ne veux qu’aider Kal-El à trouver la voie qui découle de sa véritable nature …

Soudain, Anu’kh recula en supervitesse vers le centre du dôme, créant des sillons de vitesse rougeâtre autour de lui. Il avait senti cette haine irrépréhensible gravir ses derniers échelons en Jor-El. Il ne pouvait se permettre une lutte pas maintenant, pas ici, il le savait pertinemment.

Anu’kh : je sais que vous ferez le bon choix, Jonathan …

Les derniers mots prononcés par Anu’kh résonnèrent dans un écho interminable tandis qu’une lueur rouge, d’une aura sans égale apparaissait au niveau du centre de l’abdomen d’Anu’kh. Six branches de lumière la quittèrent et embrassèrent le corps du Sauveur de toutes parts, le couvrant de lumière flamboyante. Avant que Jor-El n’ait eu le temps de réagir, Le Sauveur disparaissait dans un éclair lumineux, d’une rare vivacité.
Une couche de peinture blanche, immaculée, tomba du sommet pointu de la pyramide et recouvrit en quelques secondes chacune des parois, auparavant obscures, du dôme artificiel. Il venait de reprendre son aspect d’origine.
Affolé, Jor-El se tourna vers Jonathan et s’empressa de lui poser cette question :


Jor-El : Jonathan, que vous a-t-il fait ?

Le seul regard de Jonathan ouvrait les portes de son esprit tourmenté. « Les yeux sont le miroir de l’âme », se plaisaient à dire certains écrivains. Mais en cet instant, cela ne paraissait plus une simple tournure de phrase, mais une vérité inébranlable. La peur étalait chacune de ses nuances dans le bleu claire qui inondait le regard de Jonathan. Une peur effroyable, une peur indestructible, une peur qui hanterait Jonathan jusqu’à la fin de ses jours … Il avait perdu tout contact avec la réalité du dôme, la voix de Jor-El paraissait si lointaine. Cette vision lui avait paru si réelle : Kal-El étranglant son fils …il souriait devant son acte …Jonathan se sentait trembler de partout. Et la voix d’Anu’kh, cette voix étonnement veloutée : « Est-ce cela que vous voulez pour votre fils ? ». Il avait si peur, encore plus qu’avant de s’entretenir avec Jor-El !

Jor-El : Jonathan !!

Le père biologique de Clark avait dû joindre la télépathie à la parole, Jonathan était trop absorbée par la peur. Ce mot résonna dans la tête de Jonatha, et le fit sortit un peu trop brutalement de ses pensées. Il tourna de manière vive la tête sur sa gauche et adressa à Jor-El un regard écarquillé :

Jonathan : oui ?
Jor-El : qu’est ce qui s’est passé ?

Jonathan baissa instinctivement les yeux, n’osant répondre immédiatement : son esprit était encore trop flou pour apporter une réponse claire. Il reporta son regard devant lui, sur la gauche de Jor-El et fixa un très long instant le sol, sous le regard attentif de Jor-El. Et, enfin, il répliqua :


Jonathan : Anu’kh m’a … m’a montré l’avenir de … Clark.
Jor-El : (inquiet) oui ?
Jonathan : s’il poursuit sa destinée, Kal-El le …tuera !

Sur ce dernier mot, prononcé plus fortement que les précédents, Jonathan se retourna vers Jor-El et lui adressa un regard profond, empli de sentiments resurgis de nulle part.
Jor-El baissa à son tour la tête, sachant pertinemment ce que ressentait Jonathan.


Jor-El : je comprends ! Mais … (il releva les yeux vers Jonathan) vous ne devez pas prendre cette vision au sérieux !
Jonathan : (abasourdi, furieux) pas la prendre au sérieux ?! Je viens de voir mon fils mourir devant mes propres yeux, et vous me demandez de ne pas le prendre au sérieux !
Jor-El : non, vous ne me comprenez pas !

A chaque phrase prononcée par Jor-El, Jonathan sentait sa colère gravir quelques nouvelles marches, malgré le fait qu’elles visaient à rassurer le père adoptif de Clark. Jonathan avait l’impression de revoir, dans toute son ampleur, le Jor-El qu’il avait tant haï jusqu’à aujourd’hui.

Jonathan : (criant) oh si je vous comprends parfaitement ! Comme d’habitude, rien ne vous importe plus que la destinée de Clark ! Je ne …

Jor-El venait d’amener sa main droite à hauteur de son bassin et ouvrait les doigts : une lueur blanche apparut dans son creux, illuminant les alentours de sa pureté. Jonathan se sentit envahi d’une énergie nouvelle, alliée à cette douceur implacable. Une sorte d’espoir naissait de cette aura blanche, reflétant sur lui.

Jor-El : Jonathan, vous devez me faire confiance ! Tout comme son aïeux, Sethi, Anu’kh a le don de manipuler les esprits les plus aiguisés avec une habileté sans partage. Ce pouvoir a valu la destruction de Krypton, je vous en pries, ne faites pas la même erreur !

Jonathan vit cette lueur blanche refléter dans les yeux de Jor-El et provoquer en lui un sentiment de bien-être enivrant. Il était sincère, plus que jamais, et lui aussi ressentait une peur grandissante, vis-à-vis de la décision de Jonathan. C’était de cette décision que découlerait l’avenir de Clark et Kal-El. Il avait trop peur de le perdre, comme il avait perdu Lara dans l’explosion de sa planète. Jonathan était l’un de ses derniers espoirs réels de protéger son seul fils.
Aussi, Jonathan esquissa un sourire.


Jonathan : « l’homme peut devenir bon », c’est bien ce que vous avez dit à Yen-Al ?

Jor-El acquiesça d’un signe de tête, préservant cette attitude sérieuse.

Jonathan : … en apprenant de ses erreurs. Je suis prêt à commencer dès maintenant …

Jonathan tendit sa main droite vers Jor-El, l’invitant à la serrer. Jor-El baissa un court instant les yeux vers cette main ferme, sans un sourire. Puis, il les releva vers le regard enjoué de son allié et esquissa un très large sourire. Il amena alors sa main, serrant l’aura de lumière blanche vers la main droite de Jonathan et l’étreignit avec force et ferveur. L’aura de lumière explosa en une vague de lumière d’une rare intensité …
*******
Grottes Kawache -- Smallville --- Une semaine après le départ de Jonathan --- 17h49

[La caméra filmait, à quelques mètres de distance, la paroi rocheuse d’une des Grottes Kawache. Creusée en son centre d’une fente octogonale, elle comportait divers symboles d’origine Kryptonienne inscrits, d’une peinture bleue, en spirales autour de la serrure. D’un travelling lent vers l’arrière, la caméra filma la paroi, assombri, dans sa totalité]
Une violente lumière blanche inonda la gravure octogonale et fit jaillir certaines de ses nuances sur la paroi rugueuse. Les spirales de symboles, tout autour, s’animèrent en se traçant de cette même lumière pure et se mirent à tourner sur elles-même, lentement. Une faible brise de vent s’éleva de nulle part, comme sortant de la paroi rocheuse, et s’insuffla dans les moindres recoins de la salle silencieuse. Soufflant très doucement, le vent commença à balayer la poussière, reposant sur le sol dur, au pied de la paroi. D’un phénomène très étrange, le vent fit remonter en spirales la poussière et traça rapidement, ce qui ressemblait à de pilonnes, très peu larges, collé l’un à l’autre. La poussière continua de tracer les contours de cette forme qui se révéla bien vite n’être que la simple carrure d’un homme musclé. Ses épaules apparurent, tracées par la poussière ainsi que sa tête, couverte de cheveux épais. Une couche de lumière transparente se déversa du haut de son crâne et dégoulina, tel une chute d’eau, sur la totalité de son corps. Quelques secondes plus tard, Jonathan Kent était réapparu devant la paroi rocheuse.
Jonathan tenait dans sa main droite la clé ovale, que Jor-El lui avait remit avant de quitter le dôme et dans sa main gauche un autre projet, à l’aspect étrange. La lumière, dans la roche, s’atténua rapidement jusqu’à disparaître complètement en tout juste quelques secondes. Jonathan la regarda s’amenuiser, tout en plongeant la clé ovale dans une des poches avant de son jean. Lorsqu’elle fut complètement disparue, Jonathan baissa les yeux vers sa main gauche et amena l’étrange objet à sa vue, aplanissant sa paume. Il en observa chaque détail : l’objet ressemblait à un gros galet, comme la clé ovale. Son alliage à l’aspect diaphane ne permettait pourtant pas de voir au travers. En son centre, une encoche circulaire était encrée dans l’alliage et comportait en son centre, le symbole Kryptonien de « Clé », de couleur bleu dur. Et, tout autour, des lignes de caractères Kryptoniens, plus petits, étaient peints, légèrement courbé vers le haut ou le bas, suivant leur place sur l’objet. Selon Jor-El, ce qu’il renfermait pourrait permettre à Jonathan d’accomplir sa « tâche », le moment venu. Jonathan esquissa un sourire et releva une ultime fois les yeux vers la paroi ; les symboles semblaient avoir changés, dans les spirales.
Frustré de ne pas pouvoir lire les symboles, Jonathan pensa qu’il était temps de revenir parmi les siens, Martha devait se faire un sang d’encre. Après tout, il ne savait pas combien de temps il avait réellement été parti ; lui pensait à quelques heures, tout au plus, mais qui pouvait bien savoir ….
Il tourna les talons et commença à marcher, faisant résonner le bruit de ses pas dans la grotte. Il releva les yeux …Il se figea sur place, le cœur battant, les yeux braqués droit devant lui, écarquillés de surprise. A cinq mètres de lui se trouvait Lex Luthor, habillé d’un long manteau noir en cashmere. Les mains dans les poches, il regardait Jonathan droit dans les yeux d’une noirceur inaltérable. Un froid implacable envahissait ses rétines, provoquant des frissons en Jonathan. Il pensa à plusieurs choses : est-ce que Lex l’avait vu apparaître dans la grotte et avait-il vu l’artefact, dans sa main gauche ?
Lex, continuant de fixer le père de Clark du regard, lui adressa ces mots, dits sur un ton ouvertement cassant et moqueur :


Lex : Jonathan Kent …

Jonathan se força à sourire, en réponse à Lex et se mit à penser très intensément à l’artefact dans sa main gauche. Sous son effet, sa paroi déjà translucide devint quasiment invisibles ; seuls ses contours restaient difficilement visibles, assez flous. La main de Jonathan se refermait presque dessus.
Lex laissa un rire jaillir de sa gorge, dénué de joie. Il baissa les yeux et avança vers Jonathan sans lui adresser un regard. Il rasa son flanc gauche, en passant à côté de lui et s’éloigna vers la paroi, creusée de la serrure octogonale. Lex s’arrêta devant, en en observant chaque détails, visiblement captivé par les symboles.


Lex : j’ai plus l’habitude de voir un autre Kent, dans ces grottes !

Malgré le sens agréable des mots de Lex, le ton froid qui les accompagnait faisait toujours froid dans le dos. De plus, Jonathan était certain que Lex avait vu quelque chose, à son arrivée. Mais quoi ? Impossible de savoir avec un Luthor. Jonathan se retourna donc et vit Lex, de dos, en train d’observer la paroi rocheuse. Kent fut surprise de voir la tête de Lex bougeait légèrement, en cercle et ses lèvres remuer très légèrement, comme s’il lisait les symboles. Jonathan préféra changer de sujet, sur un ton amical et amena le sujet vers Clark :

Jonathan : justement, je le cherche ! Vous ne l’avez pas vu ?

Lex continua sa traduction mais s’affaira à répondre à Jonathan sur un ton assez sourd, signe de son occupation d’esprit :

Lex : à vrai dire, Clark et moi sommes en … conflit …

Jonathan était au courant de cet état de fait mais il avait espéré un élément de réponse de la part de Lex. Les Luthor savaient toujours tout et précisément quand cela concernait Clark Kent. Il était certain que Lex saurait où le trouver, mais il ne semblait pas d’accord pour divulguer l’information.
Lex termina sa traduction en observant les symboles les plus espacés de la serrure. Il esquissa un très large sourire.


Lex : mais nous nous retrouverons bientôt … (plus bas) oui, très bientôt …

Jonathan sentit le rythme de son cœur s’emballer, il tourna les yeux vers les spirales de symboles, devant Lex : et si cette rencontre était transcrite dans ces symboles ? Si tel était le cas, il paraissait évident que cette future rencontre aurait une finalité qui plaisait grandement à Lex, ce qui provoquait cette peur en Jonathan. Mais, par peur de voir ses secrets dévoilés, Jonathan ne releva pas.

Jonathan : si vous le voyez, dites-lui d’appeler à la maison …

Mais Lex ne fit pas un geste, ne dit pas un mot. Les paroles de Jonathan, dite sans grande conviction, se perdirent dans un écho interminable qui alla se noyer dans la roche voûtée du plafond. Jonathan regarda un long instant Lex, de dos, avant de se décider à partir. Prenant bien la précaution de cacher sa main gauche, serrant l’objet invisible, aux yeux de Lex, Jonathan s’éloigna vers l’entrée, sur sa droite. Lex se retourna enfin et observa Jonathan partir, et disparaître derrière le pan de mur. Armé d’un souvenir dévastateur, Lex se répliqua à lui même :

Lex : il va me falloir découvrir ce que vous cachez, vous aussi, Jonathan Kent …

 

Ferme des KENT –Smallville --- 18h02

Martha, habillé d’un jean saillant légèrement délavé et d’une veste en daim beige cintrée, ouvrit le petit portillon blanc ouvrant l’accès à la pelouse, devant la maison, propriété de son mari et d’elle même. Même le grincement aigu du portillon ne suffit à faire émerger Martha de ses sombres pensées. Regardé braqué sur l’allée dallée menant au perron, sur la droite, main serrée sur le trousseau de clés, elle ne pouvait se détacher de cette sombre soirée où Kal-El avait pris le contrôle de son fils et l’avait poussé à quitter la maison. Jonathan, pour essayer de le ramener, était parti aux grottes Kawache dans l’espoir insensé de convaincre Jor-El de lui rendre son fils. Malgré les mises en gardes de sa femme, qui était certaine qu’il n’en reviendrait pas, Jonathan était parti. Martha s’était alors trouvé seule, horriblement seule. Cela faisait une semaine entière que cela durait. Au bout de trois jours, elle avait pris une décision : Jor-El lui enlèverait peut être son mari, mais jamais elle ne lui prendrait son fils. Elle avait donc fait appel à Matt Murdock, l’ami aveugle de Clark dans l’espoir qu’une fois de plus, il parvienne à le ramener. Matt devait arriver le lendemain.
Martha tourna sur sa droite, vers les marches, en relevant la tête. Elle braqua la portée de ses yeux azurs sur la porte d’entrée, au fond du perron et gravit une à une chacune des cinq marches, devant elle. La mine macabre, elle parvint de ce pas lourd jusqu’au devant de la porte et s’arrêta à cet endroit. Les alentours étaient calmes, trop calmes. Seul le beuglement régulier d’une vache brisait l’intense silence. Martha baissa les yeux vers le trousseau de clés, dans ses mains et les fit bouger à la recherche de la bonne clé. Enfin, elle la trouva et s’apprêta à l’amener vers la serrure …


???: Martha Kent ?!

Martha se figea sur place, surprise par le timbre de la voix. Il s’agissait de la voix d’une jeune femme, une voix qu’elle ne connaissait pas, elle en était certaine. Aussi, la mine surprise, elle se retourna et regarda une silhouette approcher, alors que le portillon grinçait de nouveau, derrière son passage. Martha balaya la silhouette du regard, de haut en bas. Mince, assez grande, elle était vêtu de manière urbaine –jean taille basse légèrement délavé et débardeur noir aux fines bretelles- et ses longs cheveux bruns étaient relevés en un chignon lache, laissant tomber en travers de son visage deux fines mêches de cheveux mettant en valeur ses yeux bruns aux éclats envoutants. Souriant, Loïs s’avançait vers Martha d’un pas décidé, visiblement amusé. Elle longea l’allée dallée comme l’avait fait Martha et s’arrêta au pied des marches, sous le regard de Martha. Celle-ci avança à son tour, déportant son regard sur la gauche, vers l’allée menant à la ferme. A côté du pick-up rouge de Martha était garée une citadine bleue, personne d’autre n’était présent.
En s’approchant, Loïs s’adressa à Martha sur ce ton enjoué et amusé :


Loïs : vous ne pouvez pas savoir le mal que j’ai eu à vous retrouver ! Avec tous ces plants de maïs !!

Loïs arrêta sa phrase au moment même où elle se figeait devant Martha, au pied des marches. Elle regarda un court instant la mère de Clark, observer l’allée sur sa propre gauche. Elle ne put s’empêcher de remarquer que le visage de Martha exprimait une peur intense, encombré d’une certaine paranoïa. Puis, lorsque Martha porta enfin son regard sur elle, Loïs laissa un sourire traverser son magnifique visage bronzé. Martha n’esquissa même pas un sourire, elle se contenta de regarder Loïs droit dans les yeux. Alors, sans préambule et sur un ton assez confus, elle lui demanda, le visage crispé :

Martha : excusez-moi mais … qui êtes-vous ?

Loïs s’empressa d’adresser un sourire ravi à Martha et de lui tendre sa main droite, en répondant :

Loïs : Loïs … Loïs Lane !

Martha baissa les yeux vers la main tendue de Loïs. Elle la regarda un très long instant, sans faire le moindre geste. Enfin, sans un mouvement du visage, elle finit par étreindre cette main doucement, délicatement, avant de retirer sa main. Martha dévia légèrement son regard sur la droite, à côté de Loïs et regarda quelque chose dans son dos, qui sembla attirer toute son attention. Elle semblait à nouveau avoir perdu contact avec la réalité.
Enfin, après de longues secondes de concentration, Loïs se décida à se retourner mais ne vit rien d’autre que la pelouse, à perte de vue. Elle revint donc vers Martha et la regarda à nouveau droit dans les yeux :


Loïs : Martha … vous êtes sûre que ça va ?

Martha dévia lentement son regard de la pelouse et revint Loïs, la regardant à son tour au plus profond de ses rétines. Elle sembla se réveiller, en clignant deux fois de suite des yeux.

Martha : écoutez Clarisse …
Loïs : (grimaçant) Loïs … je m’appelle Loïs …
Martha : (souriant sur le premier mot) Loïs … je n’ai vraiment pas le temps là !

Martha n’attendit même pas la réponse de Loïs et se retourna en un geste vif.
Loïs ne revenait pas de cette attitude. En tout juste quelques secondes, la mère de Clark était passé de la femme absorbée par un élément imaginaire à la femme sûre d’elle et très occupée, que beaucoup associaient au nom « Mme Kent ». « Ces changements étaient peut être génétiques » pensa Loïs, qui ne savait pas que Clark avait été adopté.
Elle regarda Martha s’approcher de la porte et s’arrêter devant. Elle fit silence et l’écouta introduire la clé dans la serrure et la tourner à l’intérieur. Elle attendit, immobile, que Martha ouvre la porte pour lui lancer cette phrase, sérieuse :


Loïs : c’est au sujet de Clark …

La réaction de Martha fut en tous points semblable à celle qu’avait espérée Loïs. Le regard braqué devant elle, sur le sol de la cuisine un peu plus loin, Martha venait de s’immobiliser, le cœur battant à tout rompre. Ses bras le long du corps, elle entendait le nom de Clark résonner en écho dans sa tête. Après quelques secondes pendant lesquels Martha essaya de reprendre contact avec la réalité, cette dernière finit par répliquer à Loïs en relevant la tête :

Martha : qui ?

Fixant la nuque de Martha des yeux, Loïs répondit instantanément, avec un sourire :

Loïs : Clark Kent … votre fils

Martha, malgré cette affirmation et le rythme de son cœur qui accélérait encore, resta dos tourné à Loïs. Elle avait vraiment à croire à tel événement : une inconnue avait rencontré son fils, elle ne savait où et cette jeune femme avait fait des recherches pour retrouver sa mère. C’est pourquoi elle resta si longtemps silencieuse, ne croyant pas à son bonheur.
Loïs interprêta ce silence comme une contradiction.


Loïs : (grimaçant) c’est bien votre fils ?

Martha comprit que Loïs devait avoir un gros doute, soudainement et se décida à lui répondre, sur un ton pourtant toujours absorbé par l’étonnement :

Martha : oui, Clark est mon fils …

Elle se retourna et braqua sur Loïs un regard profond, intense devenu beaucoup plus présent qu’auparavant. Martha semblait être redevenue la mère paisible et gentille que tout le monde connaissait ici, à Smallville.

Martha : où l’avez-vous rencontré ?

Loïs, ravi d’avoir retenue l’attention de Martha, esquissa un sourire et gravit les cinq marches du perron pour revenir faire face à Martha. Impatiente, la mère de Clark la regarda faire et attendit sa réponse :

Loïs : (calmement, souriante) à Metropolis. Il m’a évité un séjour à l’hôpital …

Martha laissa un rire nerveux jaillir de sa gorge. Enfin, Loïs pouvait contempler ce sourire maternel qui allait temps à Martha, celui qui était réservé à la seule personne au monde qui y avait droit : son fils, Clark Kent. Aucun doute possible, toutes deux parlaient du même Clark Kent. Et selon les dires de Loïs, il se trouvait à Metropolis et, contrairement à ce qu’avaient pensé Jonathan et elle même, Kal-El ne le forçait pas à agir en tyran. Au contraire, Clark débutait dans la tâche impressionnante de héros qui lui incombait. Ce sourire ne disparut que de longues secondes plus tard du visage de Martha.

Martha : il est encore à Metropolis ?

Cette fois, Martha fut déçue par la réaction de Loïs. Une grimace étira les jeunes traits de son visage angélique et elle répondit, sur un ton gêné :

Loïs : A vrai dire, j’espérais que vous me le diriez !
Martha : (Baissant les yeux) Clark a quitté la maison il y a une semaine (relevant les yeux et baissant le ton) depuis, je n’ai plus eu de nouvelles …

Loïs fut très touchée par les paroles de Martha. Le ton de sa deuxième partie de phrase ainsi que son regard bleu profond, suffisaient amplement à faire passer la détresse intense qui habitait son cœur. Une détresse qui ne cessait de s’accentuer, de minutes en minutes, à mesure que Clark restait loin d’elle. Il représentait une drogue dont Martha ne pouvait plus se passer, il faisait partie à part entière d’elle et, sans lui, elle se sentait vidée d’une part vitale, un organe sans lequel la vie n’était pas envisageable.
Loïs répondit, d’une voix troublée, dont le ton venait de baisser :


Loïs : Je suis désolée, il ne m’avait rien dit …

Loïs laissa de longues secondes passer en silence. Elle baissa à son tour les yeux, vers le sol du perron. Elle se rappelait le récit que lui avait fait Clark, à son appartement, en lui relatant sa vie passée. Il avait dû subir tant d’obstacles. Sa mère semblait l’avoir aidé et le désarroi qu’elle ressentait était normal, Loïs le comprenait parfaitement. Cependant, ce qu’elle ne comprenait pas c’était pourquoi Clark avait fui à Metropolis sans prévenir sa mère, leur lien semblait si fort. Quelque chose ne collait pas, Martha ne lui avait certainement pas tout dit.
Cette dernière, tourna les talons et entra dans la cuisine, d’un pas lent et lourd. Loïs releva les yeux et la vit s’approcher, à l’intérieur de la cuisine d’un muret, sur la gauche. Martha y posa ses clés et resta un instant, devant. Loïs en profita pour entrer, sans refermer la porte et vint se placer sur la gauche de Martha, la regardant intensément.


Loïs : (voix douce) Martha, je comprends le mal que vous ressentez mais … Clark a besoin d’aide, il va très mal …

Loïs marqua un nouveau silence, regardant Martha, avant de reprendre, sur un ton plus enjoué, montrant qu'elle voulait donner du baume au coeur de Martha.

Loïs: et Jonathan n'est pas là ?

Loïs comprit bien vite qu'elle avait commis une de ces grosses erreurs qu'elle avait pour habitude de commettre, sans le vouloir. Le visage de Martha se fendit en une expression douloureuse.

Martha: (baissant la tête) Jonathan est mort ...

Martha dévia son regard sur sa gauche et regarda une nouvelle fois Loïs droit dans les yeux. Rien qu’en observant les rétines brunes de la jeune Lane, il paraissait clair que Loïs elle aussi avait connu pas mal d’épreuves et voulait aider Clark au mieux, mais Martha avait peur de ce que Kal-El pourrait faire à Loïs.
Loïs poursuivit sur un ton plus dur, dont le timbre avait augmenté :


Loïs : je sais ce que ça fait de perdre quelqu’un, j’ai perdu ma mère quand j’étais petite … Mais vous, à la différence de moi, vous pouvez encore sauver votre fils !

Martha était touché, une fois de plus, au plus profond de son cœur, comme elle l’avait rarement été dans sa vie. Loïs, par son vécu, parvenait à trouver les mots justes et à les faire comprendre au mieux. Mais cette fois, la situation la dépassait de loin, même si elle n’en savait encore rien. Aussi, Martha se décida à devenir plus cassante et agressive que jamais, plus qu’elle ne l’avait jamais été.

Martha : Ce n’est plus mon fils, plus maintenant …

Martha se tourna sur sa droite, avant même d’avoir fini cette phrase. Il voulait cacher cette vague de larmes, aux nuances brûlantes qui commençait à se déverser par dessus ses yeux. Elle n’osait croire qu’elle avait réussi à dire ces mots : Clark, malgré tout ce qu’il pourrait faire, resterait à jamais son fils. Elle l’aimerait dans le pire comme dans le meilleur. Essayant de ne pas reniffler, pour se dissimuler aux yeux de Loïs, dans son dos, Martha se dirigea vers le corridor, droit devant elle. Une fois à l’intérieur, elle se tourna vers le mur de gauche et commença à enlever sa veste en daim :

Loïs : (se retournant complètement vers elle) Vous savez Martha, vous me décevez …

Ecoutant au mieux les paroles de Loïs, Martha continua pourtant d’amener sa veste vers le porte-manteau, accroché au mur, en hauteur :

Loïs : tous ceux à qui j’ai parlé de vous, en ville, m’ont affirmé que la famille Kent était la plus aimée, la plus serviable et surtout, la plus soudée de la région. J’en déduis donc que vous me cachez quelque chose. Quelque chose que je découvrirai par moi même, s’il le faut …

Gardant les mains posées sur le manteau, sur le pommeau du porte-manteau, Martha tourna lentement la tête sur la gauche et porta son regard sur le corps de Loïs. Toutes deux se regardèrent droit dans les yeux, Martha déçue par la réaction de Loïs et Loïs plus déterminée que jamais.

Loïs : même sans votre aide, je le retrouverai !
Martha : (voix brisée) vous ne devriez pas …

Loïs resta encore un très long instant les yeux braqués sur Martha, n’osant croire à cette réaction de la part d’une mère aimante. Elle avait l’impression de s’être trompée de Martha Kent, jamais celle dont on lui avait parlé n’aurait abandonné son fils.
Loïs constata une nouvelle fois que le regard de Martha semblait évasif, vide et se déportait sur la droite de Loïs. Elle semblait observer autre chose, dans le dos Loïs et cette contemplation provoquait en elle un sentiment des plus intenses.
Furieuse, Loïs ferma les yeux et se retourna …


Loïs : je tiens toujours mes promesses …

Toujours les yeux fermés, Loïs avança sur plusieurs pas, en direction de la porte d’entrée restée ouverte. Et soudain, elle heurta de plein fouet une forme puissante, prenant la place de l’embrasure de la porte. Loïs comprit, avant même de rouvrir les yeux, que c’était cette forme qu’avait observé intensément Martha.
Surprise, Loïs recula de deux, regardant cet homme de haut en bas. Exprimant sa colère, elle lui répliqua :


Loïs : (voix agressive) allez-y, faites comme chez vous …

 

Ferme des KENT -- Smallville --- 18h09

Loïs releva lentement les yeux vers le haut, caressant de son regard brun la silhouette massive de cet homme à la carrure imposante et à un âge avoisinant les cinquante ans. Elle parvint enfin jusqu’au visage carré de cet homme, aux traits creusés par l’âge et à ce regard d’un bleu aussi clairvoyant que celui de Clark Kent. Ses cheveux, quelques peu épais, étaient légèrement teint d’une teinture blonde et coiffés vers l’arrière. Un large sourire paternel étirait ses fines lèvres, accentuant un peu plus l’harmonie qui semblait l’habiter. Son poing droit, massif, était serré sur quelque chose qui restait impossible à identifier. Une ligne invisible aurait pu relier le regard de Martha à celui de cet homme. Il ne se préoccupait pas une once de Loïs, pourtant juste devant lui mais ne parvenait pas à détacher son regard azur de Martha, de l’autre côté de la pièce.
Elle même restait absorbée par cette contemplation, ses yeux légèrement écarquillés. « Je rêve éveillée » se dit-elle, après quelques secondes. Même ses espoirs les plus fous n’auraient pas pu lui permettre d’espérer une telle joie. Et pourtant, c’était vraiment le cas : derrière Loïs, immobile et souriant, se trouvait belle et bien l’homme de sa vie ; Jonathan Kent.
Ce dernier, le cœur battant à tout rompre, ne s’occupa pas une seconde de la réplique, si cassante soit elle, de Loïs et élargit son sourire en voyant, dans le corridor, Martha laisser une larme se déverser de son œil droit et commencer à rouler le long de sa joue, laissant une traînée d’humidité sur sa peau. Sous le regard surpris et décontenancé de Loïs, il passa sur sa gauche et s’approcha, d’un pas lent, le regard absorbé par Martha, vers la femme de sa vie. Armé de ce même sourire, il s’approcha d’elle sans la quitter des yeux tandis que Loïs se retournait pour regarder ce qu’il allait faire. Ainsi, elle put le voir s’arrêter face à une Martha dont le visage ruisselait de deux larmes lentes et dont les yeux brillaient intensément. Et pourtant, malgré le fait que cela paraissait impossible, la mère de Clark ne renifflait et ses lèvres et tremblaient pas. Seules les larmes roulant de chaque côté de son visage manifestait son sentiment intense d’incompréhension. Jonathan accentua son sourire et, ne quittant toujours pas le regard de sa femme de ses propres yeux, amena sa main gauche vers son visage et la posa délicatement sur sa joue, l’étreignant avec douceur. Mais même avec ce geste, Martha ne fit pas un mouvement du visage, pas un mouvement corporel. Elle semblait figée par la présence de Jonathan devant ses yeux, comme si elle avait peur de le voir disparaître en fumée, d’un instant à l’autre.
D’une voix assez veloutée, d’une douceur incomparable, Jonathan approcha un peu plus son visage de celui de Martha et lui glissa ces mots magnifiquement touchants :


Jonathan : tu n’as plus à t’inquiéter … je suis là …

Le timbre la voix, si envoutante aux yeux de Martha de Jonathan, suffit à briser cette barrière mentale qu’elle s’était construite au moment où la silhouette de son mari était apparue, derrière Loïs. Dès cet instant, elle avait préféré se construire un masque de fermeté qui la protégerait de toute désillusion. Mais, la voix de son mari apparaissait comme la clé de ce masque de fer.
Le visage de Martha se tordit en une expression attendrissante : les larmes redoublèrent et se mirent à couler en abondance le long de ses joues, de ses yeux jusqu’aux coins de ses lèvres, qui se mirent à trembler. Elle fondit en une vague de pleurs incontrôlable, pourtant silencieuse. Au moment où Jonathan accentuait son sourire, Martha, malgré ses pleurs, ne put s’empêcher de sourire à son tour, faisant luire un peu plus intensément ses rétines bleutées. Jonathan approcha alors doucement son visage de celui de sa femme et déposa très délicatement ses lèvres sur celles de Martha, lui donnant un baiser des plus doux. Il écarta ensuite ses lèvres de celles de Martha et la vit rouvrir les yeux, très lentement. Ils se regardèrent un court instant droit dans les yeux, comme si ce simple échange suffisait à recréer ce lien qui les unissait à jamais. Martha se jeta alors dans les bras de Jonathan et entoura les siens autour de son cou. Elle prit alors pleinement possession des lèvres de son mari, sous les yeux ébahis de Loïs. Cette dernière, s’eclama d’une voix basse, abasourdie :


Loïs : (pour elle même) ah bah ça … !

Les baisers se suivirent pendant de longues secondes, d’une manière de plus en passionnées. Loïs avait rarement assisté à tel échange buccal, surtout entre deux personnes qui avaient dépassé depuis un certain temps la période de l’adolescence et des hormones en ébullition. Mais ce qui surprenait le plus Loïs, et de loin, était la présence de Jonathan ici même. « Jonathan est mort », tels étaient les mots qu’avait utilisés Martha quand Loïs lui avait demandé où était Jonathan. Et étant donné la froideur du ton qu’elle avait emprunté, il paraissait évident qu’elle ne mentait.
Loïs finit pas détourner les yeux du couple et de porter son regard sur le sol, sur sa droite. Et, d’une voix forte et gênée, elle leur demanda, sans hésitation :


Loïs : euh …excusez-moi !

Souriant radieusement, Jonathan s’écarta un tantinet du visage de Martha, gardant son visage à tout juste quelques centimètres du sien. La regardant toujours droit dans les yeux, il comprit combien Loïs devait être mal à l’aise. Aussi, malgré ses pulsions qui lui ordonnaient le contraire, Jonathan décida de reporter à plus tard son retard en affection. Il donna un dernier baiser à Martha et essuya de sa main, contre son visage, les larmes de sa femme, en la regardant toujours droit dans les yeux. La mère de Clark, radieuse comme jamais, prit la main de Jonathan posée sur son visage et l’étreignit avec amour. Jonathan se retourna et vint se placer sur la droite de Martha, regardant Loïs, un peu plus loin. La jeune Lane risqua un rapide coup d’œil vers le couple :

Loïs : ça y est ? Vous avez fini !?
Martha : (riant) oui !

Loïs se retourna alors complètement vers Jonathan et Martha et leur adressa le regard le plus gentillet qui soit, ravie pour eux. Mais le ton qu’elle emprunta montra bien qu’ elle espérait des réponses.

Loïs : j’aurais une question : votre mari, il était pas …mort ?

Martha, le visage toujours un peu humide et les yeux brillant, de bonheur cette fois, tourna la tête sur sa droite et échangea avec son mari un échange de regard éloquent ; tous deux se souriaient intensément.

Martha : (regardant Jonathan) je le croyais aussi …

L’échange de regards dura un court instant, avant que le sourire de Martha n’atteigne son paroxysme. A cet instant, Martha ne put résister plus longtemps : elle amena sa main gauche, la libre, vers le visage de Jonathan et la posa dessus en se rapprochant de nouveau de son mari. Et, rapidement, elle prit à nouveau possession des lèvres de Jonathan. Voyant cela, Loïs déporta à nouveau son regard du couple vers la gauche, cette fois, contemplant le muret qui n’avait rien de bien radieux.

Loïs : raaahh !!

Entendant la plainte de Loïs, Martha écarta ses lèvres de celles de Jonathan, esquissant un nouveau sourire, tout aussi radieux que le précédent. Elle donna une caresse à Jonathan, sur sa joue parsemé de poils naissants de sa barbe et reprit sa place, en baissant la tête. D’une voix gênée, elle répliqua :

Martha : (tête baissée) désolée …

Loïs comprit qu’elle pouvait enfin espérer les regarder tous les deux sans qu’un baiser langoureux ne vienne interrompre leur conversation, comme l’auraient fait de vulgaire adolescents enivrés par une première passion. Mais, par précaution, elle préféra faire le plus rapidement possible :

Loïs : je comprends parfaitement le fait que vous ayez besoin d’être seuls ; c’est pourquoi, je ferais court … Jonathan savez-vous où se trouve Clark ?

Jonathan perdit instantanément son sourire. Depuis l’instant où il était entré dans cette cuisine il n’avait pas réfléchi à la raison qui avait amenée cette jeune femme, inconnue à ses yeux. Clark semblait en être l’origine, une raison qui ne présageait rien de bon à ses yeux.
Il tourna rapidement la tête vers sa femme et lui adressa ses mots inquiets :


Jonathan : Clark ? Qu’est ce qu’elle lui veut ?

Martha retrouva son sérieux, comprenant l’incompréhension que devait ressentir son mari en cet instant. Loïs le mettait sur le fait accompli et elle savait, qu’à sa propre place, elle aurait détesté rester sans explication :

Martha : Clark a sauvé Loïs d’un mauvais pas, à Metropolis. Elle voudrai l’aider à son tour mais n’arrive pas à le retrouver … (baissant le ton) je pense qu’elle s’est attachée à ton fils …

Suite aux paroles de Martha, Loïs étira les traits de son visage en une expression d’intense mécontentement, en baissant les yeux. Lorsqu’elle les releva vers le couple, elle s’empressa de nier en bloc les derniers mots prononcés par la mère de Clark :

Loïs : je ne me suis pas attachée à lui ! Je veux juste l’aider … (baissant le ton) c’est tout …

Regardant Loïs droit dans les yeux, Martha laissa un petit rire sortir de sa bouche. Cette attitude lui rappelait celle d’un certain jeune homme, répondant au doux nom de Clark Kent. Pas moins de trois ans plus tôt, il réagissait de la même manière quand on voulait lui faire admettre qu’il adulait une ravissante eurasienne du nom de Lana Lang.
La réaction de Loïs, suite à ce rire, ne se fit pas attendre :


Loïs : (ahurie) quoi ? Vous ne me croyez pas ?!
Martha : oh si, bien sûr que je vous crois !!

En voyant le sourire de Martha, encré dans son visage bienveillant, Loïs comprit sans peine que Martha ne l’avait cru. Et puis finalement, Loïs se força à penser qu’elle s’en fichait. Mais était-ce réellement le cas ? Clark avait-il réellement besoin d’aide ? Il semblait vraiment capable de s’occuper de lui même. Loïs s’inventait-elle des excuses pour se retrouver de nouveau avec lui ? Ces moments, trop rares, passés auprès de lui, lui manquaient tant … NON !! C’était pour l’aider lui et non assouvir un désir quelconque !!
Enfin, très gênée par la situation, Loïs répliqua d’une voix forte et soutenant sans mal le regard de Jonathan, qu’elle regardait désormais d’une noirceur apparente.


Loïs : bon alors ! Vous savez où il est oui ou non ?

Jonathan, le visage horriblement sérieux, réfléchissait à, si oui ou non , il devait répondre à Loïs. Après tout, il ne connaissait rien de cette Loïs à part le fait que Clark l’avait sauvée. Après tout, Lex aurait pu manipuler Clark pour l’amener à la rencontrer et qu’elle puisse enquêter sur lui. Après ce que Jor-El lui avait appris sur le compte de Lex, Jonathan hésitait. Aussi, d’une voix grave et posée, il se contenta d’affirmer :

Jonathan : il est toujours à Metropolis …

Martha tourna d’un geste vif la tête vers Jonathan, très surprise par sa réponse. Comment pouvait-il savoir où il se trouvait alors qu’il s’était rendu aux Grottes Kawache ? Jor-El l’aurait-il finalement aidé ?
Malgré la prestance du regard de Martha sur son visage, Jonathan continua d’observer Loïs, devant lui. Comme il aurait dû s’en douter, la jeune Lane s’empressa de demander :


Loïs : et vous avez sûrement une adresse ?

Jonathan la regarda droit dans les yeux, dans ces rétines brunes aux reflets intenses. Il espérait se plonger au plus profond de son esprit afin de savoir si il pouvait lui faire confiance. Mais à cet instant, quelque chose se mit à vibrer dans la main droite de Loïs, dont le poing était serré. Elle baissa donc les yeux et brisa ce lien, entre Jonathan et elle ; le père de Clark fut déçu de ne pas pouvoir user de ce pouvoir si bénéfique.
Loïs ouvrit sa main et révéla un téléphone portable : une led, sur le clapet fermé clignotait de couleur bleue. Un nom apparaissait sur le cadrant, juste en dessous. En lisant le nom « Chloé », Loïs fit une grimace et se renfrogna.


Loïs : (pour elle même) c’est pas vrai …. (relevant les yeux vers le couple Kent) j’en ai pour deux minutes !

N’attendant pas la réponse d’un des deux Kent, Loïs ouvrit le clapet et le porta à son oreille en tournant les talons. Laissant un « Oui Chloé » sortir de sa gorge sur un ton furieux, Loïs sortit de la cuisine en direction du perron. Sous le regard de Martha et Jonathan, elle passa par l’embrasure de la porte restée ouverte et s’arrêta sur le perron, de dos. Après s’être assurée que Loïs ne pourrait l’entendre, Martha se tourna vers son mari, le visage renfrogné et lui demanda :

Martha : comment tu le sais ?

Jonathan tourna lentement la tête vers Martha, détachant ses yeux de la silhouette de Loïs. Cette jeune femme, il n’aurait su dire pourquoi, mais évoquait quelque chose d’important, quelque chose qu’il ne fallait pas nier.

Jonathan : (regardant Martha) c’est Jor-El qui me l’as montré !
Martha : (surprise) comment ça, il te l’a « montré » ? Tu l’as vu ?
Jonathan : (absorbé par ses pensées) je t’expliquerais quand …

Mais Jonathan interrompit sa phrase en plein milieu. La dispute téléphonique de Loïs, sur le perron, avec sa cousine, avait attirée son attention. Mais quand il avait vu Loïs de profil, son regard s’était écarquillé en observant le poignet droit de Loïs, tenant le téléphone contre son oreille. Il avait aperçu ce tatouage bleuté, qu’avait inscrit Kal-El sur la peau de Loïs, lors de la « rupture » entre Clark et Loïs. Seulement, le tatouage semblait s’être agrandi : le losange s’était refermé et n’apparaissait plus qu’en sa seule moitié. Jonathan reconnut instantanément ce tatouage, comment ne pas le reconnaître ? Il comprenait alors l’importance de Loïs, auprès de Clark. Il savait qui elle était en réalité, qui elle deviendrait. Et cela changeait tout.

Martha : quand quoi ?

Jonathan émergea de son observation avec les mots puissants de sa femme. Il reporta son attention vers elle et luie expliqua rapidement la situation, sur un ton plus décidé, engagé :

Jonathan : quand Loïs sera partie ! Pour l’instant tu dois me faire confiance !
Martha : attends, tu ne comptes pas lui donner son adresse ! Il peut être dangereux !
Jonathan : je sais que ça peut paraitre fou, mais Loïs doit savoir !
Loïs : (hurlant) PARFAIT !!!!

Et elle referma violemment le clapet de son téléphone portable, avant de le ranger dans une des poches avant de son jean, en s’approchant des parents de Clark, devant lesquels elle s’arrêta. Elle regarda Martha détacher lentement son regard du visage de son mari. Loïs comprit tout de suite, par l’expression macabre de Martha, qu’ils venaient de parler de quelque chose de crucial. Mais elle n’avait pas le temps pour laisser un silence apaiser la situation.

Loïs : écoutez, vous règlerez vos histoires de famille plus tard ! J’ai besoin de son adresse alors, que vous me la donniez maintenant ou que je la découvres par moi même, ça m’est égal ! Seulement, sans votre aide, ce sera plus compliqué !

Un nouveau silence s’installa, après ces paroles porteuses d’espoirs de Loïs. Jonathan observa un long, très long instant, sa femme, sur sa gauche. Mais elle ne le regardait pas ; elle savait de quoi était capable Kal-El, il avait réussi à la manipuler. Et elle se refusait à mettre Loïs en danger. Mais Jonathan, lui, savait des choses qui annihilaient cette possibilité.
Aussi, il porta son regard vers Loïs et, fermant les yeux, lui lança :


Jonathan : « 8, Heir Street », c’est là qu’il habite !

Loïs ne répondit pas, gardant les mots en mémoire. Elle s’approcha du muret, sur sa gauche et amena un pot de crayons vers elle. Elle en prit un et inscrivit en grosses lettres rondes, bleues, l’adresse de Clark, avant de reposer le stylo sur le muret.

Loïs : je vous appelle dès que je l’ai retrouvé !

Et, sans attendre une réponse, elle tourna les talons et disparut sous les yeux apeurés de Martha et le regard anxieux de Jonathan, avant de disparaître sous le perron.

Martha : Jonathan, je ne te comprends pas !
Jonathan : je sais ! Mais j’ai promis que je t’expliquerai, et je vais le faire ! Je vais te montrer tout ce que Jor-El m’a montré …

Tenant toujours la main à sa femme, Jonathan vint se placer juste devant elle et lâcha enfin sa main.

Martha : (renfrognée) Jonathan … qu’est ce que tu fais ?
Jonathan : (se voulant rassurant) fais-moi confiance …

Jonathan renversa sa main droite et amena sa paume vers le plafond, ouvrant les doigts. Martha baissa alors les yeux vers cette main et remarqua avec effarement qu’une forme sphérique floue semblait se détacher, posée sur le creux de sa main à plat. Jonathan concentra toute l’énergie de son esprit sur la sphère ; aussitôt une lumière constituée de toutes les couleurs du faisceau lumineux la tintèrent sur toute sa surface et illuminèrent de leur aura éblouissante l’espace de la cuisine. Souriant, Jonathan amena ses mains, sous les yeux ébahis de Martha vers ses tempes. La sphère de lumières semblait comme accrochée à sa paume. Lentement, Jonathan amena ses deux mains contre les tempes de sa femme et appuya doucement. Entre chaque paume et tempe se dégagea cette lumière magnifique et força les mains de Jonathan à s’écarter légèrement : la lumière multicolore sembla créer un espace entre la main et la tempe. Martha ferma les yeux et esquissa un très large sourire, appréciant à sa juste valeur toute la puissance de ce que Jonathan lui confiait. Contrairement aux réticences particulières de Jor-El, il partageait son secret avec sa femme. En un flot continuel d’images entremêlées, Martha revoyait tout ce que Jonathan avait vécu, dans le dôme artificiel.
La lumière, au bout de quelques longues secondes, s’éclipsa et Jonathan put retirer ses mains. Seule la sphère invisible, aux contours flous, restait présente dans sa main. Jonathan ramena ses bras le long de son corps, observant Martha droit dans les yeux. Elle rouvrit des yeux écarquillés par l’effarement.
Il lui fallut quelques secondes d’observation braquée vers le vide pour faire le point sur le flot d’images très intense qui venait de sillonner son esprit. En moins de 10 secondes, il avait vécu ce que Jonathan avait subi en une semaine terrestre. Le choc était évident ! Et, enfin, elle releva des yeux toujours légèrement écarquillés vers Jonathan, le regardant droit dans les yeux avec une expression ahurie :


Martha : (abasourdie) en blanc, c’était …
Jonathan : (calme) Jor-El ? (souriant) oui ...
Martha: (ne comprenant pas) mais, il est ... mort ?

Jonathan cligna des yeux, comme il s’en était douté, malgré l’aide de ces nouveaux pouvoirs, expliquer à sa femme l’étrangeté de la situation serait assez complexe. Il releva des yeux bleus exprimant un sérieux accru vers elle et entreprit de commencer son explication :

Jonathan : oui, mais comme tu le sais, son esprit a survécu …
Martha : oui, dans les grottes ! Mais il paraissait si … réel !
Jonathan : (esquissant un rictus) mais c’était le cas !

Martha baissa les yeux, réalisant le miracle que cela représentait. Jor-El, dans ce dôme, apparaissait aussi vrai que Jonathan et elle même. Et, il était loin d’être le tyran qu’ils croyaient connaître. Elle releva les yeux, fronçant aisément les sourcils en signe de mécontentement :

Martha : et qu’est ce qu’il a fait de toi ?
Jonathan : je ne sais pas trop ! Quand je lui ai serré la main, de la lumière s’est dégagée et je me suis retrouvé devant la paroi des grottes avec (il amena sa main droite vers le haut, révélant la sphère translucide) ça !
Martha : qu’est ce que c’est ?
Jonathan : je ne sais pas trop ! Mais, c’est cela qui m’a changé et m’a apporté l’adresse de Clark …

Jonathan baissa à son tour les yeux vers la sphère floue, dans sa main. Sa femme et lui la regardèrent un très long instant, ne sachant pas trop quoi en penser. La seule dont ils pouvaient être certains était le fait qu’elle devait renfermé un pouvoir très puissant.

Jonathan : je pense que grâce à ça, je pourrais mieux protéger Clark
Martha : s’il n’est pas trop tard …

Jonathan releva des yeux exprimant l’ébahissement total vers sa femme, ne comprenant pas vraiment ses dernières paroles.

Jonathan : comment ça « s’il n’est pas trop tard » ?
Martha : Kal-El l’a poussé à partir à Metropolis, il a peut être déjà choisi sa voie !
Jonathan : non, il ne peut le faire que le jour de son avènement ! Tant que les trois pierres n’ont pas été réunies, il ne craint rien ! …Il faudrait trouver le moyen de reprendre celle de Lex

Martha fut très surprise par la décision de son mari. Peut être possédait-il certaines capacités, désormais, mais il était bien loin d’avoisiner la puissance de Clark. Une mission au sein même de l’antre de Lex semblait quelque peu suicidaire.

Martha : Lex ?
Jonathan : Un Luthor avec une telle pierre est un danger que Clark ne peut pas se permettre de courir !
Martha : justement, je ne te laisserai pas y aller ! Si Jor-El t’a mis en garde contre lui ce n’est sûrement pas pour rien ! Fais un peu confiance à ton fils, je suis sûr qu’il saura la reprendre sans courir de risques ! Lui est presque invulnérable, ce qui est loin d’être ton cas, oui très loin ! Tu es en sursis et tu ne dois pas profiter de cette chance pour jouer les héros … Nous en avons déjà un dans la famille …

Jonathan baissa les yeux vers la sphère translucide et l’observa en la caressant délicatement du regard. Il la vit alors prendre un aspect beaucoup moins transparent et s’aplanir rapidement jusqu’à reprendre son aspect de palet initial ; cet aspect qu’elle avait avant l’apparition de Lex dans les grottes. Il vit ensuite le symbole Kryptonien représentant « Clé » réapparaitre au centre et les lignes de caractères noircir sa surface pâle. Jonathan esquissa un sourire, comprenant que Martha avait raison : son fils ne tarderait pas à devenir un héros et lui, Jonathan Kent, son père, l’aiderait à devenir celui dont tout le monde parlerait des millénaires plus tard.

 

Appartement de Clark KENT – Metropolis --- 21h16

[La caméra se trouvait au fond d’un couloir, en plein centre et filmait, juste devant elle les deux portes en acier d’un ascenseur]
Soudain, un bip sonore assez aigu retentit et laissa présager l’ouverture des portes. Peu après, un coulissement sourd définit cette ouverture ; les portes coulissèrent chacune d’un côté, entrant dans leur paroi et libérant l’accès à une petite cage d’ascenseur en acier, baignée d’une intense lumière blanche qui jaillit sur le sol dur, à tendance bleue dur, du couloir. A l’intérieur, la silhouette exquise de Loïs Lane apparaissait, toujours habillée de ce jean taille basse et de ce débardeur noir, aux fines bretelles, révélant le bas de son bassin. Seul un élément vestimentaire avait été rajouté : un bracelet de tissu noir, semblable à ceux des tennisman, que la jeune Lane avait enfilé à son poignet gauche, couvrant son tatouage Kryptonien noir. Ce poignet tenait à nouveau son téléphone portable, posé contre son oreille. Voyant les portes s’ouvrir devant elle, Loïs sortit d’un pas pressé de l’ascenseur et s’engagea dans le couloir vaillamment éclairé.


Loïs : (furieuse) je ne veux pas le savoir !! Dites-lui que je veux parler … (haussant encore un peu plus le ton) et tout de suite !!!

Loïs était en train de parler à l’une de ces hôtesses mielleuses par lesquelles il fallait passer pour espérer un tant soit peu parler au richissime Lex Luthor, à qui elle devait parler de tout urgence, au sujet de sa cousine, Chloé Sullivan.
Dans le même temps, Loïs commença à avancer rapidement le long du couloir, les yeux portés sur sa droite. Sur la gauche se trouvait une longue baie vitrée remplaçant l’hypothétique mur. Grâce à elle, il était aisé de remarquer que ce couloir semblait situé en hauteur, peut être à une vingtaine de mètres du sol, étant donné que le centre-ville, au bas, apparaissait plus réduit, tout comme ses habitants, fourmillant aux pieds des nombreuses bâtisses. Mais en ce instant, seul le mur de droite intéressait Loïs. Constitué d’une paroi bleue légèrement luisante à la lumière pâle de la lune, il comportait une suite de porte noire, espacées chacune de deux mètres. Chaque porte comportait une poignée en fer argenté, à mi hauteur et un chiffre ronde, de couleur blanche. La première porte défila à côté de Loïs, comportant le chiffre « 1 », mais Loïs n’y prêta pas attention et continua de marcher vers la prochaine porte.
L’hôtesse, de sa voix horriblement aimable :


Hôtesse : je suis vraiment désolée mademoiselle, mais Monsieur Luthor a été forcé de se rendre à un meeting à Miami, il …

Loïs ne la laissa même pas terminer sa phrase, tant elle l’énervait déjà. Faisant la grimace, de fureur, Loïs lui répliqua d’une voix froide qui suffit à la faire taire :

Loïs : attendez, vous n’espérez quand même pas me faire avaler que Lex Luthor lui même a été « forcé » à se rendre quelque part ?

Loïs vit, sur sa droite, la porte portant le numéro « 2 » disparaître derrière elle tandis que la voix confuse de l’hôtesse essayait à grand peine, sur un ton hésitant d’articuler les mots « non mais … ». Néanmoins, la vivacité et la détermination de Loïs furent plus consistant :

Loïs : les gosses de riches sont pourtant connus pour « j’m’en foutiste hors norme ! Je veux lui parler !!

Loïs regarda une nouvelle porte sur sa droite : le numéro « 3 » y était inscrit. Ce n’était toujours pas la bonne. Aussi, Loïs continua de marcher vers le fond du couloir, voyant une nouvelle porte approcher.
L’hôtesse, comprenant son énorme erreur, essaya de se rattraper au mieux, bien que cela semblait bien compliqué :


L’hôtesse : Mademoiselle, Monsieur Luthor essaye au mieux de faire de la LuthorCorp la société la plus performante et …

Mais une fois de plus, Loïs l’interrompit sur ce ton froid et cassant, tandis que la porte comportant le numéro « 4 » disparaissait à son tour :

Loïs : faites-moi plaisir : garder votre baratins pour les pauvres naïf d’accord ?

Un calme impressionnant se fit entendre dans le combiné du téléphone : Loïs venait de moucher de façon étonnante l’hôtesse. Regardant la porte « 5 » disparaître et la suivante plus loin, Loïs poursuivit :

Loïs : je passerai dans deux jours voir votre patron et j’espère pour vous qu’il acceptera de me rencontrer, sinon vous risquez de ne pas trop apprécier les conséquences …

Loïs referma alors instantanément le clapet de son portable coupant la communication sans attendre la moindre réplique de son interlocuteur. Elle fourra son téléphone dans l’une des poches avant de son jean et s’affaira à observer un peu plus les portes, sur sa droite. Elle arriva à hauteur de celle portant le numéro « 6 ». Loïs accentua son allure et regarda droit devant elle. Le fond du couloir n’était plus loin, il ne restait que deux portes : la dernière serait celle de l’appartement de Clark.
Loïs avait suivi les instructions de Jonathan et s’était rendu au « 8 Heir Street » et avait observé les boîtes à lettre ; Clark habitait au numéro « 8 ». Elle avait ensuite pris l’ascenseur et suivait ce couloir, pour se rendre à cet appartement qui, selon toute vraisemblance, était celui de Clark.
Arrivé au fond du couloir, elle se tourna sur la droite et fit enfin face à la porte noire, frappé du numéro « 8 », en forme arrondie. Fixant le numéro des yeux, Loïs avança de deux pas vers elle, d’un pas délicat, venant lui faire face. Ainsi immobile, elle prit une grande inspiration et se dit, d’une voix basse, à elle même :


Loïs : allez Loïs, c’est le moment …

Elle souffla un grand coup, pour évacuer tout son stresse et faire face à l’inévitable. Et, après un long instant de silence, elle leva la main à mi-hauteur et frappa trois coups contre la porte, rompant le calme. L’oreille aux aguets, Loïs essaya de percevoir le moindre bruit, le moindre mouvement qui aurait pu venir de derrière cette porte. Après tout, cela faisait plus d’une semaine que Loïs l’avait repoussé et Clark n’avait donné aucune nouvelle. Peut être préférait-il rester loin d’elle ? L’éviter était peut être la solution adéquate ? Peut être, mais Loïs ne l’acceptait pas.
Rien. Loïs n’entendait pas le moindre bruit derrière la porte, comme s’il paraissait complètement vide. Un certain doute commençait à s’insinuer en elle : « Peut être n’était-il pas là », tout simplement pensa-t-elle, sombrement. Une déception qu’elle préférait ne pas accepter, pas tout de suite. Aussi, elle frappa trois nouveaux coups à la porte, brisant à nouveau le silence. Toujours rien. Loïs devait se rendre à l’évidence même : Clark n’était tout simplement pas présent dans cet appartement. Elle pivota vers sa droite, le visage crispé par la déception et releva les yeux vers le fond du couloir, vers lequel elle allait se rendre …
Quand soudain, une lumière bleu dur éclatante jaillit tout autour de la porte de l’appartement, par l’interstice. S’en suivit un hurlement déchirant, provenant de l’intérieur de l’appartement. Loïs se retourna, le cœur battant, vers la porte et la regarda comme s’il elle pouvait voir au travers. Cette fois, elle n’avait aucun doute, c’était bel et bien Clark qui hurlait à la mort. Ce cri faisait froid dans le dos, jamais la jeune Lane n’avait entendu telle plainte.
Elle porta sa main à la poignée ronde, en fer argenté, la tourna et ouvrit la porte qui, par chance, n’était pas fermée à clé. D’un geste brusque, Loïs envoya la porte claquer contre le mur de droite et entra dans l’appartement au pas de course. Elle longea un court corridor, baigné d’ombre qui la mena à un grand salon, au fond. Suivant une intuition étonnante, elle ne jeta même pas un oeil sur sa gauche, vers la porte ouverte mais continua le long du corridor. La lumière disparut en une fraction de seconde, comme si elle n’avait jamais été présente. Loïs s’arrêta en entrant dans le salon. Au fond se trouvait une suite de trois portes vitrées, donnant sur le centre-ville au bas. Sur la gauche, il y avait un canapé, contre le mur, devant lequel se trouvait une table de salon en verre. Et, devant Loïs, à mi-distance entre elle et la baie vitrée, Clark, tête levée vers le plafond. Il venait d’arrêter d’hurler. Loïs resta un court instant ébahi par son attitude. Torse nu, il était à genoux sur le sol et fixait le plafond des yeux. Et, soudain, il amorça une chute en avant vers le sol, le frappant violemment. Il s’endormit ainsi, face contre terre. Le cœur battant à tout rompre, Loïs s’approcha de lui au pas de course et s’agenouilla sur sa droite. Après maintes efforts, elle parvint à le relever et à l’amener contre lui. Le dos de Clark désormais plaqué contre son buste, Loïs s’empressa de lui prendre le pouls, au cou, paniquant presque. Elle souffla bruyamment en constatant qu’il était bien vivant.
Fermant les yeux, elle réalisa enfin combien elle tenait à lui, elle n’aurait supporté de le perdre. Mais comment cela était-il possible ? Elle ne le connaissait que depuis un peu plus d’une semaine et elle avait l’impression de tenir à lui comme si elle l’aimait depuis toujours. Jamais elle n’avait ressenti une émotion si forte à l’égard d’un homme. Et ce sentiment s’accompagnait de cette peur, face à l’inconnu. Bien qu’en cet instant, Loïs ne voulait faire qu’une chose : profiter du fait qu’il était vivant et au près d’elle. Elle l’amena à se blottir contre elle et, fermant les yeux, Loïs entoura ses bras autour de son cou et joignit ses mains sur le torse nu de Clark. Elle baissa légèrement la tête et posa son menton sur le haut du crâne de Clark, soupirant de ravissement. Elle se sentait bien, contre lui, en sécurité. Rien ne pourrait lui arriver, il était là.
Elle appuya ses deux mains liées sur le torse de Clark. Avec ses yeux fermés, Loïs ne put voir cette lueur bleutée qui apparut dans l’interstice entre la paume de ses mains et la peau du torse de Clark. Le phénomène ne dura que quelques courtes secondes mais son effet fut radical : Clark ouvrit subitement les yeux et prit une grande inspiration. Il cligna plusieurs fois des yeux et se mit à respirer avec vivacité, comme s’il venait de jaillir des abîmes de l’océan. Il baissa légèrement les yeux et, comme si son intuition lui révélait la réalité, s’exprima d’une voix faible :


Clark : Loïs ?!
Loïs : (rouvrant les yeux mais restant blottie contre lui) chut !! je suis là …

Mais cette réponse était loin de rassurer Clark. Tout au contraire. En une suite de geste imprécis, Clark parvint à se détacher de l’étreinte de Loïs qui enleva ses bras d’autour de son cou. Elle le regarda se relever difficilement et se retourner vers elle, l’air assez inquiet :

Clark : oui mais tu ne devrais pas être là !
Loïs : (outrée) mais regardes-toi, tu hurlais à la mort ! Tu as besoin d’aide !!

Clark savait bien que, vu de l’extérieur, il devait apparaître comme quelqu’un de complètement dingue. Mais sa bataille avec Kal-El n’avait rien de commun avec ce que Loïs avait pu connaître jusque là. Aussi, il se contenta de se détourner de Loïs et, d’un pas hésitant, s’approcha de la baie vitrée au fond de la salle. Il s’arrêta devant et se mit à fixer le centre-ville, sans réellement le voir. Il croisa ses bras sur son torse et, d’un ton morne et sans évocation de sentiments, s’exclama :


Clark : personne ne peut m’aider … personne !

Loïs ne comptait pas l’abandonner, pas maintenant qu’elle l’avait retrouvé. Elle avait dû se coltiner le coin le plus paumé du monde dénommé Smallville et avait supporté 6 heures de routes. Rien ne la ferait abandonner.
Elle se releva et s’arrêta à mi-distance entre Clark et le mur, derrière elle. Regardant sa nuque, Loïs lui répliqua, sur un ton délicat qui lui était rare :


Loïs : dis-moi ce que tu as au moins, ça ne t’engages à rien !
Clark : (sans se retourner) la seule personne qui a su qui j’étais réellement est morte …

Loïs savait de qui Clark parlait. Il s’agissait sûrement de cette deuxième femme qu’il avait aimé plus que tout au monde et qui était morte. Il devait avoir trop peur de s’accrocher à quelqu’un, peur de ressentir à nouveau cette atroce souffrance.

Loïs : (d’un ton décidé) je n’abandonnerai pas !

Clark laissa un surprenant rire sortir de sa bouche, surpris par la réaction de Loïs. Décidément, elle n’était en rien comparable avec toutes les personnes qu’il avait rencontrées jusque là. Il se retourna, gardant les bras croisés sur son torse et lui adressa un très large sourire.

Clark : on t’a jamais dit que tu étais pénible ?

Loïs esquissa à son tour un sourire, demeurant pourtant plus sérieuse qu’elle ne l’avait jamais été. Clark se retourna complètement et avança vers Loïs, le regardant de haut en bas. Elle était si craquante, encore plus que d’habitude …
Il s’arrêta devant elle et décroisa les bras. Loïs se força à penser « fixe ses yeux, fixe ses yeux » pour ne pas le dévisager de haut en bas. Mais quand Clark amena sa main droite vers la main gauche de Loïs, celle-ci ne put s’empêcher de baisser les yeux un court instant avant de les relever, presque aussitôt, vers les yeux d’un bleu pur de Clark. Une tendresse effarante était apparue sur le visage du jeune Kent :


Clark : Loïs … j’aimerais plus que tout pouvoir rester auprès de toi …(sur un ton amusé) bon, tu es assez difficile à supporter par moments …

Loïs esquissa une grimace amusée en baissant les yeux. Puis, elle releva les yeux vers Clark qui reprit son sérieux :

Clark : sérieusement … je t’apprécies beaucoup et j’aimerais pouvoir passer du temps avec toi mais pour le moment, je ne peux pas !

Loïs se rapprocha un peu plus, sentant une chaleur incompréhensible s’emparer de son visage. Elle s’approcha tant que le haut de son corps touchait presque le torse de Clark. Elle releva un peu plus les yeux et approfondit la presence de son regard dans celui de Clark. Cette brillance, enveloppant ses iris, faisait fondre le futur héros.

Loïs : mais pourquoi ?
Clark : je ne peux pas t’expliquer maintenant …
Loïs : (souriant malicieusement) je vais devoir faire preuve de persuasion …

Clark répondit à Loïs par un sourire lui aussi malicieux, se sentant brûler intérieurement suite à l’attitude de Loïs. Il sentait cette limite, qu’il avait lui même établi se fissurer à une vitesse ahurissante. Loïs approcha un peu plus son visage de celui de Clark, gardant ce sourire radieux. Clark perdit le sien, voyant Loïs se rapprocher encore un peu. Elle était si proche qu’il faudrait la repousser, il était grand temps. Mais Clark n’en fit rien …
Loïs déposa alors délicatement ses lèvres sur celles de Clark et lui donna un lent et tendre baiser, auquel Clark répondit. Après ce très long baiser, Loïs écarta juste assez son visage pour rester près de Clark mais pour qu’il puisse répondre, de cette voix veloutée, envoûtée :


Clark : tu ne me rends pas les choses faciles !
Loïs : (radieuse) c’est la vie … Smallville !

Loïs garda un court instant son sourire, regardant Clark droit dans les yeux. Ce dernier ne put résister à cette lueur ensorcelante, qui brillait dans les yeux bruns de Loïs. Il savait ce qu’il allait suivre et ce qu’il aurait dû faire : s’écarter avant que Loïs ne reprenne possession de ses lèvres. Il savait que cet acte n’était pas envisageable, jamais il ne pourrait vivre avec Loïs tant que son destin ne serait pas accompli. Et puis, il gardait toujours dans un coin de sa tête Lana, la magnifique Lana Lang. Comment en embrasser une autre en voyant, dans le creux de son esprit, le sourire exquis de son amour d’adolescence ? Comme Clark allait le faire …
Aussi, lorsque Loïs perdit son sourire pour une expression plus sérieuse et avança son visage vers celui du jeune Kent, ce dernier ne fit pas un geste de recul. Il la regarda simplement faire et déposer délicatement ses lèvres sur les siennes. Elle lui donna un long et tendre baiser, auquel Clark ne répondit pas. Mais la fièvre que ce baiser fit naitre en lui, à cette seconde précise, suffit à lui faire perdre toute notion de logique. Il ferma les yeux et lui donna à son tour un tendre baiser. Loïs prit cela pour une permission de continuer. Elle entoura ses bras minces autour de son cou et se mit à l’embrasser plus fougueusement, plus passionnément que précédemment. Leur échange se fit plus fort. Clark se colla contre Loïs et entreprit une suite de baisers plus passionnés que jamais. Il posa ses deux mains sur le bas du dos, à nu, de Loïs. Il sentait sa peau douce et tiède sous la paume de ses mains, il sentait cette passion frissonnante circuler dans ses propres doigts. Les baisers de Loïs agissaient en lui comme un virus particulièrement enivrant.
Ce même virus, aux souches passionnées, véhiculait dans le sang bouillonnant de Clark et de Loïs. Tous deux ne réalisaient pas vraiment pourquoi ils agissaient ainsi ; ils se contentaient de se souscrire à leur pulsion. Loïs avait pourtant repoussé Clark, une semaine avant. Mais cette fois, la pulsion était si forte, qu’elle annihilait la vision des conséquences et poussaient les deux jeunes gens à contenter leurs plus bas instincts.
Loïs resserra un peu plus son étreinte autour du cou de Clark, tandis que leurs baisers se faisaient plus puissants, fougueux, survoltés. Clark remontait lentement ses deux mains le long du dos délicat de Loïs, vers le milieu de ce dos. « Ce dos !! » pensa furtivement Clark. Faisant relever le tissu noir de son débardeur, il dévoilait petit à petit chaque centimètre carré de la peau bronzée de Loïs, la caressant délicatement. Arrivée à mi-dos, il continua encore, ne s’arrêtant pas en si bon chemin. Il savait ce qui se passerait s’il continuait dans cette voie mais, son cerveau n’avait plus son droit de suggestion. Seul ses hormones réfléchissaient.
Clark continua son acte et remonta encore le long de l’arrête dorsale de Loïs, caressant de la paume de sa main la peau de Loïs. La moitié du dos de la jeune femme était maintenant à nu et, de ce geste tendre, Clark continuait de faire remonter le tissu du débardeur. Loïs écarta son visage de celui de Clark et pencha la tête sur la gauche. Clark en profita pour se pencher doucement vers le cou de la jeune Lane et y déposa un tendre baiser. Loïs releva légèrement la tête et laissa Clark déposer une multitude de baisers dans le creux de son cou ; elle poussa un gémissement de plaisir.
Dans le même temps, Clark remontait sa main vers les omoplates de Loïs et effleura la bretelle arrière de son soutien gorge. Le débardeur était si relevé maintenant qu’il n’allait pas tarder à le faire basculer par dessus sa tête et l’ôter du corps de Loïs. Elle sentait la fièvre lui monter et ses gémissements s’accentuer …
Clark interrompit tous ses gestes. Il cessa de remonter le long du dos de Loïs et de caresser délicatement sa peau et ne donna plus aucun baiser dans le cou de Loïs. Pour une raison obscure, il avait cessé de bouger. Surprise, Loïs abandonna ce sentiment enivrant de passion et tira les traits de son visage en un mécontentement accru. Mais ce qui suivit l’étonna encore plus. Clark descendit sa main le long du dos de Loïs et s’écarta d’elle, en se redressant. Ne comprenant pas pourquoi il avait subitement changé d’avis, Loïs se redressa à son tour et leva la tête vers lui. Il se tenait droit, devant elle, les bras las, le long du corps. L’expression de son visage était devenue neutre, son regard glacial, vide de toute expression. Sa vision était porté sur la gauche de Loïs, vers la porte de l’appartement restée ouverte.
Loïs s’empressa de s’exclamer, d’une voix basse mais exprimant sa surprise :


Loïs : quoi ?!

Attiré par l’exclamation de Loïs, Clark déporta très lentement, de manière machinale, son regard bleu de la porte vers le visage abasourdi de Loïs. Alors, d’une voix froide et sans pareille avec la voix qui était la sienne auparavant, il répliqua :

Clark : c’est le signe …
Loïs : (grimaçant) quoi ??!

Une fois de plus, la part d’ombre, comme l’appelait Jor-El, de Clark avait repris le contrôle du corps de Clark. Kal-El déporta à nouveau très lentement son regard vers la droite et le posa sur la canapé, contre le mur. Sous les yeux effarés d’une Loïs qui n’y comprenait strictement rien, Kal-El passa à côté d’elle et avança, d’un pas robotique, ses bras tendus, ballant de chaque côté de son corps, vers le canapé, devant lequel il s’arrêta. Loïs se retourna d’un geste brusque et fit redescendre complètement le tissu de son débardeur. Elle regarda Clark se baisser, prendre un maillot noir sur le canapé et l’enfiler. Elle comprenait ce qu’il allait faire mais pourquoi le faisait-il ? Pourquoi maintenant ?

Loïs : (agressive) où tu vas ??

Kal-El ne donna pas de réponse immédiate à Loïs. Il se retourna complètement et fixa son regard vide droit devant lui. Il avança sur quelques pas, longeant le bord de la table et se tourna sur sa droite arrivé devant le mur. Alors, d’un bas lent et robotique, il s’engagea dans le court corridor. Sa voix y résonna en un écho glacial :

Kal-El : au rocher noir …

Loïs était certaine de ne pas avoir compris ce qu’il fallait. « Le rocher noir ». Qu’est ce pouvait bien être ? Une boîte de nuit qu’elle ne connaissait pas ? Une falaise de Smallville ? Une de ces grottes réputées ?
Le temps de cette réflexion suffit à Clark pour arriver sans encombre au bout du couloir, passer par l’embrasure de la porte et tourner sur sa gauche, dans le couloir menant à l’ascenseur. Loïs émergea de sa rêverie au moment où un étrange bruit de vent se fit entendre. Le cœur battant à tout rompre, elle longea à son tour le corridor, mais au pas de course et sortit dans le couloir menant à l’ascenseur. Elle s’engagea dans le couloir et s’arrêta devant la porte ouverte de l’appartement, son corps tourné vers l’ascenseur, au fond. Elle vit avec effarement ses portes se refermer sur la silhouette massive de Kal-El, qui la regardait froidement.


Loïs : comment tu as fait ça …Smallville ?

 

Grottes Kawache – Smallville --- 17h53

[La caméra, fixée au sol dur et poussiéreux des grottes, filmait d’un plan en contre-plongée la silhouette de Lex Luthor, face à elle, qui observait la paroi rocheuse, derrière la caméra]
Lex, habillé de ce même pantalon noir et du long manteau assorti, n’avait pas arrêté d’observer les spirales de symboles Kryptoniens, peints autour de la serrure octogonale, depuis que Jonathan Kent l’avait quitté, quelques minutes plus tôt. Les mains dans les poches de son pantalon, il baladait son regard azur, dénué de la moindre expression notable, en arc de cercle, remuant légèrement les lèvres lors de leur traduction. Il se plaisait à les relire, même après les avoir compris depuis longtemps. Aussi, il recommença une énième fois, se ravissant des évènements qui, selon ces mots, ne tarderaient pas à venir.


« Au soir de la nuit rousse, l’or et la mort engendreront poussière et débris … le fils du mal anéantira tous liens entre le fils céleste et sa mémoire … la dernière étape du voyage du dernier fils prendra effet au moment où la clé renaîtra … »

Lex esquissa un nouveau large sourire. Par « fils du mal », il se croyait représenter. Et le fait qu’il parvienne à détruire la mémoire de son ennemi, le rendait très heureux. Dans son esprit, seul Clark pouvait tenir cette place ; telle était la raison de ses paroles, lorsque Jonathan était présent.
Lex se décida enfin à tourner les talons et quitta des yeux la paroi rocheuse, à laquelle il portait un tel intérêt. Il avança d’un pas résonnant en un écho interminable dans les hauteur de la grotte, vers une toute autre paroi, semblable en de nombreux points, faisant face à la première, à plusieurs mètres d’écarts. Elle aussi était frappé de nombreux pictogrammes amérindiens, faisant allusion à la mythique légende de Naman et Saguis, si chères aux Shamanes. Parmi eux, on voyait apparaître un disque noir, entouré d’un liseré blanc : une éclipse solaire. Il y avait également, tout en haut, à la base du mur voûté, les dessins d’un homme supportant schématiquement, à bout de bras, 10 autres silhouettes. Mais Lex n’y prêta aucune attention notable. Il longea la paroi vers la droite jusqu’à arriver à un coin, encré dans la roche, près de l’entrée creusée dans la paroi, devant Lex. Ce dernier ne passa pas sous l’arche mais s’arrêta devant le coin que formait les deux murs. Il savait où il allait.
L’ombre qui envahissait la roche empêchait de voir clairement l’importance qu’elle pouvait avoir aux yeux de Lex, quel élément particulier l’amenait à s’arrêter devant. Peut être était-ce cette espèce de forme octogonale, gravé sur la paroi de gauche et couvert, à l’intérieur, d’une peinture rouge sublime ? Malgré la pénombre assez intense, il paraissait claire que d’autres inscriptions apparaissaient, en spirales, autour de la serrure. Mais l’ombre empêchait de les analyser plus en détail. Le sourire de Lex n’en tarissait pas. Il sortit sa main droite de la poche de son pantalon et l’amena à mi-hauteur, révélant un objet plat posé sur le creux de sa main. Il s’agissait de cette plaque de métal rouge, creusé sur ses bords de trois symboles Sethi noirs qui avait permis à Lex d’entrer dans le tombeau de Sethi.
Soudain, un sifflement strident s’éleva au moment où chacun des trois symboles s’illuminait d’une lueur blanche éclatante, jaillissant alentour. Le sifflement strident ne sembla pas gêner le moins du monde Lex qui, préservant son large sourire, regarda la clé Sethi s’élever délicatement dans les airs, au dessus de sa paume et effectuer une rotation sur elle même pour se placer parallèlement à la paroi rocheuse. S’élevant encore un peu dans les airs, il s’approcha lentement de l’encoche creusée dans la roche et s’arrêta arrivée juste devant. A cet instant, elle tourna sur un quart de tour et s’enclencha brusquement dans la cavité. La lumière redoubla d’intensité dans les symboles et la même aura lumineuse jaillit de la serrure, s’extirpant d’elle entre l’interstice séparant le bord de la serrure et celui de la clé. Cette lumière éclaira le visage radieux de Lex et activa le mécanisme de la paroi.
Simultanément, chaque spirales de symboles fut baignée d’une lueur rouge flamboyante et, tournoyant eux même sur eux même, les spirales se mirent à tourner, chacune en contre-sens de celle située au dessus. Ainsi, en cinq secondes, chacune des cinq spirales s’était mise à tourner sur elle même, autour de la serrure et projetait sa lumière vive sur un Lex admiratif. Leur origine avait enfin été révélée, bien qu’elle paraissait évidente : les symboles appartenait à la dynastie Sethi.
Soudain, Lex leva sa main droite au dessus de la serrure et posa son index et son majeur, collés l’un à l’autre, sur un symbole mouvant, encré dans la spirale du centre, qui passait à la verticale de la serrure. Immédiatement, la spirale, bien que toujours lumineuse, s’immobilisa. Le symbole, de forme carré et parsemé, en son centre, de filaments étranges, s’illumina de plus belle et bougea de manière différente qu’auparavant. Ses contours se replièrent vers l’intérieur et formèrent ainsi un triangle équilatéral, toujours parsemé de filaments. Une lumière blanche apparut, au sommet du triangle et se déversa rapidement vers le bas de triangle. Sur son passage, elle recouvrit la roche, à l’intérieur du triangle ne laissant place qu’à la lumière céleste.
Lex baissa les yeux et sortit les mains de ses poches. Il amena la droite vers l’intérieur de sa longue veste et écarta le pan de gauche. Il plongea cette main dans une poche intérieur et la ressortit juste après, refermée sur quelque chose. Il aplanit la main, révélant l’objet : il s’agit d’un objet plat, de forme pentagonal, gravé du symbole Kryptonien « Guide », en son centre. Il s’agissait de l’artefact confié par Swann à Josh, alias Ava-El. Désormais, il était en possession de Lex. Mais que comptait-il en faire ?
Sous l’influence de l’esprit retord du jeune Luthor, le triangle blanc laissa disparaître la lumière blanche le parsemant et ouvrit une cavité peu profonde, aux taille et forme du symbole. Lex amena lentement l’artefact Kryptonien vers la cavité et le déposa à l’intérieur, avant de retirer sa main. Le symbole « Guide » se baigna un instant de lumière blanche éclatante. Mais, le métal luisant se mit à rougeoyer furieusement, l’empêchant d’interagir avec les grottes. Peu après, le symbole s’éteignit, suivi, peu après, de son métal.
La lumière blanche réapparut alors dans le triangle et, parcourant l’espace vide de la base inférieur du triangle jusqu’à son sommet, laissa place à la roche rugueuse, comme à sa place initiale. Lex tendit à nouveau sa main devant son ventre, à mi-hauteur ; sa paume, à plat, appelait la clé Sethi. Obéissant à son maître, elle s’extirpa délicatement de la serrure, gardant ses trois symboles lumineux. Cependant, chacune des spirales de symboles s’immobilisa et perdit son scintillement, redevenant aussi immobile qu’avant l’intervention de Lex. Ce dernier regarda la clé se déposer doucement sur sa paume et ses symboles s’éteindre, au même moment où le sifflement strident s’interrompait. Elargissant un peu plus ses lèvres en un sourire satisfait, Lex referma sa main sur la clé et amena ses deux mains dans ses poches de pantalon. A cet instant, une interaction vint troubler l’harmonie présente dans son esprit. Maintenant que toute son attention n’était plus tournée vers le système des grottes, il ressentait intensément cette présence, derrière lui, qui devait l’observer depuis un certain moment s’il en croyait les peurs qui s’immisçaient dans son esprit faible. Lex se retourna rapidement, tournant son regard vers cette silhouette présente derrière lui, à cinq mètres.
Lex caressa du regard toute la silhouette petite et mince de cette jeune femme, qui l’avait regardé dans ses œuvres. Habillée d’un jean grisé et d’une veste cintré beige, elle semblait apeuré e par ce qui risquait de lui arriver. Son regard noisette, dont les deux rétines étaient séparées par une mèches de cheveux blonds traversant son visage, exprimait un sentiment qui, par la parole aurait pu donner : « Mode d’emploi pour remonter le temps j’écoute ? // C’est urgent ! ». Elle aurait aimé plus que tout fuir à toutes jambes. Mais elle pouvait être certaine que Lex la retrouverait, tôt ou tard. Ses courts cheveux étaient coiffés à plat dont une grande mèche plaquée sur son front, afin de dissimulée une coupure, sur ton de bleu. Chloé recula d’un pas, nerveusement, sachant que le pire allait certainement se produire. Elle ne savait pas pourquoi Lex lui avait demandé de se rendre dans ces grottes au plus vite mais elle était certaine qu’elle aurait préféré ne jamais l’apprendre.


Lex : (enjoué) Chloé !

Le fait que Lex ait ignoré totalement l’observation de Chloé n’était certainement pas un bon présage. Baissant les yeux vers le sol mais préservant ce sourire radieux, Lex avança rapidement en direction d’une Chloé qui sentait le rythme de son cœur accélérer rapidement. Lorsque Lex s’arrêta à sa hauteur, sur sa gauche et releva les yeux pour ajouter une phrase, Chloé le sentit atteindre son paroxysme :

Lex : (regardant droit devant lui, baissant le timbre de sa voix) je n’aurais pas cru que tu te dépêcherais de venir …

Les mots prononcés par Lex provoquèrent, par un phénomène que Chloé ignorait en tous points, une vague de froid glacial qui emplit chacun de ses membres. Pendant la courte période qu’elle dura, cette sensation l’empêcha de respirer convenablement et de faire le moindre geste. Elle ne put qu’écouter Lex s’éloigner derrière elle, d’un pas caractéristique et s’arrêter brutalement, tandis que le rythme de son cœur devenait vraiment douloureux. Un pincement plus perceptible lui valut même une grimace douloureuse. Mais Chloé savait qu’elle devait se reprendre, c’était impératif. Aussi, étirant les traits de son visage en un sérieux inébranlable, à ses yeux, elle se retourna et braqua son regard sur la carrure de Lex, dos tourné, à quelques mètres d’elle. Il regarda droit devant lui, un sourire fier sur ses lèvres.

Chloé : ça avait l’air important !
Lex : ça l’est !

Un long silence s’en suivit que Lex avait décidé d’imposer. Il ressentait les moindres sentiments de Chloé et il savait combien ses peurs étaient grandes. Il allait s’en jouer de la façon la plus subtile qui soit, faisant honneur à ses ancêtres. Chloé, ne supportant plus ce silence de cathédrale trop pesant à ses yeux, décida de briser le silence sous un faux prétexte :

Chloé : Lex, fais vite, Ian m’attend ! Il …
Lex : (la coupant) pourquoi es-tu allée voir le Docteur Swann ?

Cette phrase coupa nette Chloé dans son élan. Cette vague de froid refit surface et submergea Chloé de toutes parts : Comment avait-il su ? Chloé avait imploré Swann de ne rien dire à personne de sa visite chez lui, de peur que Lex ne l’apprenne de quelconque manière. Swann n’avait rien dit, c’était une certitude. Chloé avait confiance en lui, il voulait l’aider. Il voulait l’aider ? Après tout, Chloé ne savait pratiquement rien de cet être mystérieux qu’était le Docteur Virgil Swann.
Une sensation bizarre naissait en Chloé : il y avait ce froid, glacial, qui lui glaçait les os. Et pourtant, une flamme brûlait en elle, une flammes qui était entourée par cette lace, la flamme de sa volonté. Mais sa chaleur ne suffisait pas à faire fondre l’emprise de Lex sur sa personne. Il était le plus fort et la jeune Sullivan se fut pas surprise de sentir ses lèvres articuler des mots qu’elle n’avait pas souhaités dire :


Chloé : je voulais en savoir plus !

Lex esquissa un très large sourire, content de lui. Restant de dos par rapport à Chloé, il tourna la tête sur la droite et braqua son regard vers le sol en signe d’attention envers Chloé. Il prononça ensuite ces mots, d’une voix basse signifiant qu’ils étaient plus destinés à lui même qu’à Chloé :

Lex : en savoir plus … (haussant le ton) en savoir plus à propos de Kal-El … ou …

Cette fois, il se retourna complètement vers Chloé et lui lança un regard qui anima en elle un effroi sans égal. Elle sentit le rythme de son cœur accélérer de manière des plus douloureuse, jamais elle n’avait ressenti telle douleur.

Lex : (finissant sa phrase) … à propos de moi ?

Chloé cligna des yeux, sous l’intensité du regard bleu, glacial, de Lex. Elle pensa très fort « ne réponds pas, ne réponds pas … » car elle savait que si Lex venait à apprendre les raisons de sa visite chez Swann, elle allait au devant de gros ennuis. Et pourtant, malgré l’expression ahurie de son visage, elle entendit ces mots, sortir de sa bouche, sans le vouloir :

Chloé : a vrai dire, pour les deux !

Elle écarquilla brusquement les yeux, n’osant croire à ces mots. Elle venait de prouver, bien malgré elle à Lex qu’elle ne croyait pas le moins du monde au fait que Lex était le sauveur de la planète et Clark le méchant de l’histoire.
Lex laissa un rire sortir de sa gorge, en baissant les yeux vers le sol. Continuant de rire d’une manière effroyable, Lex releva finalement les yeux et les braqua sur Chloé, plus loin. Arborant un sourire de dément, il commença à avancer vers elle, sous son regard effrayé :


[The reason -- HOOBASTANK]

Lex : j’ai toujours apprécié ton franc-parler, Chloé … Et j’ai cru comprendre que c’était de famille !

Cette fois, la raison qui venait de nouer nerveusement l’estomac de Chloé ne provenait pas du phénomène effarant qui la tiraillait. Non. Lex semblait s’intéresser à sa famille et cela ne présageait rien de bon.
Lex s’arrêta face à elle et reprit, sur un ton amusé :


Lex : Loïs a un sacré caractère !

Chloé sentit une boule de fièvre exploser dans sa tête et émincer pendant un court moment la glace qui entourait sa volonté. Elle put commencer une phrase sur un ton énergique, qui ne perdura pas, malheureusement :

Chloé : laisses-la en dehors de ça … je suis … la … seule concernée !!

Chloé sentait son cœur étreint par une force inhabituelle. Cette puissance, inégalable, le compressait tant que le sang avait peine à y entrer à en sortir. Ses membres s’engourdirent rapidement et elle sentit ce froid sensoriel devenir triste réalité. Le bout de ses doigts se mit à bleuir.

Lex : (voix de dément) non Chloé ! Tu te trompes ! Toute la planète est concernée ! Et moi plus encore …

Lex avança de deux nouveaux pas, ne laissant ainsi qu’un mètre d’espace entre Chloé et lui. Il délaissa son expression amusée pour endurcir les traits de son visage. Cette fois, il n’avait plus envie de rire, Chloé essayait de lui nuire et ça, il ne le permettrait jamais :

Lex : (voix dure) je ne te laisserai pas annihiler les chances de mon avenir colossale !!

Chloé réalisa qu’elle n’aurait jamais dû continuer dans cette voie. Même si Lex avait décidé de la piquer au vif en évoquant Loïs , elle savait que ce n’était que pour attirer son attention. Pourtant, maintenant qu’elle s’était engagée dans cette impasse, il fallait mieux aller jusqu’au bloc qui en fermait l’entrée.

Chloé : (essoufflée) tu n’es même pas sûr d’être Kal-El ??!

La colère de Lex explosa alors si soudainement que Chloé en sursauta. Il se mit à vociférer violemment au visage de Chloé, d’une voix forte qui résonna en échos dans toute la grotte.

Lex : JE SUIS KAL-EL !!! Je le sais et tu devrais le savoir !!!

Chloé se sentit submerger par un mal extérieur qui lui tapa violemment sur le haut du corps et la força à s’affaler sur le sol. Ses genoux le heurtèrent et toute sensation de tiédeur la quitta, ne laissant place qu’au froid glacier. Elle baissa les yeux vers le sol, ayant de plus en plus de mal à respirer. Elle laissa le haut de son corps se placer à la parallèle du sol et ses mains tomber sur le sol. Désormais à quatre pattes, elle fixait le sol en respirant succinctement. L’air entrait dans ses poumons mais ne suffisait pas à la tenir en vie. Elle n’allait pas tarder à rejoindre ses grand-parents …
Lex retrouva finalement son sourire machiavélique, ravi de voir qu’il réussissait ce qu’il avait espéré. Il avança encore d’un pas, se plaçant devant Chloé et enleva les mains de ses poches. Il s’accroupit pour se mettre à la hauteur de Chloé et lança ces mots, doucement :


Lex : je suis le seul qui ait le droit de vie et de mort de cette planète …

Un nouveau silence prit place, pendant lequel Chloé, tête baissée, observa le sol sans vraiment le voir ; il était trop flou. Lex reprit :

Lex : je me suis toujours demandé pourquoi l’Ange de la Mort n’arrivait pas à m’attirer dans ses filets. La réponse m’est apparue en entrant dans le tombeau de mon ancêtre …

Lex amena sa main droite vers le menton de Chloé et releva sa tête vers lui. Son regard était devenu vide et la peau de son visage bleuissait. Elle était sur le point de rendre son dernier souffle. Pourtant, Lex, le sourire aux lèvres, ajouta, sur un ton enjoué :

Lex : je suis la mort …

Alors, il lâcha le menton de Chloé. Cette dernière se laissa basculer sur le côté, sans forces. Son souffle était devenu un râle horrifiant, un râle qui était sur le point de s’arrêter net. Lex se releva, laissant un rire s’échapper de sa gorge et se tourna sur sa droite. Il s’avança d’un pas décidé vers la sortie et, avant de la franchir, lança à Chloé, d’une voix vive :

Lex : tâches de t’en souvenir …

Et il disparut derrière le pan de mur. La glace disparut du corps de Chloé et sa flamme s’étendit dans tout son corps. Elle prit une grande inspiration et respira profondément : la vie était subitement revenue en elle. Elle se laissa retomber le flanc droit sur le sol et continua de reprendre sa respiration. L’héritier du mal était fin prêt.
[La caméra s’éleva au dessus de Chloé et la filma, respirant profondément sur le sol. Elle fit basculer son plan droit devant elle et s’approcha d’une paroi rocheuse. Sur le haut, une ombre dissimulait un pictogramme, sous la voûte du toit. Pourtant, son importance était crucial. Constitué d’un corps bleu, limpide et d’un monstre noir, il représentait l’équilibre entre Naman, fils du bien et Saguis, fils du mal. Le monstre autrefois rouge avait finalement viré au noir intarissable : signe du mal absolu]


**************

2.15 DESTINIES // © Alehi – Juillet 2005